Des SDF ont créé une cantine de fortune à la foire de Mahébourg. Ils reçoivent des dons d’aliments de la part d’habitants puis préparent et partagent des repas chauds avec d’autres sans-abri du village.
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On dit souvent que ce sont ceux qui possèdent le moins qui partagent le plus. Les Sans Domicile Fixe (SDF) de Mahébourg confirment l’adage. Cinq sans-abri vivent à la foire du village. Ils ont élu domicile dans un local qui sert normalement au stockage de marchandises. Cette unique pièce de quatre mètres carrés leur sert de chambre et de garde-manger. L’extérieur est couvert par une marquise. Ils y ont placé des fauteuils et une table de récupération. Plus loin, les cinq compagnons ont aménagé un foyer pour cuire à manger. Cet endroit est vite devenu bien plus qu’un simple abri. Désormais, il s’agit d’un lieu de partage, une cantine de fortune pour des sans-abri de Mahébourg.
Les cinq SDF qui vivent dans cet endroit ont peut-être froid la nuit, mais cela ne les empêche pas d’être chaleureux. C’est avec de larges sourires sincères que deux d’entre eux ont accueilli l’équipe du Défi Media Group dans leur humble demeure le lundi 11 mai 2020. Mohammad et Richard sont accompagnés par Eddy. Ce dernier n’est pas un SDF, mais il passe beaucoup de temps avec eux pour les soutenir moralement et les aider au quotidien.
Chaque jour, le groupe de SDF reçoit de la nourriture. Il peut s’agir de plats déjà préparés ou d’aliments. « Nous recevons de la farine, du riz ou des boîtes de conserve. Certaines personnes préparent à manger et nous l’apportent », précise Mohammad. Certains jours, ils se mettent littéralement au fourneau. « Hier (dimanche 10 mai 2020), par exemple, j’ai fait des faratas », lance Richard, qui est en quelque sorte le chef cuisinier. « Là, je coupe du bois pour préparer le foyer. Tous les jours, c’est moi qui m’en charge et qui cuisine. C’est du bois que des gens jettent et que nous récupérons. Je prends des précautions pour ne pas mettre le feu », souligne Richard.
Lors de notre reportage, il y avait du curry poulet, du riz et des grains secs au menu. Les cinq sans-abri accueillent chaque jour chaleureusement d’autres sans-abris de Mahébourg. En effet, hors de question de manger à sa faim pendant que d’autres dorment le ventre vide. Tous les jours, plusieurs SDF du village viennent ainsi prendre un repas chaud dans cette cantine improvisée. « Eux non plus n’ont pas de logement et dorment dehors. Nous les avons toujours connus comme sans-abri. Ils sont entre quatre et cinq. L’après-midi, entre 16 et 17 heures, ils viennent prendre leurs repas puis repartent. Ils passent la nuit derrière la foire ou à la gare routière », indique Mohammad.
Si la vie était déjà difficile pour ces sans-abri en temps normal, c’est encore pire pendant la période de confinement. « Avant le confinement, nous pouvions nous débrouiller pour gagner un peu d’argent à la foire. Mais là, nous ne pouvons rien faire. Nous recevons des dons presque tous les jours », commente Richard. « Nous passons plus de temps ici. La police passe et nous contrôle. Les agents nous disent de ne pas nous déplacer. Nous évitons de nous déplacer à cause de la maladie (Covid-19), sauf s’il nous manque quelque chose », ajoute Mohammad.
Parmi les bons samaritains qui viennent en aide aux cinq SDF de la foire, il y a un groupe d’habitants de Mahébourg qui s’est organisé pour distribuer chaque jour des colis alimentaires aux plus démunis du village. Ils font la tournée de Mahébourg pour offrir des cartons remplis de produits alimentaires de base. « Nous nous sommes organisés pour aider les gens qui ne peuvent rien acheter pendant le confinement. Il y a beaucoup de personnes qui les aident. Chaque jour, nous collectons des dons. Nous préparons aussi des repas chauds que nous distribuons certains jours. Nous donnons également des produits de base comme du lait, du beurre et du pain chaque jour. En un mois, nous avons aidé à peu près 400 personnes. Notre objectif est d’en aider encore 200, nous avons une liste de personnes dans le besoin. Nous lançons un appel aux Mahébourgeois mais aussi aux habitants d’autres endroits de contribuer à aider les plus démunis, notamment pendant le confinement », affirme Ravi Leelachand, membre de ce groupe d’habitants.
Mohammad, Richard et leurs compagnons espèrent un jour rebondir et sortir de la rue. En attendant, leur cantine de fortune reste un moyen pour eux et les autres SDF de l’endroit de se nourrir et d’être solidaires. Ils partagent bien plus que les mêmes difficultés.
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