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Le boom des médecines alternatives

Les médecines alternatives séduisent de plus en plus les Mauriciens.

Les médecines alternatives sont un choix de plus en plus populaire chez les patients mauriciens, constatent les praticiens. En quoi consistent ces approches ? Quels sont leurs avantages ? Quelles sont leurs limites ? Faisons le point.

Le nombre de personnes ayant recours à la médecine ayurvédique a augmenté au cours des dernières années, selon les chiffres du ministère de la Santé. Il s’avère que de plus en plus de personnes développent un réel engouement pour l’utilisation des médecines alternatives - ayurvédique, naturopathie et homéopathie, entre autres - afin de traiter divers maux. 

Que ce soit pour le traitement des maladies non transmissibles telles que le diabète, l’hypertension artérielle, le cholestérol, l’arthrite ou l’arthrose, les problèmes d’indigestion ou encore la toux, ces patients souhaitent se soigner à travers des produits naturels ou les prendre en complément avec des médicaments allopathiques. Cependant, il est déconseillé d’utiliser des produits à base de plantes sans prescription médicale, car cela peut avoir des effets indésirables sur la santé.

Zoom sur des pratiques qui ont gagné en popularité au fil des années. 

La fiabilité de l’ayurvédique 

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Bien qu’à base de plantes, les médicaments ayurvédiques doivent être prescrits.

De plus en plus de patients se tournent vers la médecine ayurvédique, observe le Dr Rhitambhra Gopaul, médecin généraliste en médecine ayurvédique. Cet engouement s’explique par la « méfiance » qui semble s’être installée à l’égard des médicaments allopathiques, considérés comme des produits chimiques.

« Les médicaments chimiques peuvent avoir des effets secondaires, ce qui a engendré une certaine méfiance chez certaines personnes. D’où un plus grand engouement pour la médecine alternative », analyse-t-elle. 

Ceux qui souffrent de diabète chronique depuis plusieurs années peuvent ressentir les effets secondaires des médicaments allopathiques ou ne parviennent pas à s’adapter à certains d’entre eux, ce qui les incite à se tourner vers la médecine ayurvédique, dit-elle en exemple. 

Autre facteur de la popularité de la médecine ayurvédique : les témoignages de bouche-à-oreille, selon elle. D’autres personnes souhaitent également se soigner en adoptant un traitement naturel. 

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Le Dr Rhitambhra Gopaul, médecin généraliste en médecine ayurvédique.

Selon le Dr Gopaul, les produits sont fiables. Les médicaments ayurvédiques suivent les mêmes procédures que les médicaments allopathiques avant d’être acheminés à Maurice. Ils doivent tous détenir un certificat de conformité. 

Il est possible de traiter toutes les maladies par l’ayurvédique, comme les maladies chroniques et les maladies non transmissibles (diabète, hypertension, cholestérol, obésité), mais aussi l’arthrose, l’arthrite et les maladies saisonnières, entre autres, ajoute le Dr Gopaul. Pour soigner les patients, les médecins ayurvédiques suivent les mêmes étapes que les médecins allopathiques : ils les consultent, posent le diagnostic et leur prescrivent des médicaments qui sont à base de plantes. Il y a également une autre branche de la médecine ayurvédique qui propose des traitements avec des minéraux. 

Elle insiste sur le fait que même si les médicaments ayurvédiques sont à base de plantes, tous les médicaments doivent être obtenus sur prescription, que ce soit des produits allopathiques ou naturels. Beaucoup pensent à tort que les produits à base de plantes sont sûrs et peuvent être pris sans danger et sans consulter un médecin, mais c’est une erreur, affirme-t-elle. « On ne peut pratiquer l’automédication, même en utilisant des médicaments à base de plantes. Tous les médicaments doivent être prescrits », souligne le Dr Gopaul. Même si le risque n’est pas élevé, en raison des préparations qui sont effectuées avec un mélange de plusieurs plantes, des effets indésirables peuvent survenir. 

Les doses et la durée d’un traitement doivent également être respectées. « Chaque individu a une constitution, et tout le monde ne tolère pas les mêmes produits de la même manière. C’est pourquoi en ayurvédique, nous proposons des médicaments sur mesure », poursuit le Dr Gopaul. Cela explique pourquoi une consultation préalable avec un médecin et un suivi médical sont nécessaires, ajoute-t-elle.

