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L’immigration et ses conséquences : l’Italie et la «dolce vita» à portée des Mauriciens

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L’Italie est à la recherche de travailleurs étrangers en provenance de divers pays, dont Maurice, pour remplir quelques 82 705 emplois dans certains secteurs d’activités. Une annonce qui fait rêver un grand nombre de nos compatriotes. Entre trouver un travail ou étudier, quelles sont les raisons qui poussent les Mauriciens à choisir l’Italie ? Le point dans ce dossier.

Les raisons pour aller vivre en Italie sont nombreuses : son climat paradisiaque, sa population sympathique, son accueil envers les migrants, ses villages, ses sites historiques, ses opportunités de travail, ses prestigieuses universités, sa culture et sa gastronomie, entre autres. 

D'autres Mauriciens attendent que les compagnies de recrutement italiennes se manifestent pour postuler et enclencher les démarches. Outre l’Italie, le Canada ouvre aussi ses portes aux Mauriciens, non seulement pour les études, mais aussi dans le domaine professionnel. Mais quels sont les risques de voir des étudiants et des professionnels talentueux quitter le pays ? Nous avons posé la question à l’économiste Takesh Luckho.

Arvina Limbeea : « Dehor, pli fasil parski ena plis oportinite »

Arvina.Âgée de 28 ans, Arvina Limbeea a vu le jour en Catane, Italie. Cette mère de deux enfants habite à Mahébourg et travaille comme garde-malade. Elle avoue être habitée par le désir de retourner vivre dans son pays natal. Ses parents l’ont quitté à Maurice, son frère et elle, alors qu’elle n’avait que six ans. « Zot inn kit nou ek enn fami. Ban-la inn desede. Mo pena person isi, apar fami mo misie. Mo mem pas kone si mo papa ek mo mama enkor vivan. Si mo ressi gagn enn oportinite al travay ek viv laba, mo pou fer demars », confie-t-elle. 

Elle a été très heureuse d’apprendre que son pays natal ouvrait ses portes aux Mauriciens. Même si elle a arrêté ses études en Grade 8, elle se dit prête à effectuer « un petit boulot » pour retourner en Italie. Pourquoi quitter Maurice ? « Ici, nou bisin fer sakrifis buku mai nou pa evolye. Dehor, pli fasil parski ena plis oportinite », conclut-elle.


Kushal S. : « À Maurice, pour concrétiser nos projets de vie, on est obligé de s’endetter »

 Âgé de 36 ans, Kushal S. est responsable d’un garage automobile. Fort de 16 années d’expérience en mécanique, il est prêt à tenter sa chance en Italie pour plusieurs raisons. Il est persuadé de gagner mieux sa vie là-bas, contrairement à Maurice. « Ici, la vie devient de plus en plus chère. On travaille dur, mais on stagne. Pour concrétiser nos projets de vie, on est obligé de s’endetter et ensuite, on passe  notre vie à régler notre emprunt », confie le trentenaire. 

Certes, Kushal S. a cravaché pour se construire une maison, mais, aujourd’hui, il est persuadé d’offrir un meilleur confort de vie à sa famille en Italie. Il pense surtout à ses enfants qui pourront étudier dans un meilleur système éducatif. C’est en toute franchise qu’il dit ne plus croire au système éducatif mauricien. 


Sudharshinee Seesurn veut s’envoler en Italie 

Sudharshinee15 jours de vacances ont suffi à Sudharshinee Seesurn, 38 ans, pour tomber amoureuse du mode de vie en Italie. Depuis, elle chérit le rêve d’immigrer à La Botte pour gagner mieux sa vie. Cette habitante de Mahébourg, mère d’un enfant, se dit très intéressée par les possibilités d’emplois en Italie, surtout dans le domaine touristique. 

Avec son expérience dans le secteur de l’aviation et ses qualifications dans la gestion des affaires, elle est prête à mettre le cap sur l’Italie pour avoir une meilleure vie. À Maurice, elle peine à évoluer et progresser dans la vie. 

 

 


Yassir Rackloo : « Isi, pa capav fer progre »

Yassir RacklooYassir Rackloo est un habitant de la Tour Koenig de 31 ans. Il travaille dans la réparation et l’installation des climatiseurs. L’an dernier, il a passé des vacances en Italie et il a été séduit par ce pays. « Depuis que j’ai appris que l’Italie recrute des travailleurs mauriciens, je recherche des informations sur les démarches à entreprendre pour immigrer là-bas », avoue-t-il. Certes, il n’est pas allé plus loin que la Grade 11, mais il est prêt à tout pour s’installer légalement en Italie. 

Le trentenaire a aussi fait des démarches pour immigrer au Canada. S’il souhaite quitter Maurice, c’est parce qu’ici on ne progresse pas. « Isi, pa capav fer progre. Ena buku plis oportinite ayeur », indique notre interlocuteur. Selon lui, en Italie, il pourrait mieux gagner sa vie, ce qui va le permettre d’offrir une meilleure qualité de vie à sa future femme. 


