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Lotel Dite : la pénurie de thé infuse le doute chez les gérants

La préparation du précieux breuvage dans la cuisine de l’hôtel Providence. La préparation du précieux breuvage dans la cuisine de l’hôtel Providence.

Le Mauricien aime boire son thé. Il le boit chez lui et souvent dans un « lotel dite ». Cette habitude est menacée par l’actuelle pénurie de ce breuvage. Récit.

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Qu’adviendrait-il si le thé venait à manquer ? Les gérants des commerces communément appelés « lotel dite » craignent de ne plus pouvoir satisfaire leur nombreuse clientèle. Les trois plus célèbres à Maurice sont Bismillah, Providence et Pakistan. Depuis au moins un demi-siècle, les citadins y viennent prendre une tasse de thé et manger du pain accompagné de beurre et de gâteaux piments, ou d’un morceau de pudding de maïs.

Comment font ces établissements avec ce début de pénurie de thé ? « Pour le moment, nous nous débrouillons avec les petits logements de 125 g., mais ce n’est pas suffisant et le thé va finir par manquer », répond Mamade Hossen, qui remplace ce jour-là son frère à la caisse de Bismillah. Le jeune homme évoque un autre problème : « Le thé disponible actuellement a un parfum de vanille et tous les clients n’apprécient pas ce parfum.  Vous savez, chaque client a ses habitudes. Certains aiment un “p’tit rouge”, par exemple ». Mamade Hossen s’interroge sur les raisons de cette pénurie : « Sommes-nous en train de réserver tout notre thé pour l’exportation ? »

On ne déroge pas à la pause thé quotidienne, comme ici, chez Pakistan.

Chez Pakistan, la gérante, Mme Gaffoor, nous explique que la situation commence à devenir difficile. « Le rationnement nous coûte plus cher. Combien de temps cela va-t-il durer ? Les tea bags ne sont pas la solution », déclare-t-elle. Dans son établissement, le thé est servi de 8 heures du matin à 1 heure du matin le jour suivant.

L’autre « lotel dite » très fréquenté de Port-Louis est Providence. Le gérant, Oomar, 59 ans, compte plus de trente ans dans le domaine. Il avoue que c’est la première fois qu’il entend parler d’une pénurie de thé à Maurice. « La majorité des clients qui viennent à Providence ne partiront pas avant d’avoir pris une tasse de thé. Le thé est l’élément qui assure notre survie. Si demain, nous ne parvenions plus à proposer de thé à nos clients, c’est notre survie même qui serait menacée », nous confie-t-il.

Le plus vieil établissement

L’hôtel Mohun, à la rue Royale, serait le plus ancien « lotel dite » de Port-Louis, selon la gérante Mme Mohun. « Le commerce appartenait à mon grand-père. Mon père lui a succédé après sa disparition, puis mes oncles ont pris la barre. Maintenant, c’est moi. Des générations de clients sont venues pendre leur tasse de thé ici et ils sont fidèles », nous explique-t-elle. Et comment fait-elle pour s’approvisionner en thé face au rationnement actuel ?

« Dans les grandes surfaces, on ne vend qu’un sachet par personne. Alors, il faut se débrouiller pour que différentes personnes aillent acheter le thé avant de le rapporter ici. Des fois, quand cela manque, je puise de ma réserve personnelle », explique-t-elle.

Pendant notre conversation, deux clients prennent leur thé. Nous entamons la conversation avec eux. « Sauf un  empêchement majeur, je viens ici tous les jours pour boire une tasse de thé. C’est devenu une habitude, je ne peux m’en passer », témoigne José, la cinquantaine. Il ajoute qu’il vient souvent en famille.

Yasin, 39 ans, avoue être un irréductible. Il peut venir plusieurs fois par jour pour déguster sa boisson préférée. Qu’est-ce qui se passerait si, demain, on n’y servait plus de thé ? Prendrait-il du café ? « Je ne sais pas. Ce qui est sûr, c’est que j’aime boire du thé », répond-il avec un sourire.

Il y a fort à parier que ces témoignages des gérants d’hôtel comme ceux des clients habituels de ces établissements très fréquentés de Port-Louis sont le reflet de la situation dans les autres hôtels de thé de Maurice, car le thé est un breuvage apprécié de la majorité des Mauriciens.

 

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