Elle avait été confiée à la sœur de sa mère à l’âge de trois ans. Ruwaidah Ramjaun était la prunelle des yeux de ses parents adoptifs, Noor et Salima. Sa rencontre avec Arbaaz Nobeebux (19 ans) bouleversera sa vie. Elle contracte le Nikkah (mariage religieux) le 28 janvier 2018, à 13 ans. Son époux Arbaaz était accro à la drogue. Enceinte de quatre mois, elle a rendu l’âme le mercredi 20 juin.
Ruwaidah Bibi est née le 5 novembre 2004. Elle est confiée à sa tante Salima Ramjaun qui ne pouvait enfanter. Tasleema Peerahamud, sa mère biologique, avoue que cette décision a été prise en 2003, pour protéger ses deux enfants Ruksaar (un an) et Ruwaidah (dont elle était enceinte de deux mois), contre les actes de violence de son premier mari toxicomane (décédé en juin 2010.)
Lorsque Tasleema se sépare de son mari, elle trouve refuge chez sa sœur aînée Salima à Plaine-Lauzun. Elle y demeure pour accoucher de Ruwaidah qu’elle remettra à sa sœur trois mois après.
Salima adoptera légalement le nourrisson qui deviendra la prunelle des yeux de son mari, Noor Ramjaun. « Kan ti baba la ti ena trwa mwa, linn kit li ar mwa. Kan li ti ansintt mem li ti dir li pou donn mwa tibaba la », relate Salima.
Ruwaidah grandit sans savoir que Noor et Salima Ramjaun étaient ses parents adoptifs. Elle est traitée comme une princesse, dans le confort et couverte d’amour. À 8 ans, elle a une crise d’épilepsie. Sa mère lui fait suivre un traitement à l’hôpital Dr A.G. Jeetoo. « Elle avait ses crises deux fois par semaine. » Salima lui accorde la plus grande attention, veille à son éducation. « Ruwaidah était une bonne fille, tranquille, elle nous adorait. Jamais je n’aurais cru qu’elle perdrait la vie ainsi. Li ti touzour lor portab.Kan koz ar li, li pas ekoute. » Le départ brutal de Ruwaidah ruine toutes les espérances des familles Ramjaun et Nobeebux qui s’apprêtaient à accueillir leur premier petit-fils d’ici octobre.
Le grand amour
Ruwaidah fréquentait le collège Madad-Ul-Islam à Port-Louis. Elle avait 12 ans quand elle rencontre Arbaaz Muhammad Ally Farhan Nobeebux sur Facebook. Ils se rencontrent pour la première fois au Caudan. La conversation se poursuit et les messages d’amour pleuvront… sur Messenger six mois durant. « Mo ti bien kontan li. Li ti bien kontan mwa », avoue Arbaaz.
Le 17 janvier, Ruwaidah Bibi se rend rue Cashmere à Goodlands. « Monn vinn promne ». Vient l’après-midi, elle ne veut plus rentrer chez elle. Arbaaz la supplie de rentrer, en vain : « Si mo ale, mo pou swisid mwa ».
Rousdeen Nobeebux, le père d’Arbaaz : «Dimoun pe dir enn ta zafer. Mo krwar dan lalwa kreaterr ek li pou fer la zistis.»
Rousdeen Nobeebux, père d’Arbaaz (49 ans) rentre de Port-Louis. C’est alors qu’il apprend que Ruwaidah est la copine de son fils. Il tente de la raisonner, elle menace de se suicider si elle est renvoyée chez son père Noor. Elle veut vivre avec son grand amour Arbaaz. Elle ne veut pas entendre raison. Rousdeen tente une dernière fois de la convaincre, promettant d’évoquer cette relation avec ses parents. Ruwaidah exige que le mariage se fasse dans deux jours, sinon elle mettra fin à ses jours.
À Plaine-Lauzun, Noor et Salima s’inquiètent : leur fille n’est pas rentrée du collège. Vers 16 heures, ils informent la police. Le même soir, Rousdeen contacte Noor pour l’informer que sa fille est chez lui à Goodlands et lui demande de venir la récupérer. Noor n’ayant aucun moyen de transport est contraint d’attendre le lendemain.
Mariage en moins de deux semaines
L’histoire d’amour étant révélée, les familles Nobeebux et Ramjaun qui aiment leurs enfants se retrouvent dans une situation ambiguë. Ruwaidah menace toujours de se tuer si elle n’épouse pas Arbaaz.
Noor et Salima, ne voulant pas perdre leur enfant bien-aimée, même s’ils estiment qu’elle est trop jeune pour se marier, cède à son chantage émotionnel. « Pou ki zot res ensam, ti bisin fer nikkah selon nou la relizion ».
Le 28 janvier, avec le consentement de leurs parents respectifs, Arbaaz et Ruwaidah (13 ans) contractent le Nikkah, mariage religieux célébré par un imam dans une mosquée à Pailles. Le nouveau couple a droit à une magnifique réception.
Après un mois et demi de vie commune, Ruwaidah souffre de nausées. Arbaaz l’emmène voir un médecin du privé. Elle est enceinte. La nouvelle ravit le jeune père et la famille Nobeebux. « Mo ti kontan pou gagn zanfan la », indique Arbaaz.