Questions à Dr Takesh Luckho, économiste : « Les conséquences de l’exode des cerveaux sont multiples »

Takesh Luckho.Quels sont les pays qui ont la cote ?
Avec l’ouverture des frontières, de plus en plus d’étudiants décident de poursuivre leurs études à l’étranger. De plus, de nombreuses personnes veulent s’installer dans d’autres pays, notamment le Canada, l’Australie et l’Italie. Ce sont les destinations les plus prisées actuellement par les Mauriciens.

Pourquoi le Canada ?
Le Canada est plébiscité à cause des divers avantages offerts par le pays aux étudiants. Parmi, l’octroi des bourses d’études pour les permettre de financer leur formation.  De plus,  ils ont aussi le droit de travailler pendant leurs études, avec la possibilité d’obtenir un permis de travail après avoir décroché leurs diplômes.

Quid de l’Italie ?
L’Italie est également une destination qui est en forte demande par les étudiants mauriciens. Un engouement sûrement dû au fait que les démarches pour l’obtention du visa ont été simplifiées. À titre d’exemple, un étudiant étranger peut entrer en Italie avec un visa de type C  (visa de court séjour ne dépassant pas les 90 jours) s’il respecte tous les critères nécessaires pour obtenir ce document. 

Ensuite, l’Italie offre un meilleur confort de vie, avec une richesse culturelle et artistique, sans oublier des villes symboliques et les vestiges de l’architecture ancestrale, entre autres. De plus, le coût de la vie est moins élevé en comparaison aux autres pays d’Europe.  Les opportunités professionnelles sont nombreuses à l’étranger, alors qu’à Maurice, les jeunes ont l’impression qu’elles sont limitées ou encore qu’il faut être pistonné pour décrocher un emploi dans le secteur public ou même dans certaines entreprises privées. 

L’herbe est-elle vraiment plus verte ailleurs ?
Il est vrai que c’est une idée tenace dans la tête de nombreuses personnes, mais très souvent, une fois à l’étranger, la réalité est tout autre. Il arrive que ceux qui ont tenté leur chance ailleurs soient déçus et n’arrivent pas à s’adapter à une autre culture, ce qui peut aboutir à un certain isolement. 

Pour moi, il n’y a pas de bon ou de mauvais choix. Il y a des Mauriciens qui ont réussi leur vie et leur carrière à l’étranger, tandis que d’autres sont retournés à leur pays natal. Il est fréquent de s’apercevoir de la beauté de notre île une fois à l’étranger. 

Quelle est la conséquence de l’exode des cerveaux ?
Les conséquences sont multiples, tant économiques que sociales. Quand les jeunes quittent le pays pour travailler dans des sociétés de renom en Europe ou sur des bateaux de croisière, Maurice fait face à une pénurie de main-d’œuvre qualifiée dans ses secteurs clés de l’économie. Ainsi, les employeurs sont dans l’obligation de recourir aux travailleurs étrangers, au détriment de la qualité du service à la mauricienne. 

Comment retenir les Mauriciens au pays ?
Il n’y a pas de solution miracle pour retenir les étudiants et autres professionnels qui préfèrent construire leur avenir ailleurs. Cependant, à mon avis, c’est le devoir des autorités de créer un meilleur environnement pour mettre un frein à cet exode des cerveaux en promouvant la méritocratie et l’équité dans le recrutement, afin de baisser la perception de la corruption à Maurice. Il faut aussi un meilleur régime fiscal pour les professionnels.

Recrutement des étudiants

Recrutement des étudiants - Seshadri Jayasankar, directeur de Campus Abroad : « Le gouvernement pourrait envisager des incitations fiscales pour les étudiants qui reviennent »

Seshadri JayasankarCampus Abroad Mauritius Ltd a été créé en 2001 afin d'aider les jeunes mauriciens à réaliser leur rêve, celle d’étudier à l'étranger.  Cette compagnie travaille en collaboration avec des associations officielles d’une centaine d’universités et d’institutions internationales. Elle est également enregistrée auprès de l'UCAS pour les admissions dans les universités britanniques.  Campus Abroad Mauritius Ltd est aussi licencié par le ministère de l'Éducation à Maurice.

« Nous avons une équipe de conseillers. Ils sont toujours disponibles pour guider et conseiller les étudiants. Des informations sur les possibilités de bourses d'études, les procédures de visa, l'hébergement et le voyage sont également fournies en plus des modalités de demande », indique Seshadri Jayasankar, le directeur de Campus Abroad. 

Concernant l’Italie, il dit avoir reçu quelques demandes principalement pour des cours de design. « Malheureusement, nous ne travaillons avec aucune université italienne. Le problème est que la plupart d'entre elles enseignent en italien. Par conséquent, les étudiants doivent apprendre la langue avant de s’inscrire. Toutefois, nous serions ravis de collaborer avec toute université italienne proposant des cours en anglais », fait-il ressortir.

