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Le quota est passé de trois à un : dans l’univers des travailleurs étrangers

travailleurs étrangers Certains logis laissent vraiment à désirer, mais certains employeurs font des efforts.
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Dans un faubourg de la capitale, on est parti à la rencontre de trois travailleurs étrangers d’origine bangladaise.Contrairement à la majorité des travailleurs étrangers à Maurice, ils jouissent d’une vie agréable et affirment être bien « traités » par le patron. 

Venir à Maurice pour travailler sur un contrat a un coût. Vivant dans une situation de misère dans leurs pays d’origine, le Bangladesh, la plupart de ces travailleurs ont dû investir gros pour atterrir chez nous. 300 milles Taka ! Soit Rs 100 000. Cet argent est quasi-impossible d’être économisé sur le sol bangladais et les travailleurs sont tous obligés de contracter des emprunts bancaires. 

« Chaque mois, j’envoie Rs 10 000, soit 30 000 Taka, pour repayer mon emprunt bancaire », confie Irfan. Son salaire à Maurice, y compris les heures supplémentaires, varie entre Rs 15 000 et Rs 18 000. Son budget est de Rs 5 000 à Rs 8 000 pour ses dépenses mensuelles. Il explique être habitué à vivre avec environ Rs 5 000, car le reste de son argent est transféré à sa famille, au Bangladesh, qui est dans le besoin. 

Milat et ses amis Samir et Riad ne profitent de la vie mauricienne que pendant le week-end. Hormis les Rs 50 qu’ils utilisent pour réalimenter leurs téléphones portables, les trois compères disent épargner entre Rs 1 500 à Rs 2 000 pour s’offrir des petits plaisirs. "Nou aller Mc Donald, Kentucky, la mer. » 

Riad raconte que depuis quatre mois qu’il vit à Maurice, il connaît uniquement la capitale et le faubourg où il habite. Son lieu de travail est à proximité. Lui et ses camarades cherchent en permanence des « petits boulots » pour gagner plus d’argent mais Jean-Paul, leur patron, pour lequel ils ont beaucoup d’affection, leur propose aussi de gagner plus en faisant des « extras ».« Nou nettoy la cour, nous mete l’ordre dans l’atelier, nous lave loto, lerla gagne kass. My boss is good. ». Il affirme même qu’il pense des fois tristement à son retour au Bangladesh, prévu dans environ trois ans, si son patron décide de ne plus retenir ses services. 

La maison mise à leur disposition nous surprend. Climatiseurs, des carreaux céramiques au sol, un grand téléviseur LCD au salon et des chambres bien rangées. Les sanitaires sont dignes d’un hôtel mauricien, contrairement à la plupart de leurs compatriotes qui vivent dans des conditions peu désirables. 

Les trois Bangladais partagent la maison avec un ressortissant malgache. « Li aller travay lor bato, li pa la ». Riad explique qu’habiter sous un toit entre hommes leur facilite la vie. « On a développé l’amitié. » Ils affirment s’adapter graduellement à la vie mauricienne.  Ils saluent le fait que leur patron a mis à leur disposition une maison en bon état avec les facilités telles que le Wifi qui leur permet de rester en contact avec leurs proches au Bangladesh via WhatsApp ou Skype. Toutefois, il y a des conditions à respecter ; les travailleurs étrangers n’ont pas le droit d’emmener d’autres personnes à la maison, surtout pas des femmes. « On rencontre nos amis pour faire des sorties et on a aussi des amis mauriciens. »


Jean-Paul, entrepreneur : «Les traiter autrement»

Jean-Paul, patron d’entreprise et employeur de la bande de Bangladais, se dit satisfait de leur travail. Employeur de trois Bangladais et d’un Malgache en permanence, il explique que les démarches administratives sont longues. « Prend 6 a 8 mois pou faire sa ». Le coût pour lui n’est pas cependant énorme, car il ne paye que le permis et le billet d’avion de ses employés étrangers. « Il me coûte environ Rs 12 000 pour faire venir un Bangladais. » Jean-Paul explique vouloir changer la mentalité, en rehaussant le niveau de vie des travailleurs étrangers. « Je fais autrement, je leur offre une meilleure qualité de vie et des moyens de travail de haut niveau et je prends en compte le côté humain. » Pour Jean-Paul, s’il traite bien ses employés, le sentiment de confiance est automatique. « Lorsque je fais mes courses, je leur achète du poisson,.  Oun deza manz briani caille ? Banla cuit sa zot. »


Immersion dans la ‘Mauritian Life’ d’une Bangladaise

bangladaise
Zainah se démène, même si elle est en terre étrangère.