Les médicaments ayurvédiques et allopathiques peuvent être complémentaires, ajoute-t-elle. Cependant, si une personne n’a pas une tension artérielle contrôlée, le cas est référé à l’hôpital, car cela peut conduire à une situation d’urgence. « Les deux types de médicaments peuvent être complémentaires, mais pas sans consultation médicale. »

Le Centre Ayush 

Le projet de création d’un centre Ayush à Côte d’Or a bien avancé, selon le Dr Rhitambhra Gopaul. Il bénéficie du soutien du gouvernement indien et sera construit sur un terrain de 10 arpents. Ce centre vise à améliorer le système de santé et donner la possibilité d’offrir d’autres traitements aux patients. 

Pour l’instant, les patients utilisant la médecine ayurvédique sont traités en ambulatoire, mais il n’est pas possible de les hospitaliser pour d’autres traitements, dit-elle. « En ayurvédique, il y a deux façons de faire des traitements, palliatif et purification, qui ne peuvent être faits sans l’hospitalisation du patient. C’est ce mode de traitement qui sera introduit à travers le centre Ayush », fait-elle savoir.

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Ayush and other traditional medicine Act

À la suite des amendements apportés au Finance (Miscellaneous provisions) Act 2022, l’Ayurvedic and other traditional medicines Act 1989 est devenu l’Ayush and other traditional medicine Act, l’Ayush englobant les systèmes de médecine suivants : Ayurveda, yoga et naturopathie, Unani, Siddha et homéopathie. Ces amendements ont été apportés en vue de la création du centre Ayush à Côte-d’Or et de l’accent plus prononcé que les autorités veulent apporter à ces types de traitement à Maurice. 

Pour l’instant, seules la médecine ayurvédique, la médecine traditionnelle chinoise et l’homéopathie sont reconnues sous cette loi. Les autres, comme la naturopathie par exemple, attendent toujours cette reconnaissance, mais sont néanmoins considérées comme des thérapies alternatives et autorisées jusqu’à la régularisation du métier.

Ceux qui pratiquent les diverses médecines alternatives doivent détenir un certificat démontrant leurs études dans la profession concernée avant de pouvoir exercer. Or, comme c’est le cas pour certaines professions paramédicales, il n’y a pas d’instances pour les chapeauter et veiller à ce qu’il n’y ait pas d’entorses aux règlements. 
Des demandes faites à plusieurs reprises afin que les praticiens des médecines traditionnelles soient placés sous l’Allied Health Professional Council (AHPC) n’ont pas encore abouti. Des démarches sont aussi effectuées auprès du Traditional Medicine Board. Cela devrait se faire par phase afin que les patients puissent sortir gagnants en se tournant vers ceux qui détiennent les qualifications requises et qui sont dûment enregistrés, explique le naturopathe Imran Abdool. Il déplore qu’à l’heure actuelle, il est difficile de discerner ceux qui détiennent un certificat et les charlatans. 

« Ceux qui pratiquent les médecines traditionnelles doivent obligatoirement se faire enregistrer », ajoute le Dr Rhitambhra Gopaul qui pratique la médecine ayurvédique pour le compte du ministère de la Santé. Selon la loi, le Traditional Medicine Board a été formé pour s’occuper de l’enregistrement des praticiens des médecines traditionnelles. Les herboristes et les naturopathes, par exemple, ne sont pas encore régis sous cette loi car ils ne suivent pas de cours pour obtenir un diplôme, contrairement aux autres médecines traditionnelles. 

Pour les médecins ayurvédiques, c’est le « Bachelor of Ayurvedic Medicine and Surgery » (B.A.M.S).

Les « doshas »

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La pratique de la médecine ayurvédique suit des principes fondamentaux. Tout ce qui existe a été fait de cinq éléments, dont notre corps, qu’il faut comprendre à travers les trois « doshas » principaux : « Vata », « Pitta » et « Kapha », qui peuvent aider à gérer les humeurs biologiques, que ce soit dans la circulation, la respiration ou la digestion. 

Les « doshas » sont des principes fondamentaux qui régissent les processus physiologiques et psychologiques dans le système ayurvédique. Les trois « doshas » principaux sont « Vata » (associé à l’énergie du mouvement, à l’air et à l’éther), « Pitta » (associé à l’énergie du feu et de l’eau) et « Kapha » (associé à l’énergie de l’eau et de la terre). 

En ayurvédique, les trois « doshas » doivent être équilibrés afin que tous les tissus soient également équilibrés, explique le Dr Gopaul. Il y a aussi les excrétions, que ce soit les urines, les selles ou la transpiration, qui ne doivent pas être obstruées. Si tel est le cas, il y a un problème. Dans la définition de la santé, les « doshas », les « dhātus », l’« agni » et les « malas » doivent être équilibrés. À un autre niveau, le « ātman » (le mental ou l’esprit) et les organes sensoriels doivent également être comblés afin d’être en harmonie.

La naturopathie gagne du terrain

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La naturopathie peut traiter les maladies chroniques, dit le naturopathe Imran Abdool.

