À la rue en plein confinement : une mère et sa fille de 5 ans passent la nuit dans une voiture

C’est une nuit que mère et fille ne sont pas près d’oublier. Mises à la porte par leur propriétaire après le départ du compagnon de la mère, les deux ont passé la nuit dans la voiture, malgré tous les risques que cela implique. Insistant qu’elle n’est pas une femme battue, elle explique qu’elle a eu beaucoup de difficultés pour trouver un endroit où aller. Seules, elles doivent recommencer une nouvelle vie…

« Le propriétaire nous a dit que nous devions récupérer ce qui restait et que s’il avait un autre locataire entre-temps, il jetterait toutes nos affaires. »

Elle a déjà vu des reportages sur des femmes en détresse, ou qui vivent dans la rue, mais elle n’avait jamais imaginé qu’un jour cela pourrait lui arriver. Maria (prénom modifié) précise qu’elle n’a jamais connu une situation similaire dans le passé, même si elle a rencontré bien de difficultés dans sa vie. Cette trentenaire relate que cet incident s’est malheureusement produit à l’heure où le pays est en confinement et qu’au cas contraire, elle aurait pu trouver des alternatives. Encore très troublée par la situation, elle a attendu quelques jours avant de nous en parler.

Maria raconte qu’elle s’est mise en couple avec une personne depuis quelque temps : « Tout se passait bien et j’ai eu envie une fois encore de croire en l’amour. Cette personne m’a convaincue que tout se passerait bien et j’ai accepté d’emménager avec lui. » Elle ajoute cependant que son compagnon ne faisait pas l’unanimité au sein de sa famille. « À un certain moment, j’ai choisi d’écouter mon cœur et de croire en ses paroles », dit-elle. Elle ne rencontre pas de problème majeur, jusqu’au jour où, sans crier gare, cet homme décide de l’abandonner.

« Il a décidé de partir et de nous quitter sans aucune explication. Apparemment, il avait eu des ennuis avec le proprio et quelques jours après son départ, ce dernier nous a demandé de quitter les lieux. » Maria avance qu’elle a tenté de lui faire entendre raison : « Je lui ai demandé de ne pas se venger sur nous, car s’il a eu un problème avec mon compagnon, ma fille et moi n’en étions pas responsables. Mais il n’a rien voulu entendre. Il m’a donné cinq jours pour m’en aller et secrètement, je pensais qu’il allait revenir à de meilleurs sentiments. »

Maria avance qu’elle a demandé de l’aide à des proches et amis, mais tout le monde avait une bonne raison de ne pas les accueillir : « J’ai eu beaucoup de soutien au téléphone. Tous me disaient des mots d’encouragement, mais quand je leur demandais de nous accueillir quelques jours chez eux le temps de trouver quelque part où aller, il n’y avait plus personne. Au final, les cinq jours se sont écoulés sans que j’aie pu trouver une solution. » Nous sommes alors le 28 mars. La jeune femme et sa fille prennent quelques affaires et quittent la maison. « Le propriétaire nous a dit que nous devions récupérer ce qu’il restait et que s’il avait un autre locataire entre-temps, il jetterait toutes nos affaires », explique-t-elle.

C’est ainsi que Maria se retrouve à la rue avec son enfant. Ce soir-là, mère et fille passent la nuit dans la voiture. En pleurs, elle nous raconte comment elle a menti à l’enfant pour que celle-ci garde son calme. « Elle était un peu agitée et ne comprenait pas ce qui se passait. Je lui ai dit qu’on faisait un jeu. Cela me faisait de la peine de lui dire autant de mensonges, mais je ne savais pas comment réagir face à cette enfant qui n’avait pas du tout mérité cette situation », concède-t-elle.

« Comme nous habitions en zone rouge, nous ne pouvions pas quitter les lieux. Nous avons donc roulé un peu et puis, je me suis arrêtée dans le parking d’un supermarché jusqu’à la fermeture », raconte-t-elle. Par la suite, elle se rend dans un autre parking, celui d’un fast-food. « Là-bas, ma fille a commencé à réclamer à manger. Malheureusement, je ne pouvais pas me le permettre, car il ne nous restait plus grand-chose », dit-elle. Maria s’est donc éloignée à cause des pleurs de sa fille et a roulé en direction de la cour d’une municipalité. « J’ai dû faire attention pour éviter les policiers, car je ne savais pas quoi faire », avoue-t-elle.

Comme nous habitions en zone rouge, nous ne pouvions pas quitter les lieux. Nous avons donc roulé un peu et puis, je me suis arrêtée dans le parking d’un supermarché jusqu’à la fermeture.

En attendant, elle a envoyé des messages via les réseaux sociaux à plusieurs ONG pour obtenir de l’aide. Ce soir-là, elle n’a pas eu de réponse et elles ont donc dormi dans la voiture. « J’ai dit à ma fille de s’allonger sur la banquette arrière. J’ai roulé jusqu’à ce qu’elle soit endormie. Puis, je me suis laissé aller, et j’ai pleuré pendant longtemps en m’allongeant sur le siège avant. »

Après une nuit très difficile, Maria décide de trouver une autre solution. « Encore une fois, tous les appels que je faisais aux personnes que je connaissais sont restés vains. Je pense qu’elles ne croyaient pas que je dormais réellement avec ma fille dans la voiture, ni que le propriétaire ait pu nous mettre à la porte pendant le confinement, et encore moins que l’aide que je réclamais ne pouvait attendre. Elles avaient aussi très peur de m’accueillir chez elles et d’être contaminées par le virus », estime-t-elle.

Pour Maria, sans un sou en poche, il était impossible de continuer à rester dehors avec une enfant. « J’ai donc fait appel à une association et à la police. » Ainsi, elle a pu obtenir un hébergement temporaire. « Je sais que ma fille aura à manger, un endroit pour dormir, même si ce n’est pas un lieu idéal pour élever une enfant. »

Pour Maria, pas question de baisser les bras. Ainsi, depuis quelques jours, elle travaille en ligne : « Je n’ai rien dit à mon employeur. Je ne veux pas qu’il soit au courant de la situation par laquelle je traverse, car je dois à tout prix conserver mon emploi. J’ai aussi trouvé une petite maison, mais il me faut payer le loyer, récupérer mes affaires et chercher quelques dons pour avoir le minimum pour aménager la nouvelle demeure. En attendant, j’ai utilisé tout l’argent que j’avais jusqu’à la fin du mois et je dois continuer à travailler. »

Ainsi, chaque jour, au téléphone, tout comme devant sa fille, elle affiche son plus beau sourire, même si son cœur est déchiré. C’est cela, être mère…