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Le passé controversé de la SST rattrape son ancien chef

C’est sous forte escorte policière que le SP Ashik Jagai, vêtu d’un gilet pare-balles et d’un casque, a été présenté devant le tribunal de Port-Louis, jeudi.

L’ancien « homme fort » des Casernes centrales, le surintendant de police Ashik Jagai, est au centre d’une enquête de la FCC sur des paiements liés au fonds de Reward Money. Cette semaine marque un tournant pour le vétéran de la police mauricienne, dont la carrière de 33 ans, principalement au sein des unités antidrogue, a été marquée par la montée en puissance de la défunte Special Striking Team (SST).

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Créée sous le commande-ment de l’ex-commissaire Anil Kumar Dip, pendant le mandat de l’ex-Premier ministre Pravind Jugnauth, la SST avait rapidement acquis une réputation de force redoutable. Les critiques n’ont pas tardé à suivre : des arrestations entachées d’allégations de « drug planting » et des accusations d’excès de pouvoir ont été formulées par des figures publiques et des avocats, dont Akil Bissessur. Selon ses détracteurs, certains ont été victimes de méthodes musclées de l’unité.

Parmi les plus virulents détracteurs : l’avocat Akil Bissessur, arrêté à trois reprises par la SST. Proche du Parti Travailliste, il était présent au tribunal mercredi, lors de la comparution d’Ashik Jagai. Il accuse ce dernier d’avoir orchestré un complot contre lui : « Tou seki Jagai finn fer, li finn fer avek benediksion komiser Dip ek sirtou avek… (en citant le nom d’un proche d’une haute personnalité). Monn fer enn devwar pou vinn get li tonbe. »

D’autres figures publiques ont également dénoncé les méthodes de la SST. Bruneau Laurette, Vimen Sabapati (impliqué dans une saisie de drogue) et Sherry Singh, opposant de Pravind Jugnauth, ont tous crié au complot ou au « drug planting » orchestré par l’équipe Jagai.

Climat de peur

Des voix politiques avaient également dénoncé ces pratiques. En mai 2023, le leader du MMM, Paul Bérenger, alors dans l’opposition, avait averti que toute dérive de la SST devrait être sanctionnée : « Zot aret dimounn brit brit. Si bann Striking Team-la abiz zot pouvwar, zot pou bizin al reponn divan, akoz zis DPP ek lakour kapav deside si enn dimounn koupab ou non. Fer zot travay, pa fer dominer. Ler pou sone, fer atansion. »

En juin 2023, le Premier ministre d’alors, Pravind Jugnauth, répliquait : « Je ne vois aucun climat de frayeur… seuls ceux qui vont contre la loi, les criminels, les trafiquants de drogue et ceux impliqués dans des cas de blanchiment d’argent ont peur. »

Le 1er mai 2024, Navin Ramgoolam annonçait que, s’il revenait au pouvoir, cette unité controversée serait immédiatement dissoute. La même année, Linion Pep Morisien organisait une manifestation à Port-Louis, suivie d’une pétition de l’activiste Ivann Bibi exigeant la dissolution de la SST : « La ligne rouge a été franchie depuis bien longtemps, qu’attend-on pour suspendre la SST ? »

Un chef qui se disait « protecteur »

Dans une interview à TéléPlus, Ashik Jagai s’était défendu avec fermeté : « Sa lekip Striking Team-la li enn danze pou bann mafia ek bann ki protez mafia. Get enn kou kan lapolis trap mafia, seki pe defann zot-la santi zot dan problem. »

Malgré les critiques, il est resté en poste jusqu’au changement de gouvernement. Sous le nouveau commissaire Rampersad Sooroojebally, la SST a été dissoute à la mi-novembre 2024. Le SP Jagai a ensuite été muté à la Division Est, puis à Terre-Rouge, où il servait jusqu’à son arrestation.

Mercredi dernier, il a été arrêté et placé en détention provisoire par la FCC dans le cadre de l’enquête sur le Reward Money. Sa comparution au tribunal de Port-Louis, le lendemain, sous forte escorte et vêtu d’un gilet pare-balles, symbolise la fin d’une époque pour l’unité la plus controversée de la police mauricienne.

 

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