La musique indienne est en deuil. La « Nightingale of Bollywood » (Rossignol de Bollywood), Lata Mangeshkar, a rendu l’âme ce dimanche 6 février, au matin, au Breach Candy Hospital à Mumbai, Inde. Son décès survient après une hospitalisation prolongée due à la Covid-19. La reine de la mélodie a présenté des symptômes et a été testée positive au nouveau coronavirus le 8 janvier dernier.
Nathalie Marion-Mungur, Rajmeela Seetamonee et Caroline Duval-Paul
L’annonce de son décès a plongé plus d’un dans la tristesse. Lata Mangeshkar a marqué au moins deux générations. Des personnalités mauriciennes ont eu l’occasion de la rencontrer ou ont tenté de s’entretenir avec elle, tandis que d’autres sont des fans incontestés. Voici quelques témoignages :
Lady Sarojini Jugnauth: « J’ai vu Lata Mangeshkar lors de ma première visite en Inde »
Lady Sarojini Jugnauth apprécie les chansons en hindoustani. Elle a surtout un faible pour les titres d’antan notamment le volumineux répertoire de Lata Mangeshkar. Elle raconte qu’elle a eu l’occasion d'assister à un évènement où Lata Mangeshkar était également présente. C’était dans les années 70.
« Lors de ma première visite en Inde, j’ai vu Lata Mangeshkar dans une cérémonie. Je l’ai vue de loin. Elle était en compagnie de sa sœur Asha Bhosle. J’étais animée d’un sentiment indescriptible. J’étais heureuse d’avoir pu croiser cette chanteuse qui a contribué à façonner la musique à Bollywood », explique-t-elle.
« Sa voix d’or lui a valu le titre de « Nightingale of Bollywood », ajoute Lady Sarojini Jugnauth. Elle estime qu’il n’y a pas deux comme la chanteuse. « Lata Mangeshkar était une chanteuse exceptionnelle et dont la contribution musicale s’étend sur plus de cinq décennies. Quand sa chanson résonne, il est difficile de ne pas fredonner l’air, interpréter quelques paroles ou même bouger », dit la maman du Premier ministre Pravind Jugnauth.
Parmi les nombreux morceaux de Lata Mangeshkar qu’elle apprécie, elle cite « Ajeeb Dastan Hai Yeh » et « Dil Apna Aur Preet Parai » du film « Dil Apna Aur Preet Parai » (1960). « Sa voix ajoutait une touche colorée, chaleureuse et de la gaieté aux paroles », confie Lady Sarojini Jugnauuth.
Dr Ouma Seebaluck, auteure : « Je me suis entretenue avec elle après sa séance de prières »
Il y a plus de 20 ans, Dr Ouma Seebaluck a eu l’occasion de rencontrer Lata Mangeshkar à son domicile. La Mauricienne travaillait alors comme directrice régionale pour la compagnie d’aviation Air Mauritius à Mumbal. Âgée de 71 ans, Dr Ouma Seebaluck confie qu’elle habitait alors à Bandra et le bureau se trouvait à Nariman Point. « La demeure de la chanteuse se situait entre ces deux endroits. Lata Mangeshkar n’a pas tardé à répondre positivement à ma requête d’entretien. Elle m’a demandé de venir chez elle aux alentours de 10 h 30. Elle portait un sari blanc. Et, je me suis entretenu avec elle après sa séance de prières », se souvient notre interlocutrice qui a récemment lancé son livre « Bollywood and Its Global Impact ».
Les deux femmes ont partagé une tasse de thé et ont discuté longuement. « Lata Mangeshkar me disait qu’elle a beaucoup entendu parler de Maurice, mais elle n’a jamais eu l’occasion de visiter l’île. Cela lui aurait fait plaisir de découvrir Maurice. Cependant, elle n’a pu accepter notre invitation en raison de son âge avancé et sa santé fragile », relate Dr Ouma Seebaluck. Elle retient d’elle l’image d’une chanteuse humble, gentille et posée. Elle voit en la chanteuse la déesse de la musique Saraswati.
Mookhesswur Choonee : « Je souhaitais inviter Lata Mangeshkar pour les célébrations de la fête de l’indépendance de Maurice »
Dès l’annonce du décès de Lata Mangeshkar, Mookhesswur Choonee songe à organiser une soirée musicale. En tant que président de Global Organization of People of Indian Origin (GOPIO) International, il souhaite rendre hommage à l’interprète de « Tujhe Dekha To ». « Je souhaite réunir des artistes mauriciens sur la scène pour entonner les chansons populaires de Lata Mangeshkar. Je pense solliciter le soutien de l’ambassade de l’Inde à Maurice », dit-il. Il compte prendre en considération les restrictions sanitaires et prévoit un concert diffusé en ligne.
Mookhesswur Choonee dit avoir déjà tenté de lancer une invitation à Lata Mangeshkar pour se produire à Maurice. Il était alors ministre des Arts et de la Culture. Il s’est rendu chez Lata Mangeshkar en Inde au début des années 90’. Mais elle n’était pas au pays. « De ce fait, j’ai rencontré ses sœurs, dont Asha Bhosle. Elle m’a parlé de son expérience à Maurice. Je lui ai dit que je souhaitais inviter Lata Mangeshkar pour les célébrations de la fête de l’indépendance de Maurice. Mais les négociations n’ont pas abouti », se souvient-il. L’ancien ministre rappelle que la chanteuse avait un répertoire des chansons patriotiques comme « Vande Mataram » (1952), « Ae Mere Watan Ke Logon » (1963) et « O Mera Rang De Basanti Chola » (1965).
