Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour celui qu’on aime. Vingt-cinq ans de cela, Jeff Steeve Bonne, connu pour sa chanson Zoli (élue disque de l’année en 2019 sur Radio Plus), a eu la chance d’avoir une seconde vie. Et ce, grâce à la femme qui l’a adopté. Son histoire, il la raconte volontiers à qui veut bien l’entendre. Celle qu’il estime comme sa vraie mère est aujourd’hui malade. Et c’est à travers la musique que Jeff a choisi de lui dire merci.
Aimer jusqu’à tout donner. C’est ainsi que l’artiste décrit sa vie, soit ses années passées auprès de sa famille, surtout de sa mère adoptive Rose qui soufflera bientôt ses 80 bougies. Cette mère de trois enfants a fait une place dans sa vie, mais surtout dans son coeur, pour accueillir un petit bonhomme nommé Jeff il y a 25 ans.
À cette époque, la mère biologique de Jeff avait connu un triste concours de circonstances, explique le jeune homme. « J’ai appris qu’elle s’était rendue à l’étranger, soit dans un pays arabe, pour y travailler. C’est là-bas qu’elle a connu mon père qui était un haut gradé. Quand ce dernier a appris que ma mère est enceinte, il a essayé de lui faire avorter. Comme cela n’a pu être fait, il l’a immédiatement déportée. » Une fois de retour à Maurice, sa mère biologique a été réprimandée par tous les membres de la famille. « Ma grand-mère lui a demandé d’avorter une nouvelle fois. C’est alors que Rose a été approchée pour lui demander si elle connaissait un médecin pour le faire. »
Rose leur a dit alors que c’est l’avortement est illégal. De plus, elle leur a expliqué que ma mère peut avoir des complications de santé comme elle était à son 4ème mois de grossesse, et qu’elle risquait de mettre au monde un enfant handicapé . « C’est alors que Rose lui a demandé de garder l’enfant jusqu’à sa naissance. Elle pensait qu’elle allait changer d’avis à ma naissance. Sauf que ma mère n’a pas voulu me garder. Linn dir li donn zanfan la bwar dile pandan 3 a 4 semenn. Li ti krwar ankor enn fwa ki mo mama pou fini par aksepte mwa, me pa finn ariv nanye mem. »
C’est ainsi que Rose a décidé de prendre le bébé sous ses ailes. « Ses enfants étaient déjà grands et elle était grand-mère, cependant, elle n’a pas hésité à m’accueillir. » Jeff devient alors le chouchou de la famille, faisant parfois des jaloux, à cause de l’attention que lui accordait samaman adoptive. De ses souvenirs d’enfance, il se rappelera avoir toujours été entouré. « Il y avait la famille et je me rappelle aussi avoir eu deux nounous. D’abord Fadé, maigre avec de longs cheveux, qui s’occupait de moi, surtout quand ma maman était occupée. Puis, lorsqu’elle s’est mariée, j’ai eu une autre nounou qui s’appelait Christine. Toutes deux des femmes que ma maman avait accueillies à la maison. Sa lakaz-la ti enn lakaz ouver a tou bann dimoun an dan la penn.»
Une femme au coeur d’or
C’est l’image que Jeff retiendra toujours de cette femme qui l’a adopté, de sa maman qu’il aime plus que tout au monde. « Mo rapel kan nou ti al res Glen Park, li ti premie dimoun ki ti ena televizyon, tou dimoun ti pe vinn lakaz pou get televizyon kot nou. Apre toule tan li ti pe kwi boukou manze. Li pa ti konn kwi tigit, telma li ti pe kwi manze pou tou dimoun. »
La relation entre Rose et Jeff est spéciale. Ce dernier se rappelle que durant l’âge critique de l’adolescence, quand il se rebellait, il ne cessait de dire à Rose: « abe kifer to pa ti kit mwa ek mo mama mem ». Si bien qu’un jour, Rose lui a promis qu’à ses 18 ans il lui présenterait sa mère.
Il y a tant d’enfants qui souffrent et à qui vous pouvez offrir un bel avenir ou simplement beaucoup d’amour»
Chose promise, chose due. Rose a fait le nécessaire pour que Jeff puisse rencontrer sa mère. « Je me rappelle de ce jour. Mes nièces et d’autres membres de la famille étaient avec moi. J’avais l’impression d’être dans une émission de télé. Quand nous sommes arrivés sur place et que j’ai vu ma mère, elle a commencé à pleurer, mais je suis resté indifférent. Je n’arrivais pas à croire à ses larmes,car je lui en voulais beaucoup. Elle habitait si près de nous, dans la même localité, sans jamais se soucier de prendre de mes nouvelles. Je ne pouvais pas accepter cela de la part d’une mère, surtout que j’en avais une qui était son opposé. De plus ma grand mère biologique a avancé que j’étais là pour ‘lager dibien’ alors que j’ai déjà tout ce qu’il me faut. » Jeff ajoute que pendant les deux semaines qui ont suivi, il y a eu des appels, des petites conversations, mais plus rien par la suite. Aujourd’hui, il dit avoir tourné définitivement cette page, même s’il veut bien rester en contact avec sa demie soeur, la fille de sa mère. Car « li enn inosan ek li pa konn nanye dan tou sa la ».
Ses souffrances ont au fait fortifié le jeune homme. « Mo ti ena ban move panse, ban move zafer ti vinn dan mo latet, sirtou kan mo panse ki mo mama pann oule mwa ek ki mo pa kapav ziska zordi met enn vizaz lor mo papa. À ma naissance, ma famille l’avait contacté, mais il n’a rien voulu entendre. Aujourd’hui, je ne connais même pas son nom…»
D’un adolescent fragile, Jeff est aujourd’hui devenu un modèle d’autres jeunes. Aujourd’hui, il voudrait encourager plus de personnes à adopter. « Il y a tant d’enfants qui souffrent et à qui vous pouvez offrir un bel avenir ou simplement beaucoup d’amour. ». Cependant, il les conseille que « depuis le plus jeune âge, il faut dire à l’enfant qu’il a été adopté. Fode pa ki zanfan la aprann sa par enn lot dimoun ou ki li gagn enn sok. Ou bizin kapav dir li ki ou kontan li me ki li enn zanfan adopte ». En tout cas, c’est ainsi que Rose l’a grandi.
Aujourd’hui, cette dernière est gravement malade. Atteinte d’un cancer, elle se bat pour aller mieux. À ses côtés, ses enfants et son petit Jeff qui ne manque pas de lui rendre hommage sur les réseaux sociaux. Même si Jeff dit avoir beaucoup d’amour pour Rose, cependant il n’arrive pas à le lui dire, mais il promet de le faire, en musique, en chanson…
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