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L’état dépressif des élèves suscite des inquiétudes

Preetam Mohitram, haut cadre au ministère de l’Éducation, et le Dr Om Nath Varma, sociologue et pédagogue, étaient sur le plateau de l’émission « Au Cœur de l’Info », animée par Jane Lutchmaya et Annick Rivet.
  • 800 collégiens bénéficient d’un service d’écoute, plus de la moitié victimes de violence 
  • Comportements suicidaires : une moyenne de 57 cas signalés chaque année

La santé mentale des jeunes est au cœur des préoccupations et tous les moyens doivent être mis en œuvre pour gérer leur mal-être, prévenir le suicide et le bullying en milieu scolaire. C’est ce qu’ont fait comprendre les intervenants de l’émission « Au Cœur de l’Info », animée par Jane Lutchmaya et Annick Rivet, mercredi, sur Radio Plus. 

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« Environ 800 élèves bénéficient d’un service d’écoute, et les données montrent que 55 % d’entre eux sont victimes de violence. » C’est ce qu’a fait ressortir la Dr Émilie Rivet, docteure en psychologie clinique et Chief Operations Officer de Konekte. Elle a mis en avant l’importance du manuel récemment publié pour la gestion du comportement suicidaire en milieu scolaire. 

Une hausse de 11 % des comportements suicidaires, incluant les pensées suicidaires, les tentatives et les suicides complétés, a été observée dans 21 collèges, selon elle. Ce qui révèle « une tendance inquiétante » à l’échelle nationale, car l’enquête menée concerne que les établissements catholiques principalement.

Face à cette réalité, Dr Rivet souligne « le manque de protocole clair » pour gérer ces situations. « Lorsqu’une tentative de suicide survient, il n’existe pas de directives précises pour aborder le sujet ou identifier les comportements à risque. Pourtant, l’inaction après un suicide dans un collège multiplie par cinq le risque d’une nouvelle tentative », dit-elle, tout en insistant sur l’importance d’en parler sans tabou afin de mieux prévenir ces drames.

Mélanie Vigier La Tour-Bérenger, psychosociologue et consultante chez Konekte, a, elle, mis l’accent sur l’accompagnement psychologique. Depuis 2009, l’analyse des données recueillies dans divers collèges révèle une moyenne de 57 cas de comportements suicidaires signalés chaque année. « Le manuel conçu par Konekte vise à évaluer ces comportements et définir les actions à entreprendre », a-t-elle expliqué, rappelant que « le bullying est un acte de violence puni par la loi ». Le cyberharcèlement s’est intensifié et elle a plaidé pour une approche préventive, comprenant l’accompagnement des victimes et des entretiens avec les auteurs et les témoins. En cas de persistance du harcèlement, des sanctions sont appliquées.

Un mode d’expression

Preetam Mohitram, haut cadre au ministère de l’Éducation, a déploré que la violence soit devenue un mode d’expression courant à Maurice, sous diverses formes souvent difficiles à identifier. Il a souligné la nécessité d’apprendre aux enfants à exprimer leurs émotions et à communiquer autrement. 

Le Dr Om Nath Varma, sociologue et pédagogue, a partagé cette même préoccupation et s’est interrogé sur « la capacité des écoles et des parents à réagir efficacement ». Il estime que certaines écoles gèrent mieux ces problématiques et devraient servir de modèles. Il a appelé à « un soutien renforcé » des établissements. 

Sur la question de la discipline, Preetam Mohitram a mis en garde contre une approche trop répressive : « Répondre à la violence par la violence n’est pas une solution. Il faut favoriser le dialogue. » À l’heure où les jeunes sont happés par les réseaux sociaux, le défi est de recréer du lien social.

Mélanie Vigier La Tour-Bérenger a insisté sur le besoin d’un encadrement parental renforcé. « L’accompagnement dès la grossesse est essentiel, car on n’apprend pas à être parent spontanément », a-t-elle expliqué. Une collaboration étroite entre parents, écoles et enseignants est aussi indispensable, selon elle. 

Le Dr Om Nath Varma a, pour sa part, rappelé que les réformes n’ont d’impact que si elles mobilisent l’ensemble des acteurs scolaires. Il cite l’interdiction du téléphone portable dans certains collèges comme un exemple de succès obtenu grâce à une démarche concertée. 

Participant également à l’émission, Aneeta Ghoorah, Ombudsperson for Children, a souligné que très peu de cas de bullying sont rapportés à son bureau. Selon elle, le bureau de l’Ombudperson for Children est souvent critiqué pour se concentrer uniquement sur les droits des enfants, alors qu’il traite également de leurs devoirs et responsabilités. Elle a affirmé qu’il y a un manque de résilience chez certains jeunes, dont le comportement peut être influencé non seulement par l’école, mais aussi par l’impact des réseaux sociaux. Elle a aussi insisté sur « la nécessité d’une discipline parentale plus stricte concernant l’utilisation des portables et des réseaux sociaux ». Pour Aneeta Ghoorah, il est « essentiel de prendre en compte la voix des jeunes pour mieux comprendre leurs préoccupations et défis ».

Rishi Nursimulu, fondateur des écoles Dukesbridge, a, de son côté, souligné que « les enfants reflètent souvent le comportement des adultes ». « Le bullying, par exemple, ne surgit pas de nulle part, mais trouve ses racines dans l’environnement familial », selon lui. Pour lui, les parents doivent être conscients de leurs attitudes et comportements, car les enfants apprennent par imitation. « Certains comportements violents de parents peuvent normaliser l’agression chez les enfants, qui, ayant été témoins de violences verbale ou physique, les reproduisent à l’école » a-t-il expliqué. 

Rishi Nursimulu a fait ressortir qu’il est de la responsabilité des parents de bien éduquer leurs enfants. « À l’école, on cherche à comprendre les raisons des frustrations, mais il est difficile de changer des comportements ancrés à la maison », est-il d’avis.

 

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