Liens bilatéraux : 24 heures pour renforcer un partenariat stratégique

Emmanuel Macron effectue une visite officielle de 24 heures à Maurice, la première d’un président français depuis 1993, pour consolider les relations bilatérales, signer cinq déclarations d’intention et promouvoir des projets dans les secteurs de l’énergie et de l’eau notamment.

Dans un calendrier diplomatique chargé, le président français Emmanuel Macron pose le pied sur le sol mauricien ce jeudi 20 novembre pour une visite officielle de 24 heures, la première d’un chef d’État français depuis celle de François Mitterrand en 1993. Ce déplacement, condensé en un programme méticuleusement orchestré, vise à consolider les liens bilatéraux à travers des échanges politiques, économiques et la signature de cinq déclarations d’intention dans des secteurs pivots : l’économie bleue, les énergies renouvelables, la gestion de l’eau, la transition énergétique et l’éducation bilingue.

Le président français atterrit vers 12 h 30 à l’aéroport Sir Seewoosagur Ramgoolam, marquant ainsi un jalon dans les relations franco-mauriciennes, forgées depuis l’indépendance en 1968. Cette visite intervient dans un contexte où Maurice affronte des défis climatiques croissants – élévation du niveau de la mer, vulnérabilité hydrique et dépendance aux énergies fossiles importées – tout en visant une ambition de développement durable. 

Du côté français, Paris réaffirme son engagement dans la région Indo-Pacifique, où Maurice peut jouer un rôle de hub régional pour la coopération océanique et la résilience climatique. Les accords à signer, soutenus par l’Agence française de développement (AFD) et l’Union européenne (UE), totalisent un engagement financier de 350 millions d’euros, principalement alloué à l’eau et à l’énergie, illustrant une approche pragmatique et ciblée.

Un programme au pas de charge

L’avion présidentiel, un Airbus de la flotte française, est attendu à Plaisance pour une cérémonie d’accueil présidée par le Premier ministre Navin Ramgoolam, aux côtés du Premier ministre adjoint Paul Bérenger, de la Speaker Shirin Aumeeruddy Cziffra et du ministre des Affaires étrangères Ritish Ramful. D’autres figures protocolaires compléteront l’escorte. Immédiatement après, Emmanuel Macron se rendra à la State House pour une visite de courtoisie au président de la République, Dharam Gokhool, au Château de Réduit.

L’après-midi s’annonce particulièrement intense, reflétant la brièveté du séjour. En fin d’après-midi, à 17 h 30, un entretien en tête-à-tête avec Navin Ramgoolam au Bâtiment du Trésor, à Port-Louis, où les discussions porteront sur les priorités bilatérales. Avant cela, le président français participera à un événement organisé conjointement par l’Economic Development Board (EDB) et l’ambassade de France, au Caudan Arts Centre. Cet échange avec des opérateurs économiques mauriciens et français mettra l’accent sur l’intelligence artificielle (IA). La signature d’un protocole d’accord avec une entreprise privée est prévue, sans détails supplémentaires divulgués.

Le programme intègre également une dimension environnementale et maritime. À la marina du Caudan Waterfront, Emmanuel Macron visitera deux navires : le Plastic Odyssey, une expédition dédiée à la lutte contre la pollution plastique en mer, et le Champlain, un navire de la marine française. 

À 18 heures, le président français prendra part à une session de travail à l’Assemblée nationale, suivie d’une déclaration conjointe à la presse aux côtés de Navin Ramgoolam, au Sir Harilal Vaghjee Hall. Cette intervention publique permettra d’exposer les avancées bilatérales. La journée s’achèvera par un banquet d’État dans le nord de l’île, vers 20 h 30, offrant un moment de convivialité protocolaire. Le président logera dans un hôtel du littoral nord.

Vendredi : signatures décisives

Le vendredi 21 novembre, avant un départ matinal, Emmanuel Macron bouclera son programme par des gestes symboliques et opérationnels. Il déposera une gerbe de fleurs et plantera un arbre au Jardin botanique de Pamplemousses, classé au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 2007 pour sa collection d’espèces endémiques. Un rituel courant dans les visites d’État.

La matinée sera consacrée à la signature des cinq déclarations d’intention. Une première portera sur l’économie bleue, conclue entre le ministère de l’Agro-industrie, de la Sécurité alimentaire, de l’Économie bleue et de la Pêche, et l’Institut de recherche pour le développement (IRD), établissement public français. Ce texte prévoit une collaboration sur des campagnes en mer, la biologie marine et les biotechnologies, la génomique marine appliquée à l’aquaculture, la pharmacie et les produits dérivés de la mer, ainsi que la détection de la pêche illégale.

Un deuxième accord, tripartite, instaure le Fonds d’expertise technique et d’échanges d’expériences (FEXTE) entre Maurice, l’AFD et Électricité de France (EDF). Il vise à intensifier les échanges d’expertise pour l’intégration des énergies renouvelables dans le réseau électrique mauricien, soutenant l’objectif national de 60 % de production renouvelable d’ici 2035. 

La troisième déclaration cible la gestion durable de l’eau, signée avec l’AFD et l’UE. Elle appuie un programme d’investissements axé sur la modernisation des infrastructures, le renforcement de la gouvernance hydrique et une gestion intégrant les dimensions sociales, environnementales et de genre.

La quatrième déclaration accompagne la transition énergétique, négociée avec l’AFD et l’UE, en établissant un cadre pour accélérer la production renouvelable, son intégration au réseau et l’efficacité énergétique. 

Enfin, une cinquième déclaration, financée par le ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères, porte sur le développement d’un enseignement bilingue francophone. Elle prépare un projet pilote pour l’éducation bilingue et plurilingue, aligné sur la politique linguistique mauricienne, où le français coexiste avec l’anglais et les langues créoles.

350 millions d’euros pour l’eau et l’énergie

Les accords s’accompagnent d’un soutien financier substantiel, totalisant 350 millions d’euros, canalisé via l’AFD et l’UE. Dans la gestion de l’eau, un prêt de l’AFD de 200 millions d’euros (équivalent à Rs 10,6 milliards au taux de change actuel) appuiera la réforme nationale. Une subvention de l’UE de 2 millions d’euros est déjà engagée, tandis qu’un programme d’investissement de 120 millions d’euros est en préparation : 100 millions de l’AFD et 20 millions de l’UE, pour moderniser les infrastructures.

La transition énergétique bénéficie d’un programme technique de 700 000 euros, d’un prêt AFD de 40 millions d’euros (Rs 2,1 milliards) et d’une subvention de l’UE de 10 millions d’euros (Rs 530 millions). Ces fonds soutiendront la modernisation du réseau électrique par EDF Réunion, dès décembre, incluant la numérisation du Central Electricity Board et l’anticipation des risques climatiques extrêmes. 

Des lignes de crédit vert via la SBM et MauBank, ainsi que des financements de Proparco pour les producteurs indépendants d’énergie, accéléreront les investissements privés : plus de Rs 30 milliards (environ 640 millions d’euros) pour 376 mégawatts de nouvelles capacités solaires et de biomasse d’ici 2028.