Selon lui, si les jeunes choisissent d’entamer des études universitaires à l’étranger, c’est parce que les cours ne sont pas offerts à Maurice. De surcroit, ils souhaitent acquérir une expérience d'études dans une destination étrangère. « Ils veulent s'installer dans un pays et pensent que le parcours d'études mène à la résidence permanente. Étudier à l’étranger  implique un certain degré de sacrifice et de travail », indique Seshadri Jayasankar. Ce dernier, toutefois, fait remarquer que les Mauriciens rencontrent peu de difficultés pour s'intégrer dans les pays anglophones, vu qu’ils sont bilingues. « C’est surtout pratique pour le Canada. Pour l’exode des cerveaux dont est victime Maurice, il faut que les entreprises locales offrent des salaires compétitifs et des allocations pour inciter les étudiants à revenir. Si un jeune dépense Rs 4 millions, voire plus pour une licence et se voit offrir un salaire de base faible, il ne sera pas encouragé à revenir. Le gouvernement pourrait envisager des incitations fiscales pour les étudiants qui reviennent », conclut-il.


Études à l’étranger - Prof. Mari Jansen Van Rensburg : « Maurice est un marché cible attrayant pour le recrutement international »

Mari Jansen Van Rensburg

La Professeure Mari Jansen Van Rensburg est le Campus Director du Middlesex University Mauritius. Selon le dernier rapport de la Mauritius Higher Education Commission, 6 909 étudiants mauriciens ont choisi d’étudier à l'étranger en 2022. Un chiffre qui est en baisse depuis 2015 où 11 099 étudiants mauriciens sont partis à l'étranger. Les destinations plébiscitées sont l’Australie, la France, le Canada et le Royaume-Uni. Les domaines d'études préférés sont l'ingénierie et la médecine. Les raisons d’étudier à l’étranger sont multiples, notamment les filières qui ne sont pas disponibles à Maurice et les programmes internationaux  de bourses.  

Selon notre interlocutrice, Maurice est un marché cible attrayant pour le recrutement international, car les étudiants sont tenus en haute estime et aussi parce qu’ils sont bilingues. De leur côté, les  jeunes sont attirées par les destinations internationales en raison des perspectives de carrière, d'immigration ou des liens familiaux établis. Ils considèrent qu’étudier à l'étranger est comme une aventure qui les oblige à sortir de leur zone de confort et devenir plus indépendants. Ils peuvent aussi découvrir une culture différente.

Mari Jansen Van Rensburg conseille aux jeunes de bien réfléchir avant de se lancer dans l’aventure. « Il faut se poser plusieurs questions. Pourra-t-il vivre de manière indépendante ? À quelle fréquence pourra-t-il retourner dans son pays natal ? Quelles sont les considérations budgétaires ? Que faire en cas d'urgence médicale ? », fait-elle ressortir.  

Notre interlocutrice indique qu’il est aussi bien d’étudier à Maurice qui offre aussi un large éventail de prestataires de services éducatifs, dont de prestigieux campus internationaux. « Au niveau local, les étudiants mauriciens bénéficient d'un enseignement gratuit dispensé par les universités publiques. Ils ont également la possibilité d'étudier dans des universités internationales de premier plan. D’ailleurs, le pays attire également les étudiants d’ailleurs. Ces derniers choisissent Maurice en raison de la proximité du pays, du mode de vie insulaire, des possibilités de travailler à temps partiel et du rapport qualité-prix global », indique-t-elle. De plus, le nouveau visa offre la possibilité aux jeunes professionnels de travailler à Maurice. 

La Professeure Mari Jansen Van Rensburg évoque aussi les risques de voir les étudiants mauriciens de quitter à tout jamais leur pays natal. « L'expérience internationale est toujours un avantage, car elle ouvre les esprits à de nouvelles possibilités et pratiques. Il faut donc attirer les talents du monde entier pour qu'ils contribuent au développement de Maurice. Les diplômés mauriciens reviendront s'ils peuvent envisager un avenir pour eux et leur famille sur place », indique-t-elle. 

Il faudrait proposer les mêmes avantages à ceux qui choisissent d'étudier à Maurice.
Il faudrait proposer les mêmes avantages à ceux qui choisissent d'étudier à Maurice.

Selon elle, il faudrait proposer les mêmes avantages à ceux qui choisissent d'étudier à Maurice. « Faire partie d'une communauté internationale d'étudiants permet également d'établir des réseaux intercontinentaux qui peuvent profiter au pays. Tous peuvent potentiellement créer une conscience internationale pour Maurice, en tant que destination touristique et d'affaires », conclut-elle. 

À noter que Middlesex University Mauritius est l'un des trois campus de Middlesex University situé à Londres. Les étudiants, qui reçoivent un diplôme britannique, bénéficient d’un enseignement de qualité, d'une excellente expérience sur le campus et de la mobilité internationale. L’institut propose une vaste panoplie de cours, tant au niveau du premier cycle que du troisième cycle. Les cours répondent aux exigences du marché de travail.

 

 

 

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