Dhawoonauth, 93 ans, aura passé les dernières années de sa vie à recevoir en silence coups et blessures de la part de son fils Randirsing Choytun, 55 ans, Malgré l’agressivité de ce dernier, elle passait l’éponge.
Ce n’est que tout récemment qu’elle avait fait part de sa situation à une voisine et à son ex garde malade.Elle affirmait qu’elle en avait assez et souhaitait quitter sa maison à Résidence Nicolière. Mais elle n’a pas eu le temps de partir. Dans la nuit du 4 au 5 septembre, ce fils qu’elle chérissait malgré tout s’est une nouvelle fois acharné sur elle. Cette fois- ci a été la dernière car Mama Adoune, comme elle était affectueusement connue, y a laissé la vie.
La vie de la dame a été parsemée de fortunes diverses. Mariée dans un premier temps et résidante de l’Esperance, Dhano Dhawoonauth, a eu une fille de cette union. Elle travaillait aux champs pour gagner sa vie. Puis elle a perdu son époux. Durant ces moments pénibles, elle n’a pu compter que sur elle-même. Elle est parvenue à s’occuper de sa fille Sumitra.
Puis elle a fait la connaissance d’un autre homme. « Mama Adoune s’est mise en ménage avec notre père » explique Nandkumar, le beau-fils de la dame. Avec son compagnon, elle a eu un fils, Randirsing Choytun, appelé Adoune. Ils se sont installés à Résidence Nicolière, Saint-Pierre. « Coma lakaz inn livré sa lepok la, linn vinn rester » poursuit son beau-fils. Sumitra, sa fille a fondé sa propre famille et s’est installée ailleurs.
A cette époque, la famille, recomposée, était heureuse. « Depuis plus de 30 ans je les connais, il n’y a jamais eu de problème. Elle ne manquait jamais une occasion pour sortir seule. Elle avait toujours le sourire » se remémore une voisine. Randirsing n’aura manqué de rien. Il a étudié jusqu’au secondaire. En plus de ses études nous dit Nandkumar, le demi-frère, il était un sportif. « À cette époque, il pratiquait la boxe et le karaté. Il a même remporté des tournois. Ensuite il a pris de l’emploi comme chauffeur de camion » se souvient-il.
Aux dires de Nandkumar, mère et fils s’entendait bien. Des années plus tard, la dame a dû faire face, une nouvelle fois, au décès de l’homme qui partageait sa vie. Nandkumar et les siens ont construit leur vie chacun de son côté. Dans la maison, il ne restait plus que mère et fils. « Ils étaient proches et moi je ne les ai jamais vu se quereller » confie Nandkumar.
Sombré dans l’alcool
« Son fils a été victime d’un accident de travail. Elle lui avait demandé de ne plus y aller, qu’elle allait s’occuper de lui. De plus, il souffrait d’hypertension » nous explique Kavita, l’ex garde malade de la vielle dame. Selon le voisinage, Adoune qui ne s’est jamais marié a fini par sombrer dans l’alcool. C’est à partir de ce moment que le calvaire de la mère aurait commencé.
Sumitra, la fille de la vieille dame ne pouvait plus venir chez eux. « Il nous chassait et nous injuriait quand nous venions voir ma mère. En plusieurs occasions, il a récidivé » explique-t-elle. Résultat, elle n’a plus osé retourner la voir, « pendant 25 ans il m’a tenu éloignée de ma mère » ajoute sa fille. Pour Liseby, une voisine de Mama Adoune, le fils avait dépassé les bornes. « Il vivait au dépens de sa mère. Il lui prenait tout l’argent de la pension pour s’acheter à boire. Il faisait venir même des amis pour boire un coup chez lui. Une fois saoul, il s’acharnait sur elle et la rouait de coups. La dame n’a jamais rouspété » explique-t-elle.
