Laure Pillay, première femme avocate et première femme juge à Maurice, a eu une carrière bien remplie. Elle est aujourd’hui la doyenne du corps juridique du pays. Sa fille aînée, Anne, nous parle de sa mère comme un modèle de droiture qui a toujours milité pour les droits de la femme…
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Me Laure Pillay aura officiellement 100 ans le 20 avril mais en réalité, elle est née le 16 mars 1917. Elle a donc déjà fait son entrée dans le cercle restreint des centenaires du pays. « Comme c’était le cas dans le passé, les parents attendaient plus d’un mois après la naissance des enfants avant d’aller au bureau de l’état civil. Mais c’est un fait que ma mère a déjà 100 ans », nous dit Anne, la fille aînée de l’ex-juge. Et c’est avec une certaine ferveur qu’elle nous parle du parcours de sa mère qui a vécu en Angleterre lors de la Seconde guerre mondiale.
«Quand elle a été nommée première femme juge de Maurice, j’étais hélas en Angleterre. Et c’était un ami qui m’avait annoncé la bonne nouvelle»
En effet, après des études primaires et secondaires à Maurice, elle met le cap sur Londres en 1938 pour des études de médecine au Royal Free Hospital. En 1939, c’est le conflit armé entre les Alliés et l’Axe qui éclata et Laure arrête ses études pour aller travailler au Foreign Office jusqu’en 1945. En 1943, elle épouse Rabindra Pillay, qui exerçait alors au sein de la Royal Air Force. Le couple a eu une première fille, Anne, en 1944. « Ma mère nous racontait comment elle a vécu toute la période de la deuxième guerre mondiale à Londres. Elle a dû faire face à d’énormes difficultés à cette époque mais c’était une femme courageuse », nous dit Anne.
Après la guerre en 1945, Laure Pillay est rentrée à Maurice après plusieurs mois de voyage en mer. « Maman nous racontait toujours que le voyage de Londres à Maurice avait duré plus de deux mois car il fallait passer par plusieurs pays avant d’arriver à Maurice », ajoute Anne.
Première femme avocate
De retour à Maurice, Laure Pillay donne naissance à son deuxième enfant, Milaveni, en 1946. « Mon père est retourné quelques temps après et la famille était à nouveau réunie », souligne Anne. Entre temps, Laure commence à travailler comme enseignante au collège Bhujoharry et ce jusqu’en 1949 quand elle décide d’aller poursuivre des études de droit à Lincoln’s Inn à Londres. De retour au pays en 1955, elle devient la toute première femme admise au barreau de l’Île Maurice. « Nous étions encore des gamines à cette époque mais c’était une grande chose pour la famille. Ma sœur et moi étions au Queen Elizabeth College. Je me souviens que maman était souvent invitée à venir prononcer un discours au collège. C’était un honneur pour nous », relate-t-elle avec une vive nostalgie.
En 1961, Me Laure Pillay vit un heureux événement et devient maman pour la troisième fois (un fils, Radakrishnan). Elle doit alors jongler entre obligations professionnelles et vie familiale. « Ma mère avait conservé toute sa simplicité. Elle aimait faire la cuisine et veillait à ce que ses enfants ne manquaient de rien », ajoute Anne.
Militante des droits de la femme
Au fil des années, Me Laure Pillay avait fait du combat pour le droit de la femme son cheval de bataille. Elle avait représenté Maurice au séminaire « The Role of Women in Africa in the Social and Political Transition between Traditionalism and the Modern World » à Addis Abeba et à Berlin. « Elle était très féministe et tenait à cœur le bien-être de la femme dans notre société. C’était pour cela qu’elle s’était engagée auprès de plusieurs institutions pour que la femme puisse faire valoir ses droits. Elle était un modèle pour nous au sein de la famille », fait ressortir Anne.
En 1967, Me Laure Pillay est nommée District Magistrate et par la suite Senior District Magistrate. « Quand elle a été nommée première femme juge de Maurice, j’étais hélas en Angleterre. Et c’était un ami qui m’avait annoncé la bonne nouvelle. J’étais naturellement comblée de joie », ajoute-t-elle.
Il est bon de faire ressortir que Me Laure Pillay a été également un des membres fondateurs de la Mauritius Family Planning Association (MFPA) et membre de la commission d’enquête sur la drogue aux côtés de Maurice Rault et Pramahunse Bissessur en 1986/87. Dans les années 90, elle a agi en tant qu’Assessor au sein de l’Industrial Relations Commission.
5 petits-enfants et 7 arrière petits-enfants
Laure Pillay est une mère, grand-mère et arrière-grand-mère comblée. Elle vit désormais au Harbour View à Port-Louis et de temps à autre, tous ses proches se rencontrent pour passer du bon temps avec la doyenne de la famille. Elle a cinq petits-enfants et sept arrière-petits-enfants. « La plupart des membres de la famille vivent à l’étranger et quand ils sont en vacances à Maurice, on se rencontre pour aller rendre visite à maman. Malheureusement, à cet âge elle n’arrive plus à se déplacer. Je dois remercier la famille Callychurn qui vit près de chez ma mère et qui veille sur elle à chaque instant », nous dit Anne. Rappelons que Me Laure Pillay est également la sœur du défunt Edwin Venchard, ex-Solicitor General.
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