Établi aux États-Unis depuis plusieurs années, le Dr Kapildeo Lotun, un Mauricien qui y exerce comme cardiologue, fait partie de ceux qui sont les premiers à avoir été vaccinés contre la Covid-19. Ce médecin qui avait fait la Une des journaux pour avoir sauvé la vie d’un patient mourant de ce même virus nous parle de son expérience dans l’interview qui suit.
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En tant que ‘frontliner’, vous êtes l’un des premiers à avoir été vaccinés aux États-Unis. Comment vous sentez-vous ?
C’est jeudi qu’on m’a fait le vaccin. Je ressentais un peu de douleur au bras six heures après l’injection. J’ai toujours mal. Puis, après 12 heures, j’ai commencé à faire de la fièvre. J’ai pris des médicaments, je me suis senti mieux et suis même parti travailler. Cependant, c’est tout à fait normal.
Comment s’est déroulée la vaccination ?
Normalement, avant la vaccination, on nous donne un ‘fact sheet’ où on fournit le maximum de détails possible : sur la conception du vaccin, les essais cliniques, les effets secondaires, entre autres. En tant que médecin, bien évidemment, j’ai tout lu. Je savais déjà à quoi m’attendre, même avant la vaccination. Au fait, c’est comme se faire vacciner contre la grippe. Dans ma ville, il n’y a que deux hôpitaux qui ont eu l’autorisation de faire ces vaccins qui doivent être stockés à des températures très basses, soit à -70 degrés. La vaccination se déroule sur l’aire de stationnement. Les personnes n’ont même pas à descendre de leur voiture. On ne laisse personne descendre car on ne sait pas qui est porteur du virus. Une fois la vaccination faite, on vous demande de rester pendant 15 minutes pour vérifier que vous ne faites pas une réaction allergique au vaccin. Une fois ce délai passé, vous pouvez rentrer chez vous et vaquer à vos occupations.
En combien de phases se fait la vaccination ?
En deux phases. La seconde dose se fait dans un délai de 21 à 28 jours. Par exemple, moi je vais me faire vacciner la deuxième dose le 7 janvier prochain. Au fait, pour se faire vacciner, on doit s’enregistrer sur un site Web. Tous nos détails sont sur un système. On nous donne une date pour la première dose du vaccin, aussi bien que pour la deuxième dose.
Je ressentais un peu de douleur au bras six heures après l’injection. J’ai toujours mal.»
Le vaccin est-il obligatoire pour les ‘frontliners’ ?
Ce n’est pas obligatoire. Toutefois, on a la priorité car on est en première ligne dans les hôpitaux. On a affaire à des personnes qui sont peut-être infectées. Comme dit l'adage, mieux vaut prévenir que guérir.
Deux soignants ont développé de graves réactions au vaccin anti-Covid, Alaska, même scénario en Angleterre. Avez-vous eu des appréhensions ?
Non, pas vraiment. Si je devais faire une réaction allergique, cela allait être dans les minutes qui suivent l’injection. D’ailleurs, il faut reconnaître que tous les vaccins ont des effets secondaires. Le vaccin contre la Covid-19 a certes des effets secondaires, mais ils ne sont pas mortels.
L’Amérique est l’un des premiers pays à avoir démarré sa campagne de vaccination contre la Covid-19. Comment s’annonce cette campagne qui a débuté cette semaine ?
Je dois dire que les ‘frontliners’ sont très réceptifs. La dévastation due à ce virus en est pour quelque chose. Les ‘frontliners’ n’hésitent pas à se faire vacciner afin de se protéger, protéger leur famille, les patients et la société en général. Je crois que maintenant, c’est vraiment la lumière au bout du tunnel.
Pourquoi n’avoir pas attendu que l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) donne son feu vert au lieu de la Food and Drug Administration (FDA) ?
Je ne pense pas qu’on s’est précipité. L’Angleterre est le premier pays à avoir démarré sa campagne de vaccination. Ce n’est qu’une semaine après que l’Amérique a débuté le sien. La FDA est une institution de renom mondial. Il y a un processus rigoureux qui a été suivi. L’organisme a examiné toutes les données. Il y a eu plusieurs phases dont les essais cliniques sur quelque 70 000 personnes. Face à la situation délicate aux États-Unis, la FDA a approuvé un ‘Emergency use’ du vaccin. On a déjà 300 000 morts avec la Covid-19. On ne peut attendre que d’autres institutions donnent leur aval face à cette urgence. Dans un premier temps, la vaccination vise à protéger les ‘frontliners’. Dans un deuxième temps, ce sera pour limiter la propagation.
Qui sont ceux qui ont la priorité en sus des ‘frontliners’ ?
Ce sont surtout les personnes âgées. Notamment, celles qui vivent dans des maisons de retraite. En ce moment, la vaccination est ‘targeted’. On souhaite protéger ceux qui sont exposés au virus et les plus vulnérables de la société.
Y aura-t-il assez de doses anti-Covid ?
Oui, on continue la production. Sinon, il y a un deuxième vaccin qui a été approuvé et qui sera sur le marché.
C’est quand même le premier vaccin à avoir été conçu en temps record, n’est-ce pas ?
Effectivement. Les laboratoires ont eu recours à la nouvelle technologie. Une technique différente mais vraiment efficace. On a vu le résultat.
Justement, parlez-nous de la nouvelle technique de vaccination dite ARN messager ?
On prend une séquence de chromosome connue comme ARN messager. On injecte cela dans les cellules comme un virus, provoquant la production de protéine. C’est cela qui active les anticorps, aidant ainsi la résilience au virus.
Est-ce une lueur d’espoir eu égard à la pandémie, vu que les laboratoires ayant conçu le vaccin parlent d’efficacité à 90% ?
Absolument. Cette efficacité survient après la seconde dose. Je ne pense pas qu’on va se débarrasser de la Covid-19. Même avec le vaccin, nous devrons continuer à porter des masques, la distance sociale et le lavage des mains jusqu'à ce que nous ayons un contrôle sur le virus et une immunité collective.
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