Neuf habitants arrêtés pour obstruction de la voie publique. Deux membres du Parti travailliste interpellés, puis relâchés sur parole. Ils comparaîtront devant la justice, ce jeudi 18 avril à 11 heures. Une dizaine d’autres arrestations sont à prévoir.
L’incident s’est produit dans la soirée du mardi 16 avril. Des habitants de Nehru Road, Phœnix, sont descendus dans la rue pour exprimer leur colère après les débordements du tout-à-l’égout sur la chaussée et dans les cours. Sept personnes ont été interpellées. Une dizaine d’arrestations sont à prévoir pour d’obstruction sur la voie publique.
Les problèmes liés au tout-à-l’égout sont la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Des membres du public sont descendus dans la rue pour exprimer leur amertume. « Les eaux malodorantes et les matières fécales se répandent à la surface et se dispersent sur la chaussée. Cela incommode fortement les habitants », témoigne un manifestant.
Vers 17h30, des unités de la police de Phœnix, l’ERS, la SSU, la CID et le FIO sont mandés sur le lieu. 25 personnes sont rassemblées et obstruent la route avec des blocs de béton et des pneus. Très vite, la foule gonfle. Plus de 70 personnes laissent alors entendre leur colère.
Dans cette foule, on distingue la présence de Patrick Assirvaden et de Cader Sayed-Hossen, membres du PTr, qui sont venus rejoindre les manifestants, en signe de solidarité.
La police lance un avertissement à la foule. Des habitants réclament une action immédiate de l’autorité concernée, la Wastewater Management Authority et se dirigent vers la jonction des routes de St-Paul.
19 heures. Des personnes rassemblées ont placé deux barils et une pancarte sur laquelle on lisait : « Welcome to New York City », empêchant le passage des véhicules sur les routes St-Paul et Nehru.
La police aura du fil à retordre pour calmer les esprits. Elle ordonne à la foule de se disperser pacifiquement : « Sa rasanbleman la li ilegal, la polis pe dir zot al zot lakaz, si zot kontinye res la, zot pou komet enn ofans e nou pou pran aksion. »
Malgré l’avertissement, nul ne semble y prêter attention. L’avenue St-Paul est dégagée par les agents de l’ordre.
Entre-temps, la foule grossit à la rue Nehru jusqu’à 20 h 30. Les ouvriers de la WMA y ont pour effectuer les réparations nécessaires. Les habitants sont restés dans la rue jusqu’à 21h45, avant que la situation ne retourne à la normale.
Dans la soirée, l’inspecteur Seewoo et son équipe de l’Anti-Robery Squad et la CID de Phœnix ont entamé les premières arrestations : 11 personnes interpellées à mercredi. Quatre ont été libérées sur parole et devront se présenter en cour jeudi. Sept autres ont été libérées contre une caution de Rs 7 500 pour « obstructing public road. »
Sentiments mitigés des internautes
Les internautes ont vivement réagi après l’arrestation du président du Parti travailliste, Patrick Assirvaden, et de l’ancien ministre Cader Sayed-Hossen. Ils étaient nombreux à s’exprimer sur la page Facebook du Défi Média Group. Si certains n’ont pas marqué de fustiger les deux politiciens, par contre, d’autres ont exprimé leur solidarité envers eux.
Soobiraj Teeluck a tenu à faire ressortir que les deux politiciens étaient absents sur le terrain lorsqu’ils étaient au pouvoir. Salim Oozeer a abondé dans le même sens en expliquant que la population connaît le rôle de ces politiciens. Aakanksh Ramroop précise, pour sa part, que ces politiciens avaient négligé leur mandants lorsqu’ils étaient au pouvoir et ce n’est que maintenant qu’ils éprouvent de la sympathie pour les citoyens. Moorgesh Sitressen est d’avis qu’ils sont en train de tirer profit de la souffrance des habitants.
