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L’employabilité des anciens détenus, une priorité pour lutter contre la récidive

En prison, plusieurs formations sont proposées aux détenus.

Le rajeunissement de la population carcérale est bien visible aujourd’hui. Pour Dev Jokhoo, commissaire des prisons, et Josian Babet, responsable de la communication du service pénitentiaire, ce phénomène s’explique par un enchevêtrement de facteurs : échec scolaire, conditions de vie précaires, consommation de drogues synthétiques bon marché et influence délétère de l’environnement. 

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Dès le plus jeune âge, certains grandissent dans des quartiers où la criminalité fait partie du décor. Là, la première consommation de drogue – souvent perçue comme anodine – marque le début d’une spirale infernale. La dépendance s’installe rapidement, entraînant les jeunes dans une course aux délits pour financer leur addiction : vols, agressions, violences domestiques. Le chemin vers la prison devient alors presque inévitable.

À l’origine de cet engrenage, la cellule familiale joue un rôle central. Les deux responsables rappellent que les parents, premiers éducateurs, sont censés transmettre des repères solides. Mais dans bien des foyers, la violence verbale et physique est banalisée. « Les parents ont de plus en plus de mal à gérer les adolescents, et certains finissent même par démissionner de leur rôle », affirme Josian Babet. L’omniprésence du téléphone portable accentue encore ce fossé générationnel, brisant le dialogue. « Il ne s’agit pas de pointer du doigt les parents, souligne Josian Babet. Eux aussi ont besoin d’être soutenus face à ces défis. »

L’école, quant à elle, peine à offrir des perspectives à tous les profils. « L’échec scolaire isole les jeunes, qui se retrouvent à la rue sans diplôme ni perspective », souligne Josian Babet. Ce qui les rend plus vulnérables à la tentation de l’illégalité. Livrés à eux-mêmes, sans projets d’avenir, beaucoup se laissent happer par les pairs et les réseaux criminels qui leur promettent un autre mode de vie. 

« Les jeunes en difficulté sont des cibles faciles pour les groupes aux comportements déviants », constatent Dev Jokhoo et Josian Babet. À cela s’ajoutent les recruteurs aguerris qui exploitent leur fragilité, attirant ces jeunes avec des promesses de réussite rapide, souvent glorifiées sur les réseaux sociaux.

Face à ces trajectoires de rupture, la prison apparaît trop souvent comme la réponse automatique. Pourtant, les peines courtes, majoritaires chez les jeunes détenus (souvent moins de six mois), ne suffisent pas à casser ce cycle. « Une peine courte ne permet pas réellement de les réformer », déplore Josian Babet. 

Il plaide pour un changement de cap. « Il est crucial de les engager dans des activités positives – bénévolat, mentorat – plutôt que de les punir systématiquement. » Ce phénomène souligne des problématiques sociales profondes : marginalisation, stigmatisation, exclusion. « Il faut miser sur la prévention, l’accompagnement social, et la réinsertion, tout en investissant dans des politiques éducatives et sociales pour briser ces trajectoires de délinquance », insiste Josian Babet.

Face à cela, le service pénitentiaire met en œuvre plusieurs programmes de réinsertion. « La réhabilitation est essentielle pour permettre aux détenus de se réintégrer dans la société », expliquent Dev Jokhoo et Josian Babet. Formations professionnelles (pâtisserie, métallurgie, menuiserie, couture, élevage, jardinage…) – certaines reconnues par le MITD –, thérapies individuelles ou de groupe en partenariat avec des ONG : tout est mis en œuvre pour offrir un tremplin vers un nouveau départ.

Mais le chemin reste long, notamment pour les jeunes confrontés à des addictions ou des troubles psychologiques. « Toi seul peux le faire, mais pas seul », cite Josian Babet, insistant sur la nécessité de volonté personnelle, mais aussi d’un accompagnement solide. Il évoque le manque de personnel qualifié et la nécessité de mobiliser davantage d’ONG pour accompagner les détenus dans leur réinsertion.

Le défi majeur reste la réinsertion une fois la peine purgée. Car à la sortie, la réalité est brutale : rejet social, isolement, chômage, absence de suivi. Le risque de retomber dans la délinquance est alors énorme. « L’employabilité des anciens détenus doit devenir une priorité si l’on veut réduire la récidive », affirme Josian Babet. 

Il appelle l’État à créer un programme Second Chance pour inciter les entreprises à offrir une seconde chance à ces jeunes. Un appel à repenser profondément notre système, pour bâtir une société plus juste, plus humaine, et véritablement orientée vers la réinsertion.

 

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