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Le rêve brisé de Tagor : ancien culturiste devenu handicapé

Il visait la gloire sur la plus haute marche des podiums sous les feux des projecteurs… Un accident a brisé tous ses rêves de culturiste. Paralysé, Tagor Bhoojedhur déroule son histoire…

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Chaque personne qui croise notre route a une histoire. Derrière chaque visage se cache parfois des non-dits et chaque cicatrice est le symbole d’un récit douloureux. Cette semaine, nous avons rencontré Tagor Bhoojedhur, 74 ans et retraité, de Coromandel. Paralysé sur le flanc gauche, il marche difficilement à l’aide d’une béquille. À le voir, on n’imagine pas que c’est un ancien culturiste qui pouvait prétendre à une grande carrière. Mais le sort s’en est mêlé pour y mettre un terme à tout jamais…

Il confie : « C’était en 1979 et quelques années avant j’avais rencontré Geeta. Nous sommes tombés amoureux, nous nous sommes mariés et nous avons eu un fils. La vie était belle, j’avais un corps de rêve et des habitants de Résidence Barkly me surnommaient ‘Rex le ferrailleur’. Certains athlètes de haut niveau d’alors m’avaient approché pour m’encourager au culturisme en raison de mon physique. Au début, je n’étais pas vraiment intéressé, mais j’ai commencé à m’entraîner professionnellement quand il a été question de prendre part au concours de Mr Mauritius, encouragé par bon nombre de personnes qui m’ont persuadé que j’avais mes chances. J’allais donc régulièrement – trois à quatre fois par semaine - dans une salle de gym, sise à Beau-Bassin. Je voulais mettre toutes les chances de mon côté en vue de remporter le titre. » 

Une cloche qui sonne le drame

L’ancien athlète se rappelle de tous les détails, voire des pires moments de ce vendredi après-midi fatidique. « Je m’entraînais sur la ‘squat machine’ avec l’aide d’un coéquipier. Je devais compléter des séries d’exercice de dix squats et j’avais soulevé jusqu’à 550 livres. Puis, je lui ai demandé d’ajouter encore dix livres de chaque côté pour les cinq derniers squats. J’ai commencé ma série et, au même moment, la cloche sonnait la fin des classes pour le collège BPS qui est à côté… »

Pour l’anecdote, ajoute Tagor, les culturistes avaient l’habitude de se tenir aux abords des portes et fenêtres pour exposer leur plastique aux collégiennes qui passaient… « Mon coéquipier avait pour rôle de placer des poids supplémentaires vers la fin de mes exercices, mais aussi de m’aider si j’avais des difficultés. Or, lorsque je l’ai appelé, il n’a pas entendu du fait qu’il se trouvait près des fenêtres... Et ce fut le drame ! »

Mon fils m’a connu en tant que paralysé uniquement, car il était en bas âge lors de l’accident. 

Un énorme bruit a retenti dans la salle de musculation en tôle. « Le propriétaire pensait que le club s’était effondré alors que c’était les poids qui étaient tombés. Je me rappellerai toujours : j’ai essayé de me relever pour chercher mon pantalon, car les athlètes s’entraînaient en short… Je revois mon reflet dans une mare de sang avant de perdre connaissance. » Tagor est transporté d’urgence à l’hôpital. « J’ai repris connaissance longtemps après et ma vue était intacte par la grâce de Dieu. La présence de mon épouse en larmes, à mon chevet, est à jamais gravée dans ma mémoire. Je ne pouvais bouger, j’avais des tractions au cou. Lorsque j’ai repris connaissance, je pensais que j’avais gagné ma bataille, mais je retombais souvent dans le coma. J’ai finalement lutté pendant quatre mois avant que ma santé ne se stabilise. Cependant, lorsque le médecin traitant m’a fait des tests, je n’ai pas ressenti des douleurs. Je pensais que c’était bon signe, mais je me trompais. J’ai quitté l’hôpital amaigri et affaibli et même si le docteur ne me l’a pas dit ouvertement, je savais que je deviendrais invalide car je connais parfaitement mon corps… » 

En effet, Tagor est devenu handicapé du fait que le côté gauche de son corps, paralysé, ne s’est plus développé et la différence de ses muscles est visible à l’œil nu. « Je me déplace à l’aide d’une béquille et je me suis habitué à ce style de vie, malgré moi. Je ne pourrais jamais blâmer mon coéquipier parce que l’erreur est humaine. Je me considère chanceux d’avoir le support de mon épouse exemplaire. » 

«Une femme en or» 

Son épouse Geeta, âgée de 64 ans, est très réservée. Elle ne pipe mot lors de l’entretien, mais ses gestes tendres envers Tagor en disent long. « Même si, en tant que père, je n’ai pas réussi à faire grand-chose pour mon fils, mon épouse a pris les devants, raconte-t-il en versant une petite larme. Elle a vendu quelques-uns de ses bijoux et d’autres biens pour pouvoir joindre les deux bouts et élever notre enfant. Malheureusement, mon fils m’a connu en tant que paralysé uniquement parce qu’il était encore en bas âge lors de l’accident. Geeta a toujours eu plus de courage que nous. C’est une femme en or ! C’est grâce à elle que j’ai surmonté cette épreuve de la vie. On dit souvent que c’est dans les moments difficiles que nous voyons qui sont ceux qui nous aiment le plus. Aujourd’hui, avec l’âge, c’est difficile pour elle de m’aider. Récemment, je suis tombé du lit et elle n’a pu me soulever. Il a fallu que je reste au sol jusqu’à l’arrivée de mon fils. Je ne pourrais jamais assez la remercier pour ce qu’elle fait et si je suis là aujourd’hui, c’est grâce à elle. » 

Tagor jette un regard neuf sur le sport, mais il n’oublie pas sa passion. « Des fois, je ne peux m’empêcher de penser à ce qu’aurait été ma vie sans cet accident. Je suis reconnaissant pour toutes les autres belles choses que la vie m’a offertes, dont l’amour de ma famille. » 

 

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