
Si elle estime qu’une enquête indépendante serait la bienvenue pour clarifier les dires de Rama Sithanen et de Gérard Sanspeur, Laura Jaymangal de Transparency Mauritius pense que le copinage politique chez nous compromet la compétence.
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Comment analysez-vous le problème à la Banque centrale entre les dénonciations des deux principaux protagonistes, Rama Sithanen et Gérard Sanspeur ?
Nous considérons que les dénonciations publiques et les accusations croisées entre deux personnalités de haut niveau de la Banque de Maurice révèlent un manque de transparence et de communication institutionnelle. De tels conflits exposent des failles dans la gouvernance de l’institution et risquent d’éroder la confiance du public. Or, la confiance est déjà très fragile à l’heure actuelle et ce climat d’accusations n’a fait que renforcer ce sentiment de malaise et d’inquiétude au sein de la population.
Il est donc essentiel que les informations liées à la gestion de la Banque centrale soient rendues accessibles de manière claire, indépendante et factuelle. Des enquêtes indépendantes doivent également être menées afin de vérifier les dires de chaque partie et de rétablir la confiance du public sur la base de faits vérifiés plutôt que d’accusations personnelles.
Des enquêtes sur la Silver Bank et la MIC seraient-elles nécessaires pour savoir où sont passées ces milliards de roupies offertes sans retour ?
Lorsqu’il s’agit de fonds publics, la transparence et la reddition de comptes ne sont pas optionnelles, mais essentielles. Chaque citoyen est en quelque sorte un investisseur de ces ressources et il est donc légitime d’attendre que leur utilisation soit clairement expliquée et justifiée. Dans ce contexte, des enquêtes menées correctement, avec indépendance et rigueur, sont nécessaires afin de s’assurer que les décisions ont été prises dans l’intérêt général et qu’aucune irrégularité n’est restée sans réponse. Plus encore, la qualité de ces enquêtes est déterminante pour restaurer et maintenir la confiance du public.
La Financial Crimes Commission (FCC) pourrait-elle parvenir à retracer les fonds du « reward money » ?
La FCC doit démontrer son indépendance et ses capacités techniques pour traiter ce type de dossiers sensibles. Elle a, en théorie, les pouvoirs nécessaires pour investiguer et remonter les traces des fonds. Cependant, son efficacité dépendra de la volonté politique, de l’accès à des informations financières détaillées et de la coopération avec d’autres institutions publiques. Il est important de rappeler que le rôle de la FCC est fondamental dans la lutte contre la corruption et les crimes financiers. Or, cette institution est déjà très sollicitée et surchargée par de nombreux dossiers. Pour qu’elle puisse mener à bien ses enquêtes, il est essentiel de s’assurer qu’elle dispose des capacités, des ressources humaines et des moyens techniques suffisants. Elle a également besoin d’une autonomie réelle, sans interférence, afin de mener ses enquêtes de manière crédible.
Maurice peut-il mettre à mal les narco-trafiquants sans l’aide de whistleblowers ?
Les whistleblowers jouent un rôle indispensable dans la lutte contre le trafic de drogue. Leur témoignage permet souvent de révéler des réseaux complexes, de dépasser les barrières du silence et de mettre au jour des complicités institutionnelles. Sans une loi robuste pour protéger les lanceurs d’alerte et sans mécanismes clairs de dénonciation sécurisée, la lutte contre les narco-trafiquants restera limitée. Transparency Mauritius rappelle qu’elle a déjà proposé un projet de loi sur le whistleblowing et réitère son appel à ce que celui-ci soit adopté et appliqué. Nous restons pleinement disponibles pour collaborer avec les autorités concernées afin d’assurer que cette loi soit efficace et protège réellement ceux qui signalent des actes de corruption ou de criminalité.
Faut-il encore faire des nominations sur la base du copinage politique ?
Transparency Mauritius souligne que le problème n’est pas les nominations en soi, mais la manière dont elles sont effectuées. Le copinage politique mine la compétence, l’indépendance et la crédibilité des institutions. Il est donc essentiel que les nominations soient guidées par des principes de transparence, que les critères et les justifications soient accessibles au public et que chaque citoyen puisse comprendre pourquoi une personne est choisie pour un poste stratégique.
Afin de garantir l’intégrité du processus, Transparency Mauritius recommande la mise en place de mécanismes indépendants de « checks and balances », tels que : un examen parlementaire des nominations à travers des comités spécifiques, la tenue d’entretiens publics des candidats, la publication des justifications de chaque nomination et la possibilité pour le public ou les instances concernées de contester légitimement un choix lorsque cela est justifié. Une telle approche protège les institutions contre le favoritisme et renforce la confiance du public dans les organes de décision.

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