Après que Maurice a encaissé une suite de chocs ces deux dernières années, la croissance économique est indispensable pour soutenir les différents secteurs d’activité et assurer une meilleure qualité de vie. C’est ce qu’estiment les observateurs économiques.
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Alors que le Fonds monétaire international (FMI) craint une récession mondiale en 2023, l’économie mauricienne continue d’être confrontée à des incertitudes. Du coup, explique l’économiste Bhavish Jugurnath, dans un contexte de pressions inflationnistes ainsi que de crise énergétique et alimentaire due à la guerre russo-ukrainienne, il sera très important de soutenir l’économie. « Et cela ne sera possible qu’avec une croissance économique », dit-il.
Un avis que partage l’observateur économique Imrith Ramtohul. La croissance, avance-t-il, se traduit par la création d’un plus grand nombre d’emplois et le développement de nouvelles industries. « Par ailleurs, avec une croissance soutenue, les entreprises existantes peuvent se développer davantage, ce qui mène à une augmentation des recettes fiscales. » Le gouvernement, poursuit-il, peut alors dépenser plus pour les services publics et la protection de l’environnement. « Une forte croissance économique assure souvent une baisse des emprunts de l’État et une meilleure qualité de vie dans le pays », soutient-il.
Même son de cloche du côté de l’expert-comptable et observateur économique Tahir Wahab. Il affirme que la croissance améliore le niveau de vie et est indispensable pour faire face à bon nombre de problèmes économiques et sociaux. « Sans la croissance, la marge de manœuvre du gouvernement pour établir son budget est réduite et le pouvoir d’achat des Mauriciens va stagner », explique-t-il. L’économiste Manisha Dookhony abonde dans ce sens : « Une croissance soutenue permettra au pays de faire face à de nombreux challenges économiques. »
Les orientations recommandées
Bhavish Jugurnath est d’avis que les incitations devraient être renforcées pour le secteur manufacturier en ciblant davantage les investisseurs internationaux et les investissements directs étrangers. « Un autre secteur que le gouvernement devrait soutenir par le biais d’incitations fiscales et d’incitations aux investisseurs est la technologie émergente, notamment la FinTech et l’intelligence artificielle », dit-il.
Imrith Ramtohul ajoute : « L’utilisation de technologies améliorées entraînera une productivité plus élevée. » En outre, il estime que l’éducation et les formations doivent être revues pour que la main-d’œuvre devienne plus qualifiée. Il propose également des mesures fiscales pour assurer la croissance. « Les taux d’intérêt doivent être revus à la baisse pour encourager l’investissement dans de nouveaux projets. Par ailleurs, il faut réduire les impôts pour augmenter le revenu disponible et encourager les dépenses. »
Pour sa part, Manisha Dookhony affirme qu’il y a un besoin de développer de nouveaux pôles de croissance. Tahir Wahab fait observer que la croissance n’est pas durable si l’on importe la majorité de notre consommation. « Il faut augmenter la productivité de nos industries locales pour qu’elles créent de la valeur. » Le gouvernement, poursuit-il, doit également continuer à investir dans les infrastructures, les logements et le développement de nouveaux piliers comme l’économie océanique et l’économie verte.
Freins et obstacles
La propagation du sous-variant BF-7 de la Covid-19, qui affecte actuellement la Chine et d’autres pays asiatiques, selon Bhavish Jugurnath, peut représenter une menace pour la croissance mauricienne. « Si cette tendance se poursuit, nous reviendrons comme en 2021 avec des restrictions de voyage qui impactent nos principaux secteurs tels que le tourisme et le manufacturier », dit-il.
De son côté, Imrith Ramtohul pense que des taux d’intérêt plus élevés peuvent causer des problèmes. « Les entreprises risquent de réduire leurs investissements dans de nouveaux projets en raison de coûts financiers plus lourds », souligne-t-il. De plus, dit-il, la récession mondiale annoncée aura un impact certain sur le tourisme, les exportations et les services financiers. « Cela affectera notre croissance économique. » Manisha Dookhony partage cet avis. « De nouvelles augmentations du taux directeur peuvent freiner la croissance, tout comme une perte de valeur de la roupie », précise-t-elle.
Tahir Wahab ajoute que l’industrie touristique restera fragile s’il n’y a pas des mesures incitatives pour promouvoir la destination. D’ailleurs, dit-il, les mauvaises publicités concernant des requins et les agressions sur des touristes peuvent avoir des effets négatifs. Par ailleurs, poursuit-il, la situation économique mondiale et la guerre en Ukraine auront certainement un impact sur nos principaux marchés d’exportation. « Ces facteurs peuvent diminuer la performance économique, sans oublier l’augmentation des prix des matières premières et nos contraintes locales, dont le ‘brain-drain’ et le manque de main-d’œuvre dans certains secteurs », soutient l’observateur économique.
Évolution du taux de croissance
- 2021 : 3,5 %
- 2022 : 7,8 %
- 2023 : 5 % (prévision)
Performances sectorielles attendues en 2023
Secteur manufacturier
2022 : 6,3 %
2023 : 1,5 %
Agriculture et pêche
2022 : 2,5 %
2023 : 4 %
Construction
2022 : 1,1 %
2023 : Pas de croissance
Activités financières et assurances
2022 : 3,7 %
2022 : 3,7 %
Hébergement et restauration
2022 : 200,8 %
2023 : 30 %
Le chiffre de la croissance en 2023 ?
Bhavish Jugurnath : « Avec une situation mondiale très incertaine, je reste prudent et table sur une projection de croissance de 5 % pour 2023. »
Imrith Ramtohul : « Les effets d’une récession ou d’un ralentissement économique mondial ainsi que des taux d’intérêt plus élevés localement pourraient entraîner une croissance plus faible, soit de l’ordre de 4,8 à 5 % »
Manisha Dookhony : « Je m’aligne sur la prévision de la Banque mondiale et celle de la MCB. »
Tahir Wahab : « Je pense que la croissance sera inférieure par rapport à 2022 et se situera autour de 5 % »
Leur avis
Jocelyn Kwok, CEO de l’Association des hôteliers et des restaurateurs de l’île Maurice
« Les opérateurs touristiques appréhendent l’effet de l’inflation, du taux d’intérêt grimpant, mais aussi du taux de change, sur leurs revenus. L’industrie ne s’est pas encore remise de la crise sanitaire. Et l’augmentation attendue des coûts de l’électricité, de la main-d’œuvre et des intrants ralentira le processus de récupération. »
Yannick Applasamy, président de l’Association of Mauritian Manufacturers
« Pour que la reprise dure et qu’elle se transforme en croissance durable, il nous faut un cadre qui facilite l’innovation industrielle. Par ailleurs, nous devons repenser nos modes de production et d’approvisionnement. Nos enjeux restent la consolidation de nos industries. »
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