À la State House : le pape plaide pour «une meilleure répartition des revenus»

C’est non seulement en tant que leader religieux, mais aussi comme chef de l’État du Vatican que le pape François a pris la parole devant les autorités gouvernementales, le corps diplomatique et des membres de la société civile réunis au Château du Réduit, lundi après-midi.

Prononçant son discours devant le président de la République par intérim, Barlen Vyapoory, et le Premier ministre, Pravind Jugnauth, le souverain pontife a touché plusieurs thématiques fortes. Parmi, le savoir-vivre ensemble, la paix, la protection des migrants, un développement économique inclusif et l’écologie.

« Heureux de rencontrer votre peuple »

Le pape François exprime toute sa joie de pouvoir, « grâce à cette brève visite, de rencontrer votre peuple, caractérisé non seulement par un visage multiforme sur le plan culturel, ethnique et religieux, mais, surtout, par la beauté qui vient de votre capacité de reconnaître, respecter et harmoniser les différences existantes selon un projet commun ».

Touchant brièvement l’histoire du pays, le souverain pontife rappelle que le peuple mauricien est « né avec l’arrivée de migrants venus de divers horizons et continents, porteurs de leurs traditions, de leurs cultures et religions et qui ont appris, peu à peu, à s’enrichir de la différence des autres ».

Le vivre-ensemble mauricien fait du pays un exemple pour tous. « Vous possédez une voix faisant autorité capable de rappeler qu’il est possible de parvenir à une paix stable à partir de la conviction que la diversité est belle quand elle accepte d’entrer constamment dans un processus de réconciliation, jusqu’à sceller une sorte de pacte culturel qui fait émerger une diversité réconciliée ».

Bienveillance envers les migrants

Ce constat permet au saint père de dresser un parallèle avec les travailleurs étrangers. « Je vous encourage, dans la fidélité à vos racines, à relever le défi de l’accueil et de la protection des migrants qui aujourd’hui viennent ici pour trouver du travail et pour beaucoup d’entre eux, de meilleures conditions de vie pour leurs familles ».

Il est essentiel que ceux-ci soient accueillis « comme vos ancêtres ont su s’accueillir les uns les autres, comme protagonistes et défenseurs d’une véritable culture de la rencontre qui permette aux migrants et à tous d’être reconnus dans leur dignité et dans leurs droits ».

« Oasis de paix »

Le pape François salue « la tradition démocratique instaurée depuis l’Indépendance et qui contribue à faire de l’île Maurice une oasis de paix ». Une fois ce constat fait, le souverain pontife fait le vœu que cet art de vivre démocratique puisse être cultivé et développé. Et cela ne peut se faire sans « lutter contre toutes les formes de discrimination ».

Message aux politiciens

Dans son discours, le pape François avait aussi un message fort pour ceux qui sont engagés dans le jeu politique du pays. Il leur demande d’être « un exemple pour celles et ceux qui comptent sur vous, en particulier les jeunes. Par votre comportement et par votre volonté de combattre toutes les formes de corruption, puissiez-vous manifester la valeur de l’engagement au service du bien commun et être toujours dignes de la confiance de vos concitoyens ».

Un développement économique pour tous

Maurice a connu un « fort développement économique » certes, mais cela n’a pas profité à tout le monde, déplore Sa Sainteté. Certains sont, malheureusement, restés à quai. « Il semble souvent que la croissance économique ne profite pas toujours à tout le monde et mette même de côté – par certaines stratégies de sa dynamique - un certain nombre de personnes, en particulier les jeunes ». Et c’est pourquoi le pape François appelle les dirigeants mauriciens à « promouvoir une politique économique axée sur les personnes et qui soit en mesure de favoriser une meilleure répartition des revenus, la création d’emplois et la promotion intégrale des plus pauvres ».

Il encourage les politiciens à « ne pas succomber à la tentation d’un modèle économique idolâtre qui ressent le besoin de sacrifier des vies humaines sur l’autel de la spéculation et de la simple rentabilité, qui ne prend en compte que l’avantage immédiat au détriment de la protection des plus pauvres, de l’environnement et de ses ressources ».

Une « conversion écologique intégrale »

Pour sauvegarder la beauté de Maurice et ne pas céder à la tentation du développement au détriment de l’environnement, le pape François pousse pour la « mise en œuvre d’une conversion écologique intégrale ». Cela vise non seulement à éviter de « terribles phénomènes climatiques » ou des « catastrophes naturelles majeures », mais cherche aussi à « promouvoir un changement de mode de vie afin que la croissance économique puisse réellement profiter à tous, sans risquer de causer des catastrophes écologiques ou de graves crises sociales ».