Cependant, Suren Gungadeen a tenu à saluer les politiciens en leur demandant d’avoir le courage pour lutter. Bashir Uddeen pense qu’il n’y aura pas de poursuites alors qu’Aradhana Brahim a indiqué qu’elle est de tout coeur avec les deux politiciens. Irène Sa se dit « choquée » par les agissements de la classe politique ce mercredi 17 avril avec l’arrestation de Patrick Assirvaden et de Cader Sayed-Hossen mais aussi par l’incident entre la députée Aurore Perraud et les habitants de Résidence La Cure.
Assirvaden : «Nous n’avons rien fait de mal»
Patrick Assirvaden et Cader Sayed-Hossen sont arrivés au bureau de la CID de Curepipe, accompagnés de leurs avocats Yatin Varma, Satish Faugoo et Shakeel Mohammed. Ce dernier parle d’une « vendetta politique ». À aucun moment, proteste-t-il, la police n’a informé Patrick Assirvaden et Cader Sayed-Hossen qu’ils ont participé à un rassemblement illégal. La police a juste dit « Patrick et Cader dan la foul. Zot pe travail dan la sirkonskripsion no 15. Li kler ki zot viktim vandeta politik. » À sa sortie du bureau de la CID, Patrick Assirvaden a déclaré que sa présence et celle de Cader et d’autres camarades travaillistes sur le terrain s’expliquent par la volonté de résoudre les problèmes des citoyens. « Cader et moi sommes libres de partir, mais nous devrons être en cour ce jeudi matin. Nous croyons en la justice, nous n’avons rien fait de mal. »
Réactions
Xavier-Luc Duval, leader de l’opposition
« Je comprends la colère et la frustration des gens face à l’indifférence et la négligence des autorités. Souvent la population se trouve dans une situation désespérée et n’a d’autres choix que de descendre dans la rue. La paix sociale est en danger. Ce n’est pas la répression qu’il faut, mais une meilleure compréhension de la réalité de nombreux Mauriciens. Il faut une proactivité. C’est d’ailleurs le reproche que la directrice de l’Audit avait fait dans son dernier rapport. Elle avait condamné le gouvernement pour son manque de réactivité face aux inondations. »
Rajesh Bhagwan, du Mouvement militant mauricien
« C’est l’exaspération à son comble. La population manifeste son sentiment de ras-le-bol surtout avec la mauvaise distribution d’eau et maintenant le tout-à-l’égout. Patrick Assirvaden est un ancien député de cette circonscription, je suppose que les habitants l’ont sollicité. Avec cette arrestation, c’est l’arrogance en fin de règne de ce gouvernement et l’arrogance au pouvoir. Malgré ma santé, j’ai appelé le président du Parti travailliste pour lui exprimer ma solidarité. Les habitants de la circonscription no 15 devront tirer leurs propres conclusions ».
Jack Bizlall, observateur politique
« Dans le cas de l’arrestation de Patrick Assirvaden, c’est un abus d’autorité de la police. Qui plus est, nous ne devons pas retourner dans les années 72. Je demande formellement que toutes les charges soient immédiatement enlevées. Si les charges ne sont pas enlevées, le magistrat a toute la liberté de rejeter les charges. »
Atma Bumma, du Mouvement patriotique
« Nous assistons à une arrestation extrêmement arbitraire. Si un dirigeant politique ne peut soutenir la peine, la souffrance et l’exaspération d’un citoyen, c’est aberrant. Est-ce illégal de le faire ? La police a mal agi, c’est une victimisation politique. Cette arrestation occulte la vraie raison. La réelle raison est reléguée au second plan. Cette manifestation à St-Paul n’est pas la première, nous avons eu l’exemple à Fond-du-Sac et Cité Atlee, entre autres. Mais pourquoi il n’y a pas eu d’autres arrestations dans ces régions alors que deux politiciens ont été arrêtés. C’est regrettable et nous déplorons cette action arbitraire et répressive. »
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