La crise politique à Madagascar s'est encore aggravée mardi, à deux jours du premier tour de la présidentielle, le collectif qui rassemble dix candidats de l'opposition appelant unanimement les Malgaches à ne pas se rendre aux urnes.
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"Nous refusons l'élection de jeudi et nous appelons tous les Malgaches à considérer que cette élection n'existe pas", a déclaré au nom du collectif le candidat et opposant Hajo Andrianainarivelo, 56 ans, devant la presse dans la capitale Antananarivo.
"Nous faisons appel à tous à ne pas voter", a martelé l'opposant et candidat Roland Ratsiraka, 57 ans, dénonçant une "supercherie".
Depuis début octobre, les manifestations et marches pacifiques à l'appel du collectif se sont multipliées. Et les tensions sont récemment montées d'un cran.
Régulièrement dispersés au gaz lacrymogène, les manifestants ont répliqué samedi avec des engins artisanaux, ont constaté des journalistes de l'AFP. Plusieurs personnes ont été blessées au cours des dernières semaines et des opposants brièvement arrêtés.
"Nous avons toujours fait l'objet de répression, purement et simplement, à travers l'utilisation de lacrymogènes", a dénoncé l'ancien président malgache et membre du collectif, Hery Rajaonarimampianina, 65 ans.
"Nous voulons une élection", a expliqué M. Andrianainarivelo mais "nous continuerons les manifestations jusqu'à ce qu'il y ait une élection acceptée par tous".
Treize candidats sont en lice, dont le président sortant Andry Rajoelina, 49 ans. Les dix membres du collectif ont refusé de faire campagne pendant que le candidat du pouvoir, qui dit compter sur une victoire dès le premier tour, a rallié ces dernières semaines des milliers de soutiens aux quatre coins du pays où il s'est rendu en hélicoptère ou en avion privé.
Un opposant initialement membre du collectif, Siteny Randrianasoloniaiko, a fait cavalier seul et décidé de sillonner le pays pour recueillir des voix. Un autre est resté discret et n'a jusqu'ici pas pris position.
- Hantise de l'instabilité -
Le gouvernement de Rajoelina a plusieurs fois condamné une "volonté de renverser le pouvoir", accusant l'opposition de "menacer la stabilité du pays". La hantise d'une nouvelle période de transition plongeant le pays dans l'instabilité est sur toutes les lèvres, dans un camp comme dans l'autre.
Indépendante de la France en 1960, l'ancienne colonie, qui compte parmi les pays les pauvres au monde, a rarement connu une élection qui ne soit précédée d'une transition militaire ou suivie de contestations.
Cette fois, c'est la question de la double nationalité de Rajoelina qui a mis le feu aux poudres. En juin, la presse a révélé que le chef d'Etat sortant avait discrètement acquis la nationalité française en 2014.
Selon l'opposition, Andry Rajoelina a de ce fait perdu sa nationalité malgache: il ne peut donc selon elle plus gouverner ni être éligible à un second mandat. La justice à toutefois rejeté en bloc les recours réclamant que sa candidature soit invalidée.
Un autre élément déclencheur a été la désignation à la tête du gouvernement par intérim, censé assurer les affaires courantes en période électorale, du Premier ministre et proche de Rajoelina, Christian Ntsay. Le président du Sénat, qui devait assurer ces fonctions selon la Constitution, a été écarté dans des circonstances floues.
Le collectif d'opposants, qui dénonce "un coup d'Etat institutionnel" et condamne une justice ainsi qu'une commission électorale "à la botte du pouvoir", demande une suspension du processus électoral et l'intervention de la communauté internationale.
La présidente de l'Assemblée nationale, à la tête d'une médiation pour tenter de sortir de la crise, a soutenu la semaine dernière l'idée d'une suspension.
Les opposants dénoncent aussi des irrégularités dans l'organisation du scrutin. Selon eux, certains électeurs n'ont pas été inscrits tandis que d'autres figurent à plusieurs reprises sur les listes. Ils évoquent l'existence de "milliers de bureaux de vote fictifs".
Le scrutin, initialement prévu le 9 novembre, avait été reporté d'une semaine le mois dernier à la suite de la blessure d'un candidat lors d'une manifestation. Les Etats-Unis et l'Union européenne ont exprimé leur "préoccupation" et dénoncé un usage disproportionné de la force contre l'opposition.
© Agence France-Presse
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