Interview

La responsabilité pénale du mineur - Me Busgeet : «le discernement est un facteur important»

Me Busgeet

À Maurice, il n’y a pas de loi qui définit l’âge où un enfant peut être poursuivi pour une infraction pénale, dit l’avocate Doordarshini Busgeet.  Le discernement, dit-elle, joue un rôle très important pour déterminer s’il est capable de faire face à un procès au pénal.

Publicité

Que signifie la responsabilité pénale du mineur ?
C’est l’âge minimum au-dessus duquel les enfants sont présumés avoir la capacité d’enfreindre la loi. La responsabilité pénale est l’obligation pour répondre, devant une Cour de justice, aux délits commis et de subir les peines prévues par la législation pour être ensuite réprimé. Les récents événements démontrent une dégradation de la délinquance juvénile dans les infractions sexuelles.

Que dit notre législation sur la responsabilité pénale du mineur ? Ne pensez-vous pas qu’il est temps de remédier à cette situation à Maurice ?
À Maurice, il n’y a pas de loi qui définit l’âge où un enfant peut être poursuivi pour une infraction pénale. Selon le Criminal Code de Maurice, l’âge minimal où un mineur peut être poursuivi pour une infraction pénale est de 14 ans et 16 ans pour des rapports sexuels.

Avant de discuter de la question de la fixation de l’âge minimal chez le mineur, il est crucial de faire la distinction entre l’âge de la responsabilité pénale du mineur de l’âge à partir duquel les sanctions pénales sont appliquées pour celui qui atteint la majorité. Il faut aussi faire une différence entre les mineurs âgés de 13 à 16 ans et ceux de 16 à 18 ans.

Cependant, abaisser l’âge de la majorité peut développer le sentiment d’insécurité chez le mineur. Mais il est impératif de relever la maturité précoce chez  des jeunes mineurs, qui acquièrent, dès leur jeune âge, des comportements inadaptés à leur état psychologique.

La capacité de discernement chez un mineur est un sujet à controverse. Pourquoi est-ce souvent mise de l’avant lorsqu’un mineur témoigne en cour ?
Parfois, dans les procès de divorce, dans les litiges concernant le droit d’hébergement ou de visite, le tribunal entend et considère l’avis de l’enfant. Si l’enfant est âgé de 10 ans ou plus et est capable de discernement, il peut alors être entendu au cours de ce litige entre ses parents.

Dans les cas criminels, pour infliger une condamnation pénale à un jeune délinquant, il ne suffit pas de le déclarer simplement coupable, il faut encore constater s’il est capable de discerner suffisamment ses actes. C’est mentionné dans Dalloz Rep. Droit Criminel et de Procédure Pénale – Tome I.

D’après le Traité du Droit Pénal Français, Tome 1, R. Garraud, « tout adolescent est irresponsable, à moins d’établir que le discernement était développé en lui, avant le fait qu’il a commis et en effet, pour condamner un individu qui n’avait pas dix-huit ans au moment de l’infraction dont il est inculpé, il faut examiner et résoudre contre lui, la question de discernement ».

«Le CDU peut faire une demande pour un Emergency Protection Order qui exige le retrait de l’enfant de ses parents (qui dure 14 jours) pour la protection du mineur.»

Que dit notre loi concernant le discernement d’un mineur qui fait l’objet de poursuites pénales ?
D’après le Criminal Code de Maurice, concernant un mineur de moins de 14 ans agissant sans discernement, l’article 44 de cette législation prévoit « qu’il sera acquitté, mais il sera, selon les circonstances, remis à ses parents, ou conduit dans une maison de correction, pour y être élevé et détenu pendant tel nombre d’années que le jugement déterminera, et qui toutefois, ne pourra excéder l’époque où il aura accompli sa 18e année ».

Contrairement, le mineur de moins de 14 ans, qui a agi avec discernement, l’article 45 de cette loi prévoit « qu’il sera condamné à l’emprisonnement dans une maison de correction, pour le temps qui sera déterminé par le jugement ».

Si le mineur en question est victime d’abus sexuels, de viols ou d’autres délits…
Le mineur, en présence obligatoire de ses parents ou de l’un d’eux, peut faire une déposition à la police ou déposer une plainte auprès de l’Ombudsperson for Children ou à la Child Development Unit (CDU).

Le CDU peut, elle, faire une demande au nom du mineur pour un Emergency Protection Order, qui exige le retrait de l’enfant de ses parents (qui dure 14 jours si c’est nécessaire) pour la protection du mineur. Ce cas de demande est formulé si le mineur vit sous le même toit que son agresseur.

Il y a eu des cas où la victime mineure se rétracte au cours du procès au pénal initié par le Directeur des poursuites publiques (DPP) contre son agresseur. Aussi, les parents du mineur peuvent loger une action au civil contre l’agresseur pour réclamer des dommages pour préjudices dont il a dû faire face.

Quelle est la procédure lorsqu’un mineur est poursuivi pour une affaire criminelle ?
Le traitement accordé aux mineurs est différent de celui accordé à un adulte dans un cas d’infraction pénale. Le mineur doit obligatoirement être accompagné de ses parents et doit être informé de l’accusation contre lui. C’est la responsabilité des autorités ou de la police de faire en sorte que l’enfant a compris l’accusation portée contre lui.

Pendant le procès au pénal, le mineur doit être obligatoirement accompagné par les deux parents. L’audience se déroule à huis clos. Car, l’identité du mineur ne doit aucunement être relevée.

 

Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !