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Les malheurs d’Abdullah : de retour à Maurice après 30 ans passés à l’île sœur

Souriant, à son départ de La Réunion le 15 février.

L’histoire d’Abdullah O., un Mauricien de 73 ans qui a été SDF pendant des années à l’île de La Réunion, avait touché le cœur de nombreux Mauriciens et Réunionnais. Ces derniers ont cotisé pour son retour à Maurice. Il est enfin sorti de la quarantaine obligatoire, mais malheureusement, tout ne se passe pas comme prévu… 

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Il n’avait qu’un rêve : celui de rentrer dans son île natale et de retrouver ses proches « pour mourir en paix auprès de ma famille », disait-il à qui voulait bien l’entendre. Dans l’entrepôt où il vivait à St-Louis, à l’île de La Réunion, il avait pris ses habitudes malgré le désordre, la mauvaise odeur et les ordures. Des volontaires avaient entrepris de tout ranger afin qu’il puisse vivre dans un environnement propre. Même s’il avait régulièrement à manger grâce à des personnes aux alentours, il ne cessait de raconter son histoire et son désir de rentrer chez lui. C’est ainsi qu’un groupe de volontaires du Groupement des associations Réunion-Maurice Solidarité et de l’association Dis-moi Réunion avec l’aide de plusieurs personnes dont la communauté musulmane de l’île de La Réunion a tout fait pour réaliser le vœu d’Abdullah. 

Si celui-ci s’attendait à un heureux retour à l’île Maurice, il est très déçu. Arrivé le 15 février dernier, il a effectué sa quarantaine dans un hôtel du Nord et ne cessait de compter impatiemment les jours afin qu’il puisse retrouver les membres de sa famille. Mais toutes les tentatives pour les contacter sont restées vaines. L’un des volontaires précise qu’il a contacté plusieurs membres de la famille d’Abdullah pour demander à ses frères de venir à sa rencontre, mais en vain. « Nous ne voulons pas porter un quelconque jugement. Nous ne savons pas pourquoi sa famille ne veut pas le voir. Mais dans sa tête à lui, c’est son frère qui viendrait le récupérer à sa sortie de l’hôtel. » 

Il est 18h30 le lundi 1er mars, lorsque Abdullah quitte l’hôtel. À ce moment précis, il ne pense ni à ses bagages, ni à ses documents qu’il doit récupérer. Il n’a en tête qu’une chose : qui est venu le récupérer ? Une fois dans la cour, il se met à chercher du regard un visage familier. Les volontaires venus le récupérer vont à sa rencontre. Il demande une fois encore où sont les membres de sa famille. Ces derniers lui font comprendre que pour le moment, ils n’ont pas pu les retrouver. Abdullah, triste, leur demande alors de le conduire chez eux, car il veut absolument les voir. 

Pendant tout le trajet, il parle à peine, exprimant parfois son étonnement lorsqu’il regarde les bâtiments aux alentours. Il explique qu’il ne reconnaît pas son île. « Elle a tellement changé, remarque-t-il. Je n’arrive pas à me retrouver car certains endroits sont complètement différents ». Il parle de ses souvenirs d’enfance, de ce qu’il se rappelle du pays, des moyens de transport, entre autres. Parfois, il se trompe, il se perd dans ses pensées, dans ses paroles. Pendant ce temps, les volontaires essaient encore une fois d’appeler ses proches. Aucune réponse. 

Il décide donc de se rendre dans un abri. « Nous avons effectué des démarches auprès d’une maison d’accueil pour le prendre en charge et ils ont bienveillamment accepté de l’accueillir », relate un des volontaires. Cependant, une fois sur place, après avoir été vu par le médecin et après un brin de causette avec tout le personnel, Abdullah refuse d’y rester. « Ce n’est pas ma maison. Je ne peux pas rester ici. J’ai ma maison. J’ai une famille, je dois être avec eux », insiste-t-il. Le médecin qui l’a examiné estime qu’il est très affecté et même dépressif et demande aux volontaires de le conduire à l’hôpital. 

Ces derniers n’ont pas d’autres choix que de l’emmener à l’hôpital Brown Sequard. « Il commençait à perdre la tête. Il parlait de mettre fin à sa vie, il était dans un sale état », explique un des volontaires. Les médecins ont alors décidé de l’admettre. À ce jour, Abdullah y est encore. Il ne veut toujours rien comprendre et espère que les membres de sa famille vont venir le chercher ou vont lui rendre visite. Il ne sait plus aujourd’hui s’il a bien fait de venir, pourtant il veut croire que des jours meilleurs l’attendent… 

La solidarité Maurice – Réunion à l’honneur 

C’est à l’occasion de la Journée mondiale des sans-abri, observée le 10 octobre, que l’histoire d’Abdullah a été publiée dans Le Défi Plus l’année dernière. Par la suite, ce sont les volontaires qui ont pris le relais et le président du Groupement des Associations Réunion-Maurice Solidarité et les membres de Dis-moi Réunion tiennent à les remercier. « Nous avons à cœur plus de projets de coopération entre nos îles. Nous sommes les îles sœurs et nous pouvons consolider cette chaîne de solidarité entre Maurice et Rodrigues. Nous remercions toutes les personnes qui nous ont contactés pour venir en aide à Abdullah, les médias qui ont fait entendre sa voix, une compagnie privée du port, la préfecture, la police des frontières, la Région Réunion, le Dr Uva Paratian, les supporteurs à l’étranger et toutes les personnes qui ont aidé d’une manière ou d’une autre. Cela prouve qu’ensemble, nous sommes toujours plus forts et nous pouvons aller bien plus loin », avance Daniel Claude. 

 

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