La médecine alternative englobe la naturopathie, l’ayurvédique, l’homéopathie, la médecine traditionnelle, et les méthodes de grand-mère qui proviennent de la culture mauricienne, mélange de plusieurs traditions millénaires d’Afrique, d’Asie et d’Europe. La naturopathie englobe toutes les formes de médecines traditionnelles telles que le massage, l’aromathérapie, la phytothérapie, la réflexologie, l’iridologie (diagnostic à travers l’iris), la nutrition, explique le naturopathe Imran Abdool. 

Même si la naturopathie n’est pas reconnue « officiellement » à Maurice, elle l’est par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), souligne-t-il. Imran Abdool précise, dans la foulée, que le naturopathe doit être formé au préalable avant de pouvoir exercer. Il doit également posséder des connaissances en biologie, en anatomie humaine et en nutrition, entre autres.

Imran Abdool, qui a contribué à faire connaître la naturopathie à Maurice, explique que les consultations sont similaires à celles de la médecine conventionnelle : le naturopathe pose une série de questions aux patients. Il adopte également une approche holistique pour identifier la cause des symptômes et leurs liens éventuels avec d’autres problèmes. Il garde un dossier médical du patient pour assurer un suivi, si besoin.

Selon le naturopathe, ce type de médecine attire ceux qui ne voient pas d’amélioration durable de leurs symptômes avec les médicaments classiques. Ceux-ci soulagent certains maux, mais ne guérissent pas les maladies chroniques. Il explique que les médicaments allopathiques sont souvent basés sur des molécules naturelles, mais qui ont été modifiées chimiquement. Or, dans la nature, ces molécules ne sont pas isolées, mais associées à d’autres substances bénéfiques. En les séparant, on peut soulager les symptômes, mais pas guérir les maladies. 

La naturopathie, en revanche, peut traiter les maladies chroniques, comme la sinusite, les douleurs articulaires, le diabète, l’hypertension, la maladie de Parkinson, la maladie d’Alzheimer, entre autres. Elle peut s’associer aux médicaments allopathiques. L’OMS décrit d’ailleurs la médecine traditionnelle comme une « Complementary and Alternative Medicine » (CAM) qui vise à complémenter ou remplacer les médicaments allopathiques, explique Imran Abdool. Cependant, prévient-il, la naturopathie ne peut traiter les maladies aiguës. Elle ne convient pas aux personnes qui ont des crises d’asthme, par exemple. 

Les patients qui suivent cette médecine utilisent les produits naturels pendant un temps limité et réduisent la dose progressivement. « La naturopathie vise à équilibrer le système pour que le corps se passe de traitements », affirme Imran Abdool. Elle renforce le système immunitaire et harmonise le système nerveux, la circulation sanguine, la digestion, pour que le corps fonctionne au mieux, ajoute-t-il.

Imran Abdool est d’avis que l’engouement pour la médecine alternative découle également de la méfiance à l’égard des médicaments conventionnels depuis l’avènement de la Covid-19. « Avec la Covid-19 et la vaccination, certains ont commencé à se méfier des médicaments allopathiques à la suite des effets secondaires qu’ils ont eus avec le vaccin, par exemple. Ils ont alors pris conscience des effets secondaires qui sont possibles, d’où leur méfiance. »

Il n’empêche que tout médicament ou produit peut entraîner des effets secondaires. Il cite en exemple qu’un excès de piment peut entraîner une réaction. « Comme il y a diverses variétés de piments, les uns plus forts que les autres, il en est de même pour les autres plantes dont les effets peuvent varier. » De plus, certaines plantes toxiques ne sont pas utilisées, et pour d’autres, il faut respecter le dosage. 

« En naturopathie, tout doit être bien dosé, c’est pour cela que les consultations prennent du temps afin de bien cerner la situation et déterminer quel type de produits il est possible de prescrire ainsi que le dosage », soutient Imran Abdool. 

Afin d’atténuer les éventuels effets secondaires, un seul produit n’est pas proposé aux patients, mais une formulation de plusieurs plantes. Des précautions sont prises, en particulier pour les patients qui ont l’estomac sensible ou qui souffrent de gastrite, par exemple, ajoute le naturopathe. Il affirme que les médicaments naturels peuvent servir à la fois pour la prévention, mais surtout pour les traitements, car la prévention n’est pas une approche ancrée dans les mœurs mauriciennes.

Le naturopathe ajoute qu’en médecine allopathique, il n’est pas conseillé de pratiquer l’automédication ou de proposer un médicament qu’on a utilisé à une autre personne. En revanche, la médecine alternative offre certains remèdes simples et connus, comme une infusion de citronnelle et de gingembre pour la grippe. Toutefois, ce n’est pas recommandé pour ceux qui ont une gastrite. Parfois, une consultation n’est pas nécessaire, surtout pour les petits maux, car on trouve la plupart des ingrédients dans toutes les cuisines et ils sont sans danger pour tout le monde. 