Claudio Veeraragoo, artiste : « Lata Mangeshkar a été une inspiration pour moi »
Âgé de 76 ans, le chanteur Claudio Veeraragoo, a eu le cœur gros quand il a appris le décès de celle qui a été une inspiration pour lui. Il se souvient que quand il était encore très jeune, il écoutait les chansons de Lata Mangeshkar sur une chaîne de radio en Inde, « Akash Bari ».
« Dans les années 50, on arrivait à capter la chaîne de radio indienne Akash Bari’, où on passait les nouvelles chansons. Le soir vers 19 heures, on écoutait les chansons de Lata Mangeshkar. À l’époque c’est Lata Mangeshkar, qui était la plus grande voix féminine. Amateur de cinéma, j’ai connu ses chansons à travers les films également. Elle a été une inspiration pour moi », se souvient Claudio Veeraragoo.
Et, à chaque fois qu’il entend les titres de Lata Mangeshkar, Claudio Veeraragoo, se remémore les années d’antan.
« Je revois ma mère préparer le thé et les ‘dipin frir’. Nous sommes là scotchés à la radio. »
Quand l’interprète de « Bhai Aboo » intègre un orchestre oriental comme accordéoniste dans les années 1960, il accompagne l’orchestre sur les titres de Lata Mangeshkar. Plus tard, plusieurs de ses compositions, sont créées avec cette touche orientale, inspirée des grands du monde de Bollywood, tels que Mohammed Rafi et Lata Mangeshkar.
« D’ailleurs, dans mes compositions, il y a toujours eu cette touche orientale. C’était impossible de ne pas être inspiré par une des plus grandes voix de Bollywood », confie Claudio Veeraragoo.
Nikhil Shibnauth, chanteur de 29 ans : « Ce n'est pas pour rien qu'on la surnommait la Nightingale' de Bollywood »
Nikhil Shibnauth, chanteur du groupe The Boys Unplugged est connu pour ses reprises de chanteurs de Bollywood. Il confie que tous ceux qui ont été en contact avec la musique bollywoodienne ont chanté au moins une des chansons de Lata Mangeshkar.
« Ce n'est pas pour rien qu'on la surnommait la Nightingale de Bollywood. Ces chansons ont traversé plusieurs générations et marquées des ères musicales. D'ailleurs, elles figurent dans mon répertoire lorsque j'ai des prestations. »
Pour lui, c'est une des seules chanteuses qui a fait la transition entre la période classique de Bollywood et la musique moderne.
« Ses chansons correspondent à mon style. Je ne m’en lasse pas. C’est une grande perte pour la musique indienne. C’est la ‘female voice of Bollywood’ par excellence qui s’en est allée », regrette-t-il. La chanson qui l’a le plus marqué de la chanteuse est « Raina beeti jaye » du film Amar Prem.
Dr Varsharanee Bissessur-Doolooa : « Elle restera toujours ancrée dans le monde de la musique indienne »
Dr Varsharani Bissesur-Doolooa est une passionnée de musique bollywodienne depuis sa plus tendre enfance. Ayant grandi dans une famille de chanteurs, elle a participé à de nombreuses compétitions.
« Quelle coïncidence que lors de ces compétitions organisées par la télévision nationale, je chantais la plupart du temps des chansons de Lata Mangeshkar du haut de mes 13 ans. Notamment 'O sajna barkha bahar aayi', ' Yaara sili sili' ou encore ' Suniyo Ji Araj Mhari'. »
C'était aussi le choix de ses parents qui l'ont initié aux chansons de Lata Mangeshkar depuis son plus jeune âgé.
« J'ai grandi en écoutant ses chansons. Son style, sa voix... elle m'a vraiment manqué tout le long de ma carrière. D'ailleurs mon interprétation de 'Suniyo Ji Araj Mhari' m'avait valu le premier prix à un concours de chant », raconte le Dr Varsharani Bissesur-Doolooa.
Aujourd'hui, même les plus jeunes interprètent ses chansons dans plus de 36 langues.
« Ses chansons ne mourront jamais. Elle restera toujours ancrée dans le monde de la musique indienne. »
Vanida Thoplan : « Pas plus tard que samedi nous chantions une de ses chansons »
Vanida Thoplan, 30 ans, chante depuis l'âge de 5 ans. Elle n'en revient pas. « J'interprète ses chansons depuis que j'ai commencé à chanter. D'ailleurs je pense à 'Tere bina zindagi se koi'. Ses chansons m'ont accompagnée durant toute ma carrière musicale. J'ai appris à chanter en écoutant ses morceaux. »
Pour la chanteuse Vanida Thoplan, Lata Mageshkar reste la reine de la musique indienne classique. « Ses chansons dégagent une certaine paix et sérénité. La musique ne connaîtra pas une deuxième chanteuse qui lui arrivera à la cheville. Elle a su forger le respect de plusieurs générations. Pas plus tard que samedi, nous chantions une de ses chansons avec mon groupe lors d'un événement. »
Neeshi Beeharry : « J'ai grandi avec ses chansons et je suis vraiment triste d’apprendre sa mort »
'Mere khwabon mein', 'Ek Pyar Ka Nagma', 'Humko Hamise Chura Lo' font partie des chansons préférées de la comédienne Neeshi Beeharry. « Je suis encore sous le choc. Lata Mangeshkar était 'The nightingale of Bollywood'. Sa voix a fait chanter, vibrer, danser et pleurer des générations. »
Elle pense notamment aux nombreuses actrices de Bollywood à qui Lata Mangeshkar leur a prêté sa voix.
« J’ai grandi avec ses chansons et je suis vraiment triste d’apprendre sa mort. C’est la fin d’une époque. Mais, ses chansons la garderont vivante dans nos cœurs. Que cette 'Queen of Melody' repose en paix. Peut-être que Dieu voulait aussi entendre sa voix unique ».
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