Rousdeen aussi avoue la joie de sa famille d’apprendre l’arrivée de leur premier petit-enfant. Il est cependant conscient de la fragilité de sa belle-fille. « Ruwaidah ti enn bon tifi e li ti ena bon manyerr. Li pa ti konn fer louvraz. Mo madam ti montre li. Chaque jour, à mon retour du travail, elle me servait du thé, je l’aimais bien. Je la traitais comme ma propre fille», explique-t-il.
Arbaaz Nobeebux : «Je me droguais»
Si elle filait un parfait amour, la jeune épouse Ruwaidah a dû encaisser une dure réalité : Arbaaz se droguait. Au Défi Plus, ce dernier confie qu’il prenait de la drogue. « Je suis tombé dans ce fléau sous la pression de mes proches. Mo ti pe fim mass. Apre monn koumans pran sintetik, la poud. Mo ti pe soule me mo ti pe kontan sansasion ki ti pe gagne. Monn drog mwapendan huit mois, apres kan mo madam ine vini, mone areter, » assure-t-il.
Toutefois, un proche de son entourage raconte que Arbaaz (dit Toto) est connu dans le quartier pour ses mauvaises fréquentations. « Le jeune homme a souvent des démêlés avec la police. Il pillait sa maison et revendait les affaires de ses parents pour avoir de l’argent afin de s’acheter de la drogue dans une cité de la localité. »
Arbaaz confirme ces dires. Il avoue avoir eu des démêlés avec la police pour un portable volé en sa possession et une autre fois, il a été pris en compagnie d’amis qui étaient ivres.
Entre coups et blessures : les confessions à sa soeur
La même source qui nous révèle l’addiction d’Arbaaz à la drogue indique avoir été témoin de multiples scènes de violence entre Arbaaz et Ruwaidah. « Li ti pe batt li. Li ti pe trenn li. »
Arbaaz se défend, affirme au Défi Plus qu’il y avait des disputesentre eux, comme dans tout couple. « Mo ti pe donn li de ti kalot me zame monn batt li plis ki sa ».
Autre confession de Ruksaar : Ruwaidah avait découvert que Ruksaar et elle portaient les mêmes noms sur leurs actes de naissance. Alors qu’elle jouait dans une chambre avec sa sœur, elle lui aurait dit qu’elle savait toute la vérité : Salima n’est pas sa mère biologique, mais bien Tasleema.
« Quand elle me l’a annoncé, j’ai gardé le silence, car je le savais. Maman me l’avait déjà dit », souligne Ruksaar (15 ans) qui a relaté toute cette confidence à sa mère Tasleema. Au fil des jours, Ruwaidah se lie d’amitié avec sa sœur qui deviendra sa confidente.
C’est là, qu’elle lui dénoncera les actes de violence que lui inflige son époux. « Li ti pe dir ki so misie ine fors li pou marye. Ek li ti pe batt li. Li kokin so kass pou aste la drog. Linn dir moi kiso mari inn menas pou pik li ek kouto si li dir ki li gagn bate. J’ai raconté à maman les souffrances qu’endurait Ruwaidah. »
Tasleema, elle, affirme que Ruwaidah ne la considérait pas comme sa mère et qu’elle n’exerçait aucun droit sur elle. « Mo ti dir pa fer sa maryaz la. Mo pa ti dakor. Monn dir mo ser ki pe ariver. Me mo pas kav fer plis ki sa. »
Mercredi 20 juin : Ruwaidah pousse son dernier souffle à 5h45
Aux petites heures du matin du mercredi 20 juin, Ruwaidah se réveille et demande à Arbaaz de l’accompagner aux toilettes. « Tini mwa. Mo vant pe fer mal ». Ce sont les dernières paroles de Ruwaidah à Arbaaz avant de s’écrouler.
Arbaaz, apeuré, a juste le temps de mettre sa main sous sa tête pour la rattraper et elle pousse son dernier souffle. C’était vers 5h45. Rousdeen accourt pour chercher un médecin, mais il confirme le décès de la jeune fille. Arbaaz éclate en sanglots sous la douleur du décès de sa « femme » et de son enfant. « Monn perdi de dimoun enn sel kout. Mo madam ek zanfan ki mo ti pe atann .»
Rousdeen informe Noor et Salima du décès de Ruwaidah et les somme de venir au plus vite. Toutefois, ce n’est que vers 9 h 30 que le couple Ramjaun arrive à Goodlands. Salima participe au « roussal » qui est le bain mortuaire, avant les funérailles, selon les préceptes de l’islam. Mais ce qui vient chambouler les derniers adieux à Ruwaidah, c’est la présence de Tasleema, sa mère biologique. « Mo ti tifi ti pe dir li gagn bate. Mo ti ena dout lor sirkonstans so la mor. Monn exziz fer lotopsi pou kone vremem kinn arive. »
Rousdeen Nobeebux et sa famille sont perturbées par les dires de Tasleema. « Nou ti fini fer tou seremoni ek lenterman ti bizin leve. Li ti pe insiste pou ki fer lotopsi lopital Candos. » Toutefois, ce n’est que vers 16 heures que la famille Nobeebux a pu reprend le corps de Ruwaidah pour les funérailles. « Medsin lezis inn konfirme ki so la mor natirel. So mama kinn rezet li. Enn sel kou li pe reklam drwa lors so zanfan. Li mem pann rod asiste so lamor kan inn gagn rapor lotopsi. » Tasleema affirme qu’elle a dû trouver refuge chez un voisin pour être à l’abri des signe d'hostilité de la famille Nobeebux à l’égard de ses proches.
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