Imran Abdool affirme être très sélectif dans le choix des produits qu’il utilise et qui ne proviennent pas de n’importe quel laboratoire. « J’importe mes ingrédients et nous faisons mêmes nos formulations en fonction des besoins, en capsule ou en solution. » 

Les plantes utilisées sont sûres et il n’est pas tout le temps nécessaire d’avoir l’avis d’un professionnel pour certaines maladies chroniques, avance Imran Abdool. Mais en cas de maladie grave, il vaut mieux consulter pour avoir un suivi.

Quelques remèdes, selon le naturopathe Imran Abdool

  • Foulure : Appliquer du safran vert écrasé ou du mazambron pendant un à deux jours pour éliminer l’enflure et la douleur.
  • Plaies : Application du miel ou des feuilles de baume du Pérou, ou des feuilles de « bred mouroum » (moringa) sur la plaie tous les jours. Les microbes seront éliminés
  • Nausée et vomissements : Faire bouillir de l’Ayapana et boire deux à trois tasses par jour ou une infusion de gingembre ou de graines de fenouil (gros anis)

L’homéopathie adaptée à tous

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Selon le Dr Uzma Zubair, l’homéopathie joue un rôle important en pédiatrie.

L’homéopathie est une médecine naturelle et holistique adaptée à tous, des nouveau-nés aux personnes âgées, y compris les femmes enceintes et allaitantes, affirment les Drs Vidushi Vencatasawmy et Uzma Zubair. « Cette approche médicale considère la personne dans son ensemble, en se concentrant sur tous les symptômes, physiques ou psychologiques, et les médicaments n’ont pas d’effets secondaires ni de risques de dépendance », souligne le Dr Vidushi Vencatasawmy. 

Cette dernière fait savoir qu’en comprenant le corps et ses besoins uniques, l’homéopathie vise à rétablir l’équilibre et à favoriser un bien-être durable. Cette approche peut être utilisée pour différentes maladies ou inconforts tels que :

  • Traumatismes : coup, contusion, douleurs corporelles, rhumatisme, arthrite, douleurs neuropathiques, maux de tête, maux de dos, préparation à l’extraction d’une dent de sagesse ou à une intervention chirurgicale, soins supplémentaires pour une fracture.
  • Troubles anxieux : stress avant les examens, anxiété, troubles du sommeil, crises de panique, problèmes de mémoire ou de concentration.
  • ORL : allergie, grippe, rhume, toux, sinusite, rhinite allergique, asthme, angine virale ou bactérienne.
  • Gynécologie : endométriose, kyste, déséquilibre hormonal, traitement complémentaire pour la FIV, infertilité, inconfort menstruel et ménopause, grossesse, accouchement, soins post-partum pour le baby blues, allaitement.

Pendant leur grossesse, de nombreuses femmes rencontrent des problèmes mineurs, mais qui représentent néanmoins de véritables inconvénients au quotidien, tels que nausées et vomissements durant les premiers mois, problèmes digestifs, hyper salivation, affections gynécologiques (infections fongiques, démangeaisons etc.), constipation, cystite, diarrhée, hémorroïdes, jambes lourdes, crampes, troubles du sommeil, anxiété, douleurs lombaires, problèmes cutanés, chute de cheveux, souligne le Dr Vidushi Vencatasawmy.

« En plus d’un mode de vie sain et d’une alimentation équilibrée, l’homéopathie est une thérapie sûre pour la santé du bébé et de la future mère », recommande-t-elle. Elle précise que l’homéopathie prépare à l’effort, prévient les tensions, accompagne pendant la séance et facilite la récupération.

  • Pédiatrie : dentition, toux, rhume, grippe, allergies, eczéma, coliques, constipation, guérison des ecchymoses, réduction du reflux gastrique du bébé, terreurs nocturnes, hyperactivité (TDAH). Selon le Dr Uzma Zubair, l’homéopathie joue également un rôle très important en pédiatrie. « Les enfants aiment prendre ces médicaments car ils sont sucrés et n’ont aucun effet secondaire », dit-elle.
  • Dermatologie : allergie, acné, eczéma, psoriasis, verrue.
  • Troubles digestifs : brûlures d’estomac, ballonnements et gaz, gestion d’une épidémie de gastro-entérite.
  • Problèmes de transit : SCI, constipation, crise hémorroïdaire.
  • L’homéopathie est également utilisée dans le domaine du sport. Quel que soit leur niveau, l’homéopathie accompagne les athlètes avant, pendant et après la pratique de leur activité.