Mère d’un garçon de 18 ans, Zainah (prénom modifié) a dû payer Bangladeshi Takka 100 000 pour qu’elle puisse venir à Maurice. Il est 19 heures et nous la rencontrons chez elle dans une région tranquille mais dès que nous entrons, Zainah sécurise, à l’aide d’un cadenas, la porte à la vitre brisée. 
Le regard fatigué mais le sourire aux lèvres, l'ouvrière bangladaise nous accueille dans sa maison où habitent 13 autres travailleurs étrangers. « Nous évitons de sortir seules pendant la journée ou le soir. Nous ne nous sentons en sécurité que chez nous. Nous travaillions toutes ensemble dans la même compagnie », confie-t-elle en créole mauricien. Le coût de sa venue chez nous se chiffre à Rs 100 000. Elle nous raconte sa routine…

Leur contrat de travail est d’une durée de huit ans. Zainah en est à sa quatrième année. Un salaire de Rs 10 000 n’est pas assez pour la jeune Bangladaise qui est dans le textile. Pour le moment, elle se permet de travailler dans deux usines afin de pouvoir payer les études universitaires de son fils. « J’envoie 7 000 Bangladeshi Takka à mon fils pour qu’il puisse avancer dans la vie. C’est épuisant, mais vivre avec Rs 3 000 est compliqué. Je dois chercher un deuxième travail. Je fais le ménage et je nettoie la maison des personnes », indique-t-elle. 

Zainah ajoute que la compagnie, qui l’a engagée, ne lui complique pas la vie. « Nous débutons notre travail à partir de 7 heures du matin et nous terminons vers 17h15. Nous avons des heures de pause. Le matin, nous avons un break de 10 minutes, à 12h15 nous déjeunons pendant 30 minutes, puis à 15h00 c’est le goûter qui dure 10 minutes aussi. » Cependant, elle relève que pour le même nombre d’heures, les Mauriciens touchent plus d’argent que les Bangladais.  Zainah a trouvé une deuxième famille auprès de ses colocataires. Il y a 14 femmes dans ce dortoir où les hommes sont interdits. « Ils n’ont pas le droit de venir ici. Ah non non» Le dîner se passe parfois ensemble et parfois dans leur propre chambre. Le dortoir est doté d’une salle où est posée une machine à coudre et d’une salle à manger. Les samedis et les dimanches, elles partent ensemble au marché.  

Des dépenses personnelles

À l’heure que nous lui parlions, elle reçoit trois appels (video calls) en trois minutes de son pays natal. Une somme de Rs 300 est dépensée sur le ‘package internet’. « Nou ale bazar en groupe pou aste legim ou fer shopping avek nou lekonomi. », dit-elle. Nous lui demandons si elle et ses amies ont eu l’occasion de visiter les autres coins de l’île comme les régions côtières. « Notre compagnie nous emmène parfois visiter certaines régions mais nous ne pouvons pas partir seules. Personne ne connaît bien les endroits. »


De Dhaka à Plaisance

Le Bangladesh est de très loin le plus gros pourvoyeur de travailleurs étrangers à Maurice. Comment arrivent-ils à Maurice et dans quelles circonstances. Un travailleur bangladais se confie…

« C’est par pur hasard total que j’ai appris qu’on recrutait des gens pour travailler dans un pays dont je n’avais jamais entendu parler », explique Ahnaf (prénom modifié). Nous le rencontrons dans une grande maison de plusieurs étages, sise à Triolet, reconvertie en dortoirs. Il y réside avec une trentaine de compagnons. Tous travaillent dans une usine qui se trouve dans le Nord.

Tout débute à Dhaka, capitale du Bangladesh, en février 2017. « Je suis père de deux enfants et j’ai une maison à la périphérie de la ville. J’étais livreur de thé, mais avec un maigre salaire. Les bons mois, je pouvais toucher l’équivalent de Rs  3 000. Aussi, quand j’ai entendu parler d’un emploi qui me permettrait de gagner beaucoup plus, je m’y suis intéressé et après avoir parlé à mon épouse, on s’est dit pourquoi pas ? »

Une fois le recruteur rencontré et l’accord conclu, l’agent prend tout en main. Préparation du passeport, papiers administratifs, il offre même un emprunt. Un vol de l’aéroport international de Shah Jalal, Dhaka, vers Plaisance, coûte environ Rs 30 000, mais le prix fluctue, selon les périodes.

On m’a conduit à l’aéroport et emmené au comptoir d’embarquement. C’est là qu’on m’a fait rencontrer une autre personne qui se rendait également à Maurice pour y travailler. On nous a dit de rester ensemble et de ne pas s’inquiéter et que tout sera pris en charge à notre descente d’avion. »

Analphabète

Après plus de 15 heures de vol, comprenant une escale de deux heures à Dubaï, Maurice et son magnifique lagon est en vue. « J’étais trop stressé et paniqué pour comprendre ce que je voyais. Je ne comprenais rien. Ils m’avaient remis des papiers à remplir alors que je ne sais ni lire ni écrire », explique Ahnaf. En fait, ce sont des formulaires destinés aux services de l’immigration et au ministère de la Santé. « Mon compagnon de voyage était assis à l’autre bout de l’appareil et il était impossible de communiquer avec lui. Mon voisin  de siège ne comprenait pas ce que je lui disais. Je ne savais même pas où j’allais. On m’avait simplement dit que j’allais travailler dans une usine de textile dont je ne connaissais pas le nom. »

