Les mariés de la mer

Frédéric et Mylène Montaigue Le moussaillon Labutte et Mylène tirant sur la corde attachée au casier ramené à bord.

Frédéric et Mylène Montaigue sont tout, sauf de bons à rien. Dès 5 h 30, ils sont à la mer, à la pêche de leurs casiers. Hemingway les aurait adorés. Eux, si simples sans être simplistes. Si tendres l’un envers l’autre. À la maison, comme au large, ils sont complices. Mari et femme, mais, aussi, moussaillons le temps d’une sortie en haute mer. En barque.

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La route est longue. De Pointe-aux-Sables et Palma à Bambous Virieux, il y a des kilomètres à avaler. Entre Bois des Amourettes et Anse Jonchée, on atterrit dans ce petit bled dans le fin fond de ce beau Sud si profond. Fredo nous attend au bord de la route côtière, près du point de débarquement du coin. On a un quart d’heure de retard.

« Bonjour, ça va ? » Et Mylène, déjà parée de son survêtement, nous sourit. La maisonnée est calme, simple à l’image de nos hôtes. Béatrice et Astrid dorment encore. L’une est diplômée en marketing et l’autre en Upper VI. Il semble que Fredo et Mylène ont à cœur l’éducation de leurs enfants. Même, s’ils ne sont pas des érudits eux-mêmes. Peu importe ! Ici, cela respire la bonté, l’entente de deux êtres qui se connaissent et qui se respectent. La maison est simple, mais avec des aménités essentielles. L’écran ‘led’, la cuisine bien rangée, les toilettes nickel, de même que les autres parties de la maison. On sent le plein bonheur, des êtres qui ne quémandent pas, mais qui donnent envie d’aimer.

Deux tasses de thé nous accueillent, Jenna et moi. Trop chaud, mais exquis. Le temps de l’avaler, il faut y aller. Le moteur à l’épaule de Fredo, les autres récipients et gilets de sauvetages aux mains de Mylène. On s’en va affronter l’océan. Le temps est frisquet, c’est la pleine lune et c’est mauvais signe pour les hommes de la mer. « Ti a bon ki nous gagne nous la zournée, car avec la pleine lune, nous pas ti bizin sorti meme, poisson pas morder », nous lâche Fredo. Mais Mylène est plus optimiste : « Nou pou capav couvert frais ».

Et c’est parti. Jean Patrick Labutte nous a rejoints, c’est lui qui va prêter main-forte au couple de pêcheurs. Il y a, en tout, douze casiers à lever. On navigue plus de 20 kilomètres de la terre ferme. Tout au loin, on peut entrevoir l’Ile-aux-Cerfs et ses touristes. Après une demi-heure, on aperçoit une bouée qui est le repère du tout premier casier. Mylène accroche la corde et, aidée du moussaillon Jean Patrick, ils soulèvent d’une main de fer, le casier qui contient quelques cornes de taille moyenne et deux rougets adultes.

Rebelotte, les algues sont accrochées dans le casier et quelques ‘bambaras’ casés au fond du piège grillagé qui est remis à la mer. Ces actions se feront pour les onze autres casiers. Fredo a le sens du repérage, il plonge la tête pour voir si la prise est bonne. C’est le masque qui l’aide à voir dans la profondeur bleuâtre de cette eau. Il fait quelques fois la grise mine, signe que le casier est presque vide, sinon il crie de joie. La prise est bonne. On en voit de toutes les espèces, des capitaines, des cornes, des rois cornes, des rougets, des vielles rouges et même un poisson volant.

Après quelques heures en haute mer, retour sur la terre ferme, non sans avoir été secoués. N’empêche, « nou fine couvert frais ek gagne ene ti profit », nous lâche Mylène avec un large sourire. Là, le boulot n’est pas fini. Il faut tout désembarquer, laver la pirogue et ramener la prise à la maison pour la pesée au banian qui attend. Puis, c’est le repos bien mérité et la douche.

Béatrice est à la cuisine à faire la vaisselle. Elle a préparé le déjeuner. Fredo est épuisé, de même que Mylène. On discute de tout et de rien. Une conversation comme l’adorent les villageois quand ils reçoivent. Les portables n’arrêtent pas de sonner. Il y en a de partout, de même que les nôtres, Jenna et moi. Ma collègue en profite pour caller un reportage sur le village des pêcheurs qui avait pour point de départ le moussaillon, un vieux loup de mer.

Lui, vieux loup de mer, depuis ses 14 ans avec son papa, elle depuis quatre ans à soulever ces énormes casiers. N’empêche, qu’ils tentent de gagner paisiblement et honnêtement leur vie, tout en s’assurant l’avenir de leurs deux filles. Le père, la mère et la mer ne font qu’un. Chapeau !

Mylène et Frédéric pour les derniers préparatifs, avant le départ pour la pêche.

 

Coucou, c’est nous

« Cette nouvelle rubrique se veut une invitation personnelle chez de petites gens, bien de chez nous. On s’incrustre chez elles sans trop déranger, mais tout en vivant leur quotidien, partageant leur intimité, leur repas, un thé, des biscottes. C’est une tranche de vie que nous vous offrons, un clin d’œil léger et sans aucune prétention ».

 

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