L’homéopathie peut être choisie pour une approche proactive et holistique de la santé, fait ressortir le Dr Vidushi Vencatasawmy. C’est une façon naturelle de prendre soin de son corps et de son esprit, et de découvrir le potentiel d’une vitalité renouvelée. « Combien d’entre vous sont déjà tombés malades avant un événement où vous aviez d’importantes responsabilités ? Quelqu’un autour de vous a-t-il déjà développé de nouveaux symptômes ou maladies suite à un incident traumatique ? » demande-t-elle. 

Plus de 60 % des maladies sont psychosomatiques, c’est-à-dire déclenchées ou aggravées par notre esprit, soutient-elle. Elle cite des exemples, comme un jeune de 21 ans en bonne santé, sans antécédents de troubles gastriques, qui développe un ulcère gastrique hémorragique à la suite d’une situation stressante au travail pendant un mois. Ou encore une femme de 30 ans en bonne santé qui développe soudainement un diabète à la suite du décès de son mari. « Il existe des médicaments naturels et holistiques tels que l’homéopathie qui sont très utiles dans de tels cas », rassure l’homéopathe. 

Tant les adultes que les enfants peuvent souffrir de troubles psychosomatiques. Ces maladies couvrent presque tous les systèmes du corps. « Que vous soyez confronté à des allergies, des troubles digestifs ou des défis émotionnels, l’homéopathie adopte une vision globale de votre santé, tout en abordant les causes profondes, et non pas seulement les symptômes », avance le Dr Vidushi Vencatasawmy. 

Le Dr Uzma Zubair fait ressortir que la médecine homéopathique est encore assez méconnue à Maurice mais gagne en popularité depuis ces dernières années. Ce qui fait qu’il y a de plus en plus de personnes qui se tournent vers ce type de traitement. Toutefois, précise-t-elle, seuls ceux qui ont un diplôme en homéopathie peuvent pratiquer, et le praticien doit s’enregistrer auprès du Traditional Medicine Board.

L’homéopathie peut être utilisée de quatre manières, expliquent les deux médecins :

  • Traitement indépendant
  • Soins préventifs : utile comme mesure préventive, notamment avant l’hiver ou la reprise d’une activité sportive, avant une compétition ou des examens.
  • Soins palliatifs : l’homéopathie peut être utilisée en soin de soutien pour aider les patients atteints de cancer ou d’autres pathologies terminales à faire face aux effets indésirables de leurs traitements et de leur convalescence. La médecine homéopathique est alors un atout précieux pour améliorer la qualité de vie.
  • Traitement complémentaire avec d’autres méthodes, y compris la médecine conventionnelle.

Jay Mootoosamy, gardien du savoir des plantes au marché de Port-Louis

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Pour l’herboriste, la consommation de tisanes doit être accompagnée d’une discipline alimentaire.

Jay Mootoosamy est herboriste au marché de Port-Louis depuis 25 à 30 ans. Il a suivi la tradition familiale initiée par son arrière-grand-père, venu du sud de l’Inde. Il n’a pas le temps de chômer une fois qu’il est installé derrière son étal, au milieu de ses plantes. 

Affable et ayant le verbe facile, il engage la conversation avec tous les types de clients qui se succèdent rapidement, Mauriciens comme touristes. Sa réputation a en effet dépassé les frontières, ce qui fait qu’il en accueille régulièrement tous les jours. Certaines de ses commandes proviennent de l’étranger.

Les préparations se font sur place et sont suivies de précieux conseils quant à l’utilisation des tisanes, dont la consommation doit être accompagnée d’une discipline alimentaire. Pour l’herboriste, cela ne vaut pas la peine de prendre une tisane pour soigner un mal alors qu’en parallèle, on va continuer à consommer certains produits alimentaires comme de la charcuterie, de la viande, ou encore des boissons alcoolisées. 

« On n’affirme pas que les tisanes vont guérir toutes les maladies, mais elles doivent être accompagnées de cette discipline alimentaire qui est essentielle pour la réussite du traitement », fait-il ressortir. Le traitement suit un cycle lunaire et est effectué selon le principe de la médecine Siddha, qui est originaire du sud de l’Inde.

Dans sa conversation avec ses « patients », il pose différentes questions pour cerner leur problème de santé, mais aussi leurs habitudes alimentaires, ce qui lui sert de consultation et de base ou guide pour les tisanes qu’il peut proposer. Parmi les remèdes : des tisanes contre la cellulite, le rhumatisme, la goutte, l’eczéma, le psoriasis, le stress, le cholestérol et les calculs rénaux, entre autres. 

Parmi les plantes qu’il utilise, il y a l’« Herbe de bouc », le « Fandamane », le « Bigaignon », le « Bois loup », la « Ville Bague », la verveine, la citronnelle, l’« herbe de Flacq », etc. 99 % des tisanes sont récoltées dans la nature à l’état sauvage.

Cependant, précise Jay Mootoosamy, n’importe qui ne peut prétendre être herboriste. Il faut avoir une formation et des connaissances solides dans les plantes pour exercer ce métier. « Cela concerne la santé des personnes, on ne peut leur donner n’importe quoi. »

D’ailleurs, si les clients affluent devant son étal, c’est en raison de la confiance et de la réputation que sa famille a bâties en herboristerie. « Notre réputation n’est plus à faire et cela continue de bouche-à-oreille », affirme-t-il. D’ailleurs, il a même participé à des conférences sur le plan local ou régional à travers l’organisation Plantes Aromatiques à Parfum et Médicinales (PAPAM). Il déplore que si à l’île de la Réunion les herboristes sont reconnus par les autorités étatiques, tel n’est pas encore le cas à Maurice.

Les connaissances se sont transmises d’une génération à l’autre, selon ce qui est pratiqué en Inde. Jay Mootoosamy raconte qu’il a appris le métier d’herboriste depuis sa plus tendre enfance. À l’âge de 8-9 ans, ses parents lui ont montré comment reconnaître les plantes. Il devait aussi les aider au marché, à la sortie de l’école. « Et dès l’âge de 18 ou 20 ans, mes parents m’ont appris comment préparer les formules pour les tisanes. Nous faisons une ‘consultation’ au préalable avant de donner une tisane. Nous devons bien cerner ce dont souffre le client », explique Jay Mootoosamy. 

Il soutient avoir débuté des études en pharmacie, qu’il a arrêtées en cours de route. Il se base aussi sur ce qu’il a appris pour parfaire son métier. C’est ce qui lui permet de proposer ses tisanes en complément des médicaments allopathiques que consomment déjà ses clients.

Cependant, précise-t-il, le métier d’herboriste ne consiste pas à vendre à tout prix une tisane, mais à s’assurer que le produit sera adapté à la personne. « Quand nous pensons que nous n’avons pas les tisanes appropriées pour un cas spécifique, nous ne proposons aucun produit. »

Selon lui, nombreux sont ceux qui préfèrent délaisser les médicaments allopathiques pour se tourner vers les plantes pour essayer de trouver la guérison. Mais certains ont du mal à s’adapter à ce type de traitement qui requiert une discipline alimentaire et qui est un traitement qui prend plus de temps à agir. 

L’herboriste fait également savoir que certaines plantes peuvent engendrer des effets secondaires. Par exemple, ceux qui prennent des antibiotiques ne peuvent pas prendre de tisanes. Il fait ainsi ressortir que même s’il s’agit de plantes, le dosage est important, tout comme les précautions alimentaires. Tout traitement a une durée limitée, souligne-t-il. 

La pharmacie « verte » en pleine croissance

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Une gamme de produits à base de plantes est disponible dans les pharmacies pour traiter divers maux.

«De plus en plus de personnes recherchent des médicaments ayurvédiques ou à base de plantes en pharmacie », constate le pharmacien Arshad Saroar. Cela peut être motivé par des convictions religieuses ou par une prise de conscience que les médicaments à base de plantes présentent moins d’effets secondaires que les produits allopathiques, pense-t-il. 

Il observe une prise de conscience accrue concernant la consommation de médicaments chimiques depuis la pandémie de Covid-19. Cependant, fait-il ressortir, contrairement aux médicaments conventionnels, les médicaments ayurvédiques ne sont pas soumis à des études cliniques avant d’être commercialisés, du fait de leur origine souvent naturelle, dérivée de plantes, de minéraux et d’autres substances. 

De plus, selon Arshad Saroar, il n’est pas possible d’affirmer que les médicaments ayurvédiques sont exempts d’effets secondaires. Mais s’il y en a, ils sont probablement moins néfastes que ceux des médicaments allopathiques, souligne-t-il. 

Parmi les remèdes recherchés, on compte des médicaments pour traiter les maladies chroniques telles que le diabète, l’hypertension artérielle, l’acné et l’infertilité, entre autres, précise le pharmacien. « Les patients se tournent vers les médicaments ayurvédiques lorsqu’ils ne trouvent plus de satisfaction avec les médicaments conventionnels. »

Selon Arshad Saroar, une gamme étendue de produits à base de plantes, provenant de laboratoires réputés, est désormais disponible dans les pharmacies pour traiter divers maux.