« Elle l’aimait »
Les différentes mises en garde de Liseby étaient vaines « Je lui ai déjà supplié d’arrêter de faire souffrir sa mère, mais il restait de marbre. C’est l’argent de la pension qui l’intéressait ». Les voisins en maintes occasions ont fait appel à la police pour venir le calmer. Tout récemment, la vieille dame a dû être hospitalisée pendant plusieurs semaines à l’hôpital de Flacq. « Elle avait le bras fracturé. Elle m’avait avoué que c’était son fils qui l’avait agressée. Elle m’a dit de ne rien dire » nous dit Kavita. Elle n’a travaillé que deux mois aux chevets de la vieille dame et ne pouvait plus supporter le comportement du fils. « Il n’hésitait pas à la frapper devant moi. Il m’injuriait également. Malgré tout, elle le réclamait toujours lorsqu’il sortait. Elle l’aimait. Mais récemment elle n’en pouvait plus et voulait venir chez moi » dit-elle. Son amour pour son fils a fini par causer sa perte.
Mise à la porte le vendredi 31 août dernier par le fils, Kavita n’est plus retournée voir la vieille dame. Cinq jours après, c’est tout un quartier qui a été sous le choc en apprenant le mort tragique de Mama Adoune, tuée des mains de son propre fils.
L’agression de trop
C’est vers 7 h 30 mercredi que le corps sans vie de Dhano Dhawoonauth, a été retrouvé dans une mare de sang à son domicile. Son fils Randirsing Choytun était encore sur place. La police de Saint-Pierre alors été alertée et le fils interpellé. L’autopsie a conclu qu’elle a succombé à une hémorragie intracrânienne causée par des coups reçus à la tête et au visage. Le suspect est alors passé aux aveux. Il a dit aux enquêteurs de la CID de Moka avoir agressé sa mère et que celle-ci ‘s’est écroulée. « Lorsque j’ai vu le sang j’ai paniqué » a-t-il affirmé aux limiers. Souffrant d’hypertension, il a été conduit à l’hôpital pour dles soins. Jeudi après avoir obtenu sa décharge de l’hopital, il a comparu devant la cour de Moka sous une charge provisoire de meurtre. Il demeure en cellule policière. Vendredi il a été admis à l’hôpital psychiatrique de Brown Sequard à Beau-Bassin. La police poursuit son enquête.
Adoune, le fils aux deux visages
Randirsing Choytun, 55 ans, connu comme Adoune, fils de la victime est décrit par certains voisins comme un tyran et un homme violent, interdisant sa mère d’être approchée par quiconque. « Li pas laisse dimoune vinn get so mama. Li zourer ek maltraite mama la » déplorent-ils. Mais pour Nandkumar, le demi-frère d’Adoune, la relation de ce dernier avec la victime était sans reproche. « Je n’ai jamais vu Adoune se disputer avec sa mère. Pour moi, ils étaient en bon terme. Je ne sais pas vraiment ce qui est arrivé à mon frère. Cela fait deux ans que je ne l’ai pas vu. Ce n’est pas parque ne nous sommes pas en bon terme, c’est plutôt parce qu’il n’est jamais venu me voir » nous dit-il. Pour Kavita, c’est son penchant pour l’alcool qui est la cause de tout leur malheur. « Quand il ne boit pas, le fils est quelqu’un d’abordable, qui ne fait pas de vagues. Me kan li bwar, li vinn mari mover. Pa kapav ek li. Coma dire li vinn enn lot dimoune »
Kavita, l’ex garde malade : «Elle disait qu’elle allait mourir dans sa maison»
Kavita a travaillé deux mois comme garde malade auprès de Mama Adoune. « C’est à la suite de son admission à l’hôpital après sa fracture au bras que la sécurité sociale m’a demandé de m’occuper d’elle. Elle était une très gentille dame. Elle ne pouvait se mouvoir et m’avait offert un double des clés de la maison. Son fils lui rendait la vie dure. Je rentrais chez eux à 8h 30 et en plusieurs occasions à cette heure, son fils était déjà saoul. Il nous injuriait » nous explique-t-elle. Elle est restée au service de la dame malgré tout. « Quoiqu’âgée, elle était lucide dans ses propos. Mais tout dernièrement elle voulait venir habiter avec moi. Elle m’en a fait la demande. Li dire mo vinn rest kot twa. Si ti pou ena plass kot mwa mo ti pou amene li » se souvient Kavita. « Par la suite, elle m’a dit que lorsque son heure viendra, elle allait mourir dans sa maison ». Maintenant ces mots prononcés par la vieille dame prennent tout son sens pour Kavita. « Je n’en pouvais plus sentir son fils qui m’avait arraché la clé des mains et mis à la porte. Mo bien sagrin ce kinn arriver » pleure-t-elle.
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