Leena Teelockchand : entre Londres, Paris et Port-Louis, le voyage chevillé

L’embellie que connait le secteur du tourisme mauricien est sur une véritable dynamique. Toutefois, les seuls marchés émetteurs traditionnels à destination de l'île ne suffiront pas pour pérenniser le secteur local. Installée en Angleterre, Leena Teelockchand travaille à la fois sur la destination mauricienne et celle du Sri Lanka, d’Europe, de Dubaï et d’Asie.

Issue d’une famille d’artistes de Goodlands, durant son récent séjour à Maurice, Leena Teelockchand a multiplié les rencontres avec des directeurs d’hôtels et son agent au pays afin de prendre le pouls de la reprise post-Covid dans le secteur du tourisme local. « En effet, le secteur a repris son envol. Il a démontré sa résilience et les opérateurs ont rapidement renoué avec la clientèle traditionnelle. Je pense que la version dite ‘carte postale’, en l'occurrence les plages, les cocotiers et la qualité des services restent des atouts attrayants », indique la directrice de l’agence Trochetia Travel Limited. Toutefois, elle nuance ses propos : « Certes, je vends la destination mauricienne à mes clients anglais et français, mais je leur propose aussi des pays comme l’Inde, Thaïlande, Malaisie, Dubaï ou encore le Sri Lanka en tenant compte de leurs sensibilités et leurs portemonnaies. Le secteur du voyage étant très diversifié, pour nous autres opératrices et opérateurs, il faut sans cesse suggérer des nouveautés ».

École Supérieure du Tourisme

Partie en France dès son enfance et installée avec ses parents dans la banlieue parisienne, Leena Teelockchand a poursuivi ses études dans le domaine du tourisme. Avec cette formation en poche, elle rejoint le département du service client de l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, avant de partir à Londres, où elle prend de l’embauche à l’aéroport de Heathrow. En 1997, elle rentre à Maurice où elle est recrutée par l’agence Mauritours. Quelques années plus tard, elle repart en France où elle intègre l’association Nouvelles Frontières qui se donne pour objectif de démocratiser le secteur du voyage. « Là-bas, je me suis familiarisée avec le service de la billetterie, réservation groupe. Par la suite, j'ai rejoint l’agence Carlson wagons-lits Travel, entre autres », dit-elle. Fin 2009, elle suit sa petite famille et s’installe à Northampton, en Angleterre, où elle monte sa société, Trochetia Travel Limited. « Je m’étais rendu compte qu’il y avait de réelles opportunités de voyage à la fois en France et en Angleterre. Je me suis appuyée sur mes expériences, mon réseau de contacts, mon bilinguisme et aussi le fait que j’ai la communication facile pour créer ma société. J’ai commencé par le bouche-à-oreille avant de m’investir dans les réseaux sociaux. J’ai aussi participé à des salons évènementiels », explique-t-elle.

Ses premiers clients sont des Français venus s’installer en Grande-Bretagne.  Son bilinguisme va se révéler un atout déterminant. « Je me suis servi de la méthode ‘Business to Customer’ en mettant l’emphase sur la communication immédiate, en temps réel avec une approche individuelle », fait-elle ressortir. Bien entendu, au sortir du confinement, quoi de plus attractif que la mise en valeur de l’image soleil-plage-mer bleue et l’accueil de son pays natal pour séduire une clientèle tellement éprouvée par l’enfermement…

« …salons du tourisme mondiaux… »

« Pour mieux cerner les attentes, mais surtout nouer des contacts indispensables, je suis partie assister à de nombreux salons du tourisme mondiaux, dont le plus réputé est celui de Top Resa, France et WTM Londres, le seul salon B2B spécialisé sur le tourisme, où j’ai croisé une palette d’opérateurs liés au secteur, des agents de voyages aux associations du tourisme et institutionnels, aux autocaristes, transporteurs, professionnels de l’évènement et journalistes, entre autres. C’est dans de tels évènements que les contacts se créent », fait-elle observer. 

Après Maurice, elle élargit sa proposition de destinations au Sri Lanka. « Le Sri Lanka est un pays qui s’est très bien relevé après une double crise, d’abord un conflit ethnique et le tsunami de 2004. Il faut dire que c’était une destination assez difficile à vendre. Cependant, c’est devenu une destination très prisée par les Européennes grâce à son environnement naturel bien préservé, la sécurité qui y règne, la qualité de l’accueil et la gentillesse de sa population. Moi-même, je m’en suis rendu compte durant un voyage de sept jours en 2016 », confie-t-elle.

Expériences professionnelles

Durant ses années d’études et ses expériences professionnelles françaises et mauriciennes, un des points cardinaux du métier qui s’est révélé à elle est la crédibilité en toute chose, mais davantage dans le secteur du voyage. « Parfois, des personnes de milieux modestes ont économisé durant une année entière et ils comptent sur vous pour leur proposer des lieux de vacances. Il faut être fiable dans les conseils et propositions », fait-elle ressortir. Aussi, lorsqu’elle conçoit des forfaits, elle s’assure de toutes les étapes du trajet, des billets d’avion aux transferts privés depuis l’aéroport, en passant par les hôtels et les visites guidées. Une offre complète est proposée jusqu’à la destination, où des agents locaux s’assurent de la prise en charge de ses clients. « Je reste en permanence avec, d’un côté les clients et de l’autre côté avec l’agence dédiée à la prise en charge, m’assurant que tout se passe bien », explique-t-elle. Mais tout n’est pas laissé à celle-ci, poursuit-elle. « Je me renseigne sur la fiabilité de la destination, sur la sécurité du pays, ses infrastructures, l’accueil de la population, le niveau des hôtels. Mais aujourd’hui, une bonne partie du constat sur ces réalités est disponible sur les réseaux sociaux grâce aux témoignages en temps réels des vacanciers. Il n’est plus possible de donner des informations erronées sur telle ou telle destination », fait-elle observer.

Attentes de la clientèle

Comme toute professionnelle spécialisée dans le voyage, elle reste attentive aux attentes de la clientèle, étrangère ou mauricienne en leur proposant de nouvelles destinations, notamment Abu Dhabi ou la Thaïlande, qui sont des choix culturels très attrayants.  « J’ai noté que certains Mauriciens portent leur intérêt sur la Suisse afin de pratiquer le ski, d’autres choisissent les voyages sur les bateaux de croisières. C’est clairement une catégorie sociale qui en a les moyens, peut-être des seniors qui perçoivent une bonne retraite comme partout dans le monde. Depuis quelque temps déjà, les agences de voyages ont noté cette tendance qui gagne du terrain. Ainsi, elles ont commencé à concevoir des offres taillées sur mesure pour les seniors », dit-elle. « C’est aussi un secteur très marqué par la concurrence à l’international, voire à Maurice où chacun essaie d’avoir les meilleures destinations à moindre coût pour leurs clients, notamment en termes d’avions ‘low cost’.  C’est possible dans certains cas, mais on ne peut pas tout obtenir, car les bonnes destinations ont un coût qui correspond à leur image ».