Les plantes ne peuvent pas causer plus de mal, selon un médecin

Les médecines alternatives sont considérées comme une forme de médecine, à condition de ne pas nuire aux patients, affirme un médecin généraliste qui a préféré garder l’anonymat. « Si une décoction d’herbe tourterelle est prescrite à un patient, je ne pense pas que cela puisse réellement lui nuire. Cependant, sur le plan psychologique, cela peut avoir un impact », prévient-il.

S’il dit ne pas constater une méfiance envers les médicaments allopathiques, il reconnaît le sentiment de réconfort et de bien-être qu’une tisane peut apporter. D’ailleurs, dit-il, ces produits naturels sont bénéfiques et n’entraîneront pas de complications si les doses sont respectées. 

Toutefois, s’il ne remet pas en question les compétences des praticiens impliqués, il s’interroge sur leurs connaissances en médecine. Pour lui, l’essentiel est que ces types de médecines ne causent pas de tort.

Médecine traditionnelle chinoise : allié naturel de la médecine conventionnelle

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La City Clinique propose des traitements fondés sur la méthode de la médecine traditionnelle chinoise, dont des médicaments à base de plantes.

Outre la médecine conventionnelle, la City Clinique propose des traitements basés sur la méthode de la médecine traditionnelle chinoise. Ceux-ci sont offerts par des spécialistes de Shanghai, tels que le massage Tuina, l’acupuncture, et des médicaments à base de plantes. 

Le Dr Patrick Chui Wan Cheong, de la City Clinic, explique qu’impressionné par la pratique de la médecine traditionnelle chinoise lors d’une de ses visites en Chine en 1995, il a voulu l’implanter à Maurice et la proposer au sein de son établissement. Selon lui, l’acupuncture permet une guérison rapide pour certains maux, et d’ici l’année prochaine, davantage d’accent sera mis sur le traitement des douleurs aiguës et chroniques, qui sont parmi les principaux maux des Mauriciens, selon les spécialistes chinois qui exercent au centre de médecine traditionnelle chinoise de la clinique. 

Parmi ces douleurs, il y a les douleurs sciatiques, lombaires, et autres. La médecine traditionnelle chinoise peut également traiter d’autres maladies telles que l’asthme, l’épilepsie, le syndrome du côlon irritable, la paralysie faciale, entre autres. La toux peut également être traitée par l’acupuncture. 

De plus en plus de patients se tournent vers les médecines alternatives en raison du coût élevé des médicaments conventionnels, observe le Dr Patrick Chui Wan Cheong. De plus, nombreux sont ceux qui, après s’être tournés vers les produits bio, veulent également avoir un traitement avec des produits à base de plantes, dit-il. 

Le Dr Patrick Chui Wan Cheong estime que le centre Ayush, actuellement en gestation, va contribuer au développement de la médecine alternative.

Elles ont adopté les médecines alternatives

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Sophie : « Ce choix a été transformateur »

La médecine alternative a changé sa vie. Sophie raconte que depuis qu’elle a commencé à y recourir, sa santé est bien meilleure. 

« Pendant des années, j’ai souffert de divers problèmes de santé, et malgré les traitements médicaux, je ne trouvais pas de soulagement durable. C’est lorsque j’ai décidé d’explorer des approches alternatives que tout a changé. J’ai découvert la naturopathie. Ce choix a été transformateur pour moi », affirme-t-elle. 

Sophie explique que la médecine alternative lui a permis de comprendre la racine profonde de ses problèmes de santé. « Plutôt que de simplement traiter les symptômes superficiels, je prends le temps de consommer des tisanes qui ont des bienfaits. J’ai également appris à prendre en compte mon alimentation, mon style de vie et mes émotions dans le processus de guérison. Cela a eu des effets positifs sur ma santé physique, mentale et émotionnelle », souligne-t-elle. 

Cela fait maintenant cinq ans qu’elle ne jure que par la médecine alternative. « Je me sens mieux dans ma peau, j’ai plus d’énergie, et mes problèmes de santé chroniques sont sous contrôle. Cela ne veut pas dire que je néglige complètement la médecine conventionnelle, à laquelle j’ai recours quand c’est vraiment nécessaire, mais la médecine alternative a été la clé pour moi pour jouir d’une bonne santé », déclare la quadragénaire.

Angela R. : « Mes enfants ne prennent pas d’antibiotiques »

Angela R., âgée d’une trentaine d’années, a intégré l’homéopathie dans sa vie pour prendre soin de sa famille, en particulier de ses enfants d’un an et demi et de cinq ans. « J’ai choisi cette approche naturelle en raison des effets secondaires des médicaments traditionnels qui affectaient le sommeil et l’appétit de mes enfants », explique l’habitante de Vacoas. 