À partir de l’aéroport de Plaisance, la prise en charge sera complète. Formalités, transport, tout est assuré. Le compagnon de voyage est envoyé dans une autre compagnie. Ahnaf n’en entendra plus parler. « Ma famille me manque, c’est certain, et Maurice n’est pas mon pays. Mais je suis ici pour travailler et l’argent que j’envoie à la maison leur est utile. Je compte rester deux ans ici avant de rentrer à Bangladesh. » 

À Maurice, le rythme est éreintant. Certes, Ahnaf est bien payé par rapport aux salaires en vigueur au Bangladesh. À Maurice, il dépense peu. Entre Bangladais, la solidarité règne et cela permet d’économiser sur beaucoup de frais. Au lieu de dépenses individuelles pour la nourriture, par exemple, les denrées sont achetées en grande quantité, dont les prix sont négociés.

Pour le logement, tout est pris en charge mais sans aucun luxe. Lits à étage, six à huit personnes par chambre et peu d’espaces de rangement. Les toilettes et les douches sont insuffisantes pour le nombre de personnes présentes, mais elles s’arrangent. « On ne s’attendait pas à un hôtel 5-étoiles, et la plupart ne compte pas rester ici éternellement. »

Maurice ouvre ses portes aux étrangers

Le marché du travail local exige davantage de travailleurs étrangers. Vendredi dernier, le conseil des ministres a donné son autorisation pour revoir les règlements concernant l’octroi des permis de travail. Désormais, le quota sera de trois étrangers pour un Mauricien au lieu d’un étranger pour un Mauricien comme c’était le cas. Dans le concret, si une compagnie emploie quatre personnes, trois d’entre eux pourront être des étrangers. « Il y a une forte pénurie dans plusieurs secteurs. Nous avons donc décidé de revoir le quota pour pouvoir répondre aux besoins du marché du travail », explique Sudesh Callichurn, ministre du Travail et de l’Emploi.

Des secteurs d’activités qui étaient fermés aux étrangers, seront désormais ouverts. Parmi : l’agriculture où le manque de main-d’œuvre se fait sentir et dont l’évolution limite l’attrait pour les Mauriciens. Le gouvernement répond ainsi positivement à la requête de certaines compagnies sucrières qui avaient émis le souhait de pouvoir faire appel à des étrangers pour travailler dans les champs. Il sera aussi possible de recruter des étrangers pour l’économie bleue, la floriculture et la sante gériatrique.


Pays d’origine des travailleurs étrangers

Maurice compte au total 42 219 travailleurs étrangers. Parmi, 8 963 femmes. La masse de travailleurs étrangers, dont la grande majorité provient du Bangladesh, est en hausse constante. 

Algérie 3
Argentine 1
Australie 18
Autriche 2
Bahamas 1
Bangladesh 24 011
Benin 1
Bhoutan 2
Brésil 4
Bulgarie 1
Burkina Faso 1
Burundi 6
Cameroun 13
Canada 9
Chili 1
Chine 1 970
Taiwan 22
Comores 1
Congo 8
Tchéquie 1
Danemark 8
Égypte 5
Éthiopie 3
Finlande 1
France 169
Gambie 1
Allemagne 9
Grèce 2
Inde 9 158
Indonésie 59
Iran 1
Irlande 5
Italie 23
Côte d’Ivoire 12
Japon 1
Kenya 22
République de Corée 2
Laos 1
Liban 1
Luxembourg 1
Madagascar 4 668
Malaisie 6
Maldives 2
Mexique 3
Mongolie 1
Maroc 9
Mozambique 3
Népal 338
Pays-Bas 4
Nouvelle Zélande 2
Nigéria 27
Pakistan 21
Philippines 73
Pologne 6
Portugal 3
Roumanie 4
Russie 21
Sénégal 9
Serbie 2
Seychelles 7
Singapour 4
Afrique du Sud 77
Espagne 2
Sri Lanka 1 244
Suisse 5
Syrie 3
Tanzanie 4
Thaïlande 9
Togo 1
Tunisie 1
Ouganda 8
Royaume-Uni 37
États-Unis 12
Vietnam 3
Yémen 1
Zimbabwe 6
Total 42 219

Nombre de permis de travail émis en septembre

Voici le nombre de permis de travail émis par le ministère du Travail uniquement pour le mois de septembre. On remarque que 61% de ces ouvriers proviennent du Bangladesh, suivi de l’Inde (23%), de Madagascar (8%), de la Chine (2%) à égalité avec le Sri Lanka.

Australie 2
Bangladesh 1 675
Brésil 2
Chine 101
Congo 1
France 6
Ghana 2
Grèce 1
Inde 645
Indonésie 4
Italie 1
Côte d’Ivoire 2
Kenya 4
Madagascar 232
Népal 19
Nigéria 1
Philippines 4
Russie 1
Sénégal 4
Afrique du Sud 3
Sri Lanka 42
Taiwan 1
Tunisie 1
Ouganda 1
Ukraine 1
États-Unis 1
Total 2 757
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