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La Valette : Village intégré devenu «bidonville»

La Valette

Petit village lancé sur une base pilote en avril 2009 à Bambous par la National Empowerment Foundation, La Valette est à l’abandon. Vols, violence, trafic de drogue, prostitution y ont libre cours. Pour les habitants de Bambous, le village intégré est devenu un « bidonville ».

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Situé à 1,2 km de la route royale de Bambous, le village intégré de La Valette inspire la frayeur. Même des policiers n’osent s’y aventurer. L’agression sanglante dont un individu y a été victime il y a quelques jours, est sur les lèvres de tout le monde. Cet individu a été frappé à coups de sabre et de gourdins sur le dos. Des habitants du village intégré sont soupçonnés d’être derrière cette agression. La police a, d’ailleurs, mis la main sur quatre d’entre eux. Ces derniers sont soupçonnés de faire partie d’un gang qui sévit loin de La Valette.

Joyce Dieudonné et Léandras, habitantes de la Valette.

 

Rencontré en face du supermarché de la région, Prem, un commerçant, ne mâche pas ses mots envers les habitants du village intégré. Le sexagénaire, domicilié à cité La Ferme, avance qu’il « y a de tout à La Valette » : prostitution, trafic de drogue, vols, violence et mères célibataires, dont les plus jeunes sont âgées de 12 ans.

« C’est devenu le pire quartier de Bambous ! Personne n’ose y mettre les pieds par crainte d’être agressé, ou encore, d’être victime de vol. Mais tout le monde n’est pas pareil. Il y a de bonnes personnes. Mais ceux ayant l’esprit tordu ternissent l’image du quartier. D’ailleurs, en raison des agissements de cette poignée de personnes, on a tendance à croire que La Valette est devenu un bidonville, sauf qu’il n’y a pas de baraques entassées », se désole le retraité de 68 ans. « Auparavant, les gens disaient que la pire région du village de Bambous était Geoffroy ou encore cité La Ferme. Mais depuis ces six dernières années, c’est le village intégré de La Valette qui est sur les lèvres de tout le monde », poursuit-il.

« Coupés » du monde

Un jeune du village qui a été agressé aux sabres la semaine dernière.

Inauguré le 16 avril 2009, le village intégré accueille non seulement des squatters des faubourgs de la capitale, mais également des locataires à faibles revenus qui souhaitent obtenir un logis convenable. 198 familles y ont été relogées. Le village est pourvu d’eau potable, d'électricité et d’une garderie. Les enfants fréquentent l’école primaire Bambous A et Bambous B. Mais au fil du temps, le paradis qui se dessinait s’avère être un enfer pour certains habitants. Les autobus en direction de Port-Louis et Rose-Hill sont desservis à six heures spécifiques de la journée et les habitants voyagent à bord des taxis marrons pour Rs. 13, le montant de la course.

Les diplômés ont du mal à trouver du travail en raison de leur lieu de résidence, affirment des jeunes au chômage.

Joyce Dieudonné fait du social dans le village intégré. Si la mère de famille admet que des fléaux rongent la région, elle dément toutefois l’existence d’un réseau de prostitution impliquant des mineures. « Le village de La Valette a perdu son charme d’autrefois. Il n’y a aucun développement et tout le monde s’occupe de ses affaires. C’est désolant, étant donné que nous avons autrefois suivi un cours en matière de savoir-vivre, dispensé par les autorités, avant même de venir  vivre dans notre nouvelle maison », se désole l’habitante de La Valette.

Léandras, qui est une mère célibataire de quatre enfants, abonde dans le même sens que Joyce Dieudonné. Elle a la langue bien pendue. « Les fléaux existent bel et bien dans la région. Mais n’exagérons pas ! Il n’y a qu’une dizaine de familles qui agissent bizarrement dans le quartier. C’est tout ! Ce sont elles qui ont tendance à croire que La Valette est le Far West et font ce que bon leur semble. Des fois, nous avons tendance à croire que nous vivons dans un bidonville à cause de la mentalité de certains habitants. Mais c’est dommage, triste et révoltant qu’on mette tout le monde dans le même panier », dit-elle.

Le conseil du village réagit Sollicités par Le Défi Plus, les conseillers du village de Bambous condamnent les agissements qui nuisent à l’harmonie sociale de la localité. Selon ces conseillers, ils veulent éradiquer le cartel qui sévit dans la région et ont alerté l’état-major de la police, réclamant des patrouilles régulières dans toutes les régions de Bambous durant la journée, mais surtout la nuit. « Ces cas de violences répétitifs donnent une mauvaise image du village de Bambous. Il faut, une fois pour toutes, arrêter tout cela ! », tonnent-ils.

Entre-temps, le Central Criminal Investigation Department (CCID) enquête sur un ou plusieurs gangs qui sévissent la nuit en dehors de la région de La Valette. Le cartel comprend des jeunes âgés entre 15 et 20 ans. Leur mode d’opération est le suivant : ils accostent les habitants avec des armes tranchantes (sabres et couteaux) et parfois des gourdins, réclament des cigarettes. Ils profitent de l’occasion pour rosser leurs victimes tout en les dépouillant de leur argent. « Ces jeunes veulent s’affirmer et revendiquer leurs bases. D’ailleurs ils sont soupçonnés d’avoir peint le terme ‘Ghetto 93’ sur un abribus de la région. À travers ce slogan, utilisé dans les ghettos en France, ces jeunes veulent marquer leur territoire à travers des actions coup de poings » , indique un policier de la région sous le couvert de l’anonymat.

La semaine dernière, la police a mis la main sur quatre jeunes habitant La Valette. Ils sont soupçonnés de faire partie du gang qui a été impliqué ldans un cas de violence. Ils ont laissé un habitant de Bambous pour mort sur l’asphalte après l’avoir battu. Ces jeunes ont été appréhendés à la suite des renseignements obtenus par la police et grâce à des patrouilles régulières dans le village. Une dizaine de jeunes, vivant à La Valette, sont activement recherchés par la police. Ils sont soupçonnés de « semer la terreur » dans la région.

La National Empowerment Foundation : « Des suivis ont lieu»

La National Empowerment Foundation (NEF) dément le fait que les habitants de La Valette sont livrés à eux-mêmes.

« L’institution a fait, fait et continue à faire des suivis en ce qui concerne le bien-être des habitants », diront des préposés de la NEF. Selon ces derniers, le conseil de district de Rivière-Noire a toutefois un droit de regard sur le village intégré étant donné que celui-ci se situe dans la région de Bambous. Mais Joyce Dieudonné et Léandras se demandent pourquoi les habitants de la région, qui étaient jadis squatters et locataires de maisonnettes, doivent débourser une somme mensuelle de Rs 800, qui augmente par Rs 100 annuellement. « Les autorités doivent revoir la contribution mensuelle des habitants car certains d’entre nous ne peuvent pas régler la note exigée », déplorent les deux mères de famille.

 

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