Ayant en avoir découvert les bienfaits, elle utilise l’homéopathie en parallèle avec des remèdes tels que la camomille, le baume du Pérou, le lait au safran. « Au fur et à mesure, j’ai constaté une amélioration du système immunitaire de ma famille. Depuis deux ans, mon fils n’a pas eu besoin d’antibiotiques, et ma fille, bientôt âgée de deux ans, n’en a jamais pris. »

Angela R. souligne que l’homéopathie prend en compte le style de vie, l’alimentation et d’autres facteurs dans la prescription des granules. 

Elle partage également des conseils sur l’humidité, forte de son expérience avec son fils qui est allergique à la moisissure. « Plutôt que de donner des médicaments, je recommande des méthodes naturelles telles que le nettoyage du nez et un processus complet incluant une alimentation riche en fruits et légumes, l’exposition au soleil et la prise de vitamines », conseille la mère de famille.

Afsana G. : « Je préfère les remèdes de grand-mère »

Afsana G. a une aversion pour les médicaments malgré ses douleurs aux genoux et les petits maux tels que la grippe. Elle est convaincue que les médicaments peuvent entraîner d’autres complications à long terme. À la place, elle préfère recourir à des remèdes de grand-mère.

« Je préfère les remèdes de grand-mère. Par exemple, pour gérer mon taux de cholestérol, j’intègre de l’ail confit dans mon alimentation. En cas de toux, j’utilise du baume du Pérou, et pour les inflammations, je fais appel à une combinaison de lait et de safran. Le miel est également un ingrédient fréquent dans mes préparations à base d’herbes, telles que la citronnelle, entre autres », confie cette grand-mère de 63 ans. 

Elle encourage ses enfants à adopter cette voie également car elle est convaincue que ces remèdes naturels offrent de nombreux bienfaits pour la santé.

Neela Pillay : « Les kystes ont réduit de 80 % »

Neela Pillay, une habitante de Port-Louis, s’est tournée vers l’homéopathie pour sa fille, âgée de 22 ans, qui souffre du syndrome des ovaires polykystiques (SOPK). Les symptômes ont commencé avec l’absence de cycles menstruels. 

« Nous pensions que c’était dû au stress de la maladie de son grand-père à qui elle est très attachée, ainsi qu’aux examens. Nous l’avons faite ausculter par un gynécologue mais sans grand résultat », se rappelle la mère de famille. 

Un jour, elle parle de la situation à son médecin de famille, qui lui recommande une échographie et c’est là que le diagnostic de SOPK est posé. Le médecin suggère de consulter un endocrinologue et prescrit des médicaments pour le diabète. « Ma fille prenait six comprimés par jour. En voyant les autres enfants de son âge jouir d’une bonne santé, elle a commencé à déprimer. » 

Neela Pillay, qui se décrit comme une personne croyante, régulièrement engagée dans la prière, confie que les épreuves que traversait sa fille l’ont affectée mentalement. Un jour, lors de sa pause déjeuner, elle découvre l’homéopathie en lisant un article dans le journal. Elle est intriguée par la possibilité de traiter différentes maladies par cette approche, dont le SOPK. 

« J’ai pris contact avec le médecin et cela fait maintenant trois ans que ma fille suit un traitement avec lui. Cela fonctionne et a réduit les kystes ovariens de 80 % en un an », se réjouit cette mère.

Neela Pillay encourage les autres à considérer les produits naturels sans effets secondaires et explique que le traitement homéopathique de sa fille comprend de petites granules. « Je pense que c’est une voie vers la guérison. Cela a été un grand salut pour nous, en tant que parents, de voir notre fille aller mieux. »

Pooja Gokulsing : « C’est plus bénéfique »

Pooja Gokulsing, âgée de 32 ans, explore des alternatives naturelles depuis le mois d’août, sur les recommandations de ses camarades. L’habitante de Paillote a décidé de s’y intéresser davantage en raison de la maladie d’un proche. 

Avant de se lancer, elle effectue des recherches approfondies et constate que cela coûte moins cher que les traitements médicamenteux. « Au début, je n’ai pas vu de résultats immédiats, mais j’estime que les méthodes naturelles sont plus bénéfiques pour le corps par rapport aux médicaments qui peuvent avoir des effets secondaires », dit-elle. 

La jeune femme conseille également de surveiller son alimentation. « Souvent l’alimentation, à travers la consommation fréquente de fast-food, peut conduire à des problèmes de santé », ajoute-t-elle.

« En sus de l’homéopathie, j’ai commencé à explorer les bienfaits des infusions à base de feuilles », dit-elle. Pour elle, ce sont des approches plus naturelles et holistiques pour le bien-être.

 

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