
- L'homme d'affaires admis en clinique vendredi soir
Les comptes bancaires de Maminiaina Ravatomanga liés à Maurice ont été gelés à la demande de la Financial Crimes Commission (FCC) à cause d'importants transferts d'argent. L'Attorney General, Gavin Glover, précise qu'aucun mandat d'arrêt international n'a été émis contre l'homme d'affaires.
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Dans un communiqué émis vendredi soir, la FCC souligne avoir " obtenu des renseignements indiquant que Mamy Ravatomanga avait transféré une forte somme d'argent à Maurice, avec l'intention de déplacer ces mêmes fonds vers d'autres juridictions et de quitter le territoire mauricien ".
L'homme d'affaires a été admis dans une clinique privée des Plaines-Wilhems, vendredi soir. Il devrait prochainement se présenter à la FCC pour répondre aux allégations formulées par de jeunes ressortissants malgaches. Des soupçons de détournement de fonds et de blanchiment d'argent sont évoqués, mais l'enquête se poursuit pour confirmer certains éléments.
La FCC a en effet obtenu, le 15 octobre, un Criminal Attachment Order auprès de la Cour suprême contre Maminiaina Ravatomang.
L’ordonnance de la Cour suprême interdit toute disposition des fonds détenus sur les comptes bancaires de l’homme d’affaires.
À la FCC, vendredi soir, des sources proches qualifiaient le dossier de "Very Sensitive" et précisaient qu'il est traité avec le "Highest Level of Confidentiality" pour assurer le bon déroulement de l'enquête.
Alors que le Conseil National de Défense de la Transition (CNTD) assure la direction à Madagascar, il n'existe à ce jour aucune reconnaissance officielle de cette instance au niveau de l'Union africaine. Les demandes officielles d'entraide judiciaire formulées par la FCC sont donc, pour le moment, restées sans suite.
L'enquête a été déclenchée le lundi 13 octobre, suite au dépôt d'une plainte à la FCC par des ressortissants malgaches résidant à Maurice, accompagnés de leur avocat, Me Sailesh Seebaruth. Ils y dénoncent un réseau présumé de détournement de fonds aux ramifications internationales impliquant Mamy Ravatomanga, ainsi que l'atterrissage " illégal " d'un jet privé à Plaisance la veille. L'homme d'affaires était en effet arrivé à Maurice dimanche en compagnie de l'ancien Premier ministre Christian Ntsay et de ses proches.
Si l'ex-chef de gouvernement malgache a depuis mis le cap vers d'autres horizons, Mamy Ravatomanga est, lui, toujours présent sur le territoire mauricien.
L'affaire prend une dimension diplomatique et institutionnelle cruciale. La FCC aurait sollicité de manière informelle les autorités malgaches afin d'obtenir des informations sur les activités financières du magnat, réputé proche d'un ancien Premier ministre de la Grande île. Dans le même temps, le Conseil National de Défense de la Transition (CNDT), une instance malgache, a déjà adressé une correspondance officielle à la FCC, sollicitant la coopération de Maurice dans cette affaire.
Au-delà de ce dossier spécifique, c'est la crédibilité institutionnelle de la FCC qui est en jeu. Créée pour renforcer la lutte contre le blanchiment et la criminalité financière, la commission doit prouver sa capacité à mener des enquêtes indépendantes et rigoureuses, surtout face à des personnalités de cette envergure.
Cette affaire, à la croisée des enjeux économiques et diplomatiques régionaux, pourrait ainsi marquer un tournant majeur dans la coopération contre les flux financiers illicites dans l'océan Indien.
Défense et position de l'homme d'affaires
Trois jours plus tard, jeudi 16 octobre, Me Siddhartha Hawoldar, représentant légal de Mamy Ravatomanga, a remis des documents au siège de la FCC, à Réduit. " Mon client est un habitué de Maurice et n'a nullement l'intention de quitter le pays avant de s'expliquer ", a-t-il déclaré au Défi Media Group à l'issue de sa visite au Réduit Triangle. Les enquêteurs examinent actuellement des dénonciations portant sur des transactions financières suspectes via des sociétés liées à l'homme d'affaires à Maurice. Les premières vérifications concernent des acquisitions immobilières, des opérations commerciales et des comptes bancaires locaux.
Coopération malgache et dossiers dans le viseur
Le Conseil National de Défense de la Transition (CNDT), dirigé par le Colonel Michaël Randrianirina, a officiellement demandé la coopération judiciaire de la FCC. Me Fanirisoa Ernaivo, une ancienne magistrate, représente les autorités malgaches dans ce processus visant à retracer les flux financiers, geler les avoirs et obtenir les informations bancaires relatives à Mamy Ravatomanga et à ses sociétés. Le CNDT évoque plusieurs dossiers sensibles impliquant l'homme d'affaires, dont la filière Letchi-GEL, les contrats frauduleux à la JIRAMA, ainsi que l'affaire des aéronefs Boeing 777 iraniens, mentionnée dans des rapports de Transparency International Madagascar.
Parallèlement à l'affaire Ravatomanga, la FCC a adressé une correspondance aux autorités malgaches concernant l'enquête sur Wendip Appaya, homme d'affaires de Tranquebar. Ses connexions avec des acteurs clés de la Grande île, qui seraient impliqués dans des activités jugées douteuses, font l'objet d'un examen approfondi. La FCC s'intéresse également à ses activités financières à Madagascar et a sollicité l'assistance des autorités locales à ce sujet.
De récentes vidéos circulant sur les réseaux sociaux, montrant une cargaison de cocaïne qui serait destinée à Maurice, ont également attiré l'attention des autorités mauriciennes. Les Malgaches, qui auraient démantelé une partie du réseau, collaborent avec les enquêteurs mauriciens pour identifier les ramifications locales. Les échanges d'informations entre les deux pays, voire avec le Pôle Anti-Corruption (PAC) malgache et le Réduit Triangle, seront déterminants pour faire avancer ces enquêtes.
Mais, à ce stade, la FCC demeure silencieuse sur l'affaire Ravatomanga, qualifiée en interne de " Highly Sensitive ".
Origine des révélations :le whistleblower mauricien
Toute l'affaire de blanchiment d'argent et de trafic de drogue a éclaté en février 2025, à la suite des aveux d'un Mauricien détenu à Antananarivo pour trafic de stupéfiants. Membre présumé d'un réseau opérant sur l'axe Maurice/Madagascar, il a révélé aux autorités malgaches la structure et le mode de fonctionnement de cette organisation criminelle.
Informée de ces déclarations, la FCC a relancé plusieurs pistes à Maurice, ciblant des protagonistes soupçonnés d'opérer localement. Selon les éléments recueillis, le réseau comprendrait une branche logistique chargée du transport, des financiers et des exécutants, tous actifs sur les deux territoires.
Le détenu a, en outre, dénoncé un trafic de cocaïne impliquant d'autres Mauriciens, dont un vacancier présent à Madagascar du 25 au 27 janvier 2025. Il affirme avoir refusé une offre de Rs 25 millions destinée à le faire taire, préférant coopérer avec les autorités et tout révéler.

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