Liaison maritime : le Mauritius Trochetia hors service pour une durée indéterminée

Le navire clé reliant Maurice, Rodrigues et Agaléga est actuellement hors service après des dommages importants lors de son dernier voyage. Des expertises en cours suscitent de nombreuses questions sur son état et sa capacité à reprendre la mer.

Le Mauritius Trochetia, navire assurant la liaison maritime entre Maurice, Rodrigues et Agaléga, est actuellement hors service en raison de dommages subis lors de son dernier voyage. L’étendue des réparations nécessaires ainsi que la durée de l’immobilisation restent, pour l’heure, inconnues.

Propriété de la Mauritius Shipping Corporation (MSC), une entreprise d’État, le Mauritius Trochetia a été endommagé le 2 février dernier alors qu’il accostait à Agaléga. « Ce n’est certainement pas un bateau neuf », a déclaré Arvin Boolell, ministre de l’Agro-industrie, de la sécurité alimentaire, de l’économie bleue et de la pêche, sous la tutelle duquel opère la MSC. « Avec le mauvais temps à Agaléga, le bateau a heurté le quai et a eu des problèmes. Pour le moment, le navire n’est pas sea-worthy », a-t-il précisé.

Le ministère du Shipping a confirmé que le Mauritius Trochetia a obtenu l’autorisation de la firme Veritas, spécialisée dans les essais, inspections et certifications, pour effectuer son retour à Maurice. À son arrivée, une inspection a été menée par un « surveyor » de Veritas, accompagné de techniciens de la MSC et d’un officier du ministère du Shipping. La compagnie Chantier Naval de l’Océan Indien (CNOI) a également envoyé un expert pour évaluer les dommages et déterminer les réparations nécessaires. Un « underwater survey » est prévu en ce début de semaine afin d’inspecter la coque du navire.

« Pour le moment, le bateau est hors service. On ne prendra pas de risques. Tant qu’il n’aura pas les certificats nécessaires de Veritas, le Mauritius Trochetia ne prendra pas la mer », indique un responsable du ministère du Shipping.

La situation du Mauritius Trochetia relance les interrogations sur son état général et sa capacité à poursuivre ses opérations. Le navire, mis en service il y a 25 ans, avait subi des travaux de rénovation en 2024 au Sri Lanka, avant son retour en décembre. Cependant, Alain Malherbe, expert maritime, souligne que son état laisse à désirer. « Il faut faire un examen de fitness de la coque », affirme-t-il. « Le navire a coûté des millions à l’État pour être remis à neuf au Sri Lanka, mais à son retour, il n’était pas dans un bon état. Pour qu’une coque se déchire ainsi, il faut qu’elle soit déjà amoindrie. »

L’expert s’interroge également sur la gestion du navire et l’absence d’un plan de remplacement : « Le Mauritius Trochetia, emblème du commerce maritime mauricien, montre des signes évidents de négligence et d’un manque d’entretien flagrant. Son accident à Agaléga pose question : comment un navire récemment rénové a-t-il pu subir de tels dommages ? L’absence de transparence sur les dépenses engagées renforce les doutes quant à sa gestion. »

L’analyse des certificats du Mauritius Trochetia met en lumière plusieurs éléments préoccupants quant à son état et sa capacité à poursuivre ses opérations, selon Alain Malherbe. Ce dernier souligne que le « Class Certificate » (seaworthiness), qui atteste de la navigabilité du navire, arrivera à expiration le 6 juin 2025. Toutefois, le certificat actuellement en vigueur, délivré au Sri Lanka le 7 décembre 2024, n’est que provisoire, soulevant des interrogations sur l’état réel du bateau.

Par ailleurs, le SOLAS Passenger Ship Safety Certificate, garantissant la sécurité du transport de passagers, reste valide jusqu’au 22 février 2025. Or, le certificat en cours, émis à Port-Louis le 8 février 2025, est conditionnel, indiquant la présence potentielle de non-conformités majeures.

Enfin, le SOLAS Dangerous Goods Certificate, permettant le transport de marchandises dangereuses telles que le carburant, expirera le 6 mai 2025. Passé cette date, le navire ne sera plus autorisé à assurer ce type de transport. De plus, le certificat en cours, émis au Sri Lanka, est intérimaire, ajoutant un élément d’incertitude supplémentaire quant à la fiabilité du Mauritius Trochetia.