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La musique au-delà des handicaps

Ils vivent musique, respirent musique et n'ont pas laissé leur handicap faire obstacle dans leur quête de talents. Nous célébrons le 21 juin prochain la Journée mondiale de la Musique. Rencontre avec ces artistes en herbe.

Jane Constance : « La musique m’a fait oublier mon handicap »

Jane Constance à l’Opéra de Monte-Carlo à Monaco lors d'un gala de charité.
Jane Constance à l’Opéra de Monte-Carlo à Monaco lors d'un gala de charité.

Aussi longtemps qu’elle s’en souvienne, Jane Constance fait de la musique. « La musique est comme une deuxième nature, elle est présente dans mes gènes. Je la vis comme je respire », lance la jeune fille. Cette passion, transmise de génération en génération, est devenue vitale pour Jane. Son grand-père, son papa, son parrain, elle est issue d'une famille de musiciens. Son handicap n’a jamais été une barrière pour l’artiste. Elle confie : « être aveugle m'a fait développer d'autres capacités. À l'âge de cinq ans, j'ai suivi mes premiers cours de chant puis à sept ans, j'ai appris à jouer de la guitare ».

Ses professeurs découvrent alors que son handicap n'était pas une limite pour elle. Très vite Jane développe l'oreille absolue et décide à dix ans de prendre part aux examens de la Royal School of Music.

« Lorsqu'on n'a pas un sens, les autres sens se développent et pour moi, c'est l'ouïe. J'arrive à ressentir l'émotion à travers la musique », confie Jane. On se souvient encore de sa première prestation sur scène à neuf ans, lorsqu’elle a chanté aux côtés de Dave. Elle enchaînera par la suite des prestations jusqu'à accéder à la finale de The Voice Kids. À 17 ans, la jeune fille acquiert une certaine notoriété et fait partie des artistes qui brillent au niveau international. « J'ai oublié que je suis aveugle grâce à mon entourage. Les portes se sont ouvertes à moi et j'en suis fière. Mais il est aussi important de savoir garder les pieds sur terre », confie-t-elle.

La jeune fille, actuellement en dernière année de secondaire, vient de lancer son deuxième album. Elle prévoit de faire des concerts à travers l’Europe après ses examens. Jane a récemment participé à un gala de charité à Monaco où elle a eu la chance de rencontrer le Prince Albert II de Monaco.

Hermans Pierre-Louis : la musique dans la peau

Hermans est professeur de guitare à l'Atelier Mo'Zar.
Hermans est professeur de guitare à l'Atelier Mo'Zar.

La musique, il la puise du plus profond de son être. Être aveugle n'a jamais été une bataille et encore moins une difficulté pour Hermans Pierre-Louis, mais bien au contraire. Ce professeur de guitare à l'Atelier Mo'zar fait de la musique depuis son plus jeune âge. « À l'âge de six ans, je jouais déjà de la ravanne et du djembé dans les fêtes », raconte le musicien. Ce dernier a toujours été entouré par la musique et a grandi dans l'univers musical.

Mais Hermans avait d'autres ambitions : il rêvait de devenir journaliste ou avocat et de faire de grandes études. Lorsqu'il perd la vue à l'âge de 14 ans suite à une négligence médicale, tous ses rêves se brisent. « J'ai pris un moment pour le réaliser, mais aujourd'hui je peux dire que c'est un cadeau de Dieu. Je suis content de qui je suis aujourd'hui », confie Hermans.  Pour le jeune homme, c'est avant tout une question d'habitude et de cheminement. Selon lui, « la musique m’apporte de l’énergie. J’arrive à analyser les gens et je ressens la musique autrement. » Quand Hermans perd la vue, difficile pour lui de penser à un métier. « Tout ce que je savais faire, c’était de la musique. »

Il décide alors de se professionnaliser et fait des rencontres fortuites avec des mentors, notamment Patrick Desvaux et José Thérèse qui l’ont guidé dans son choix de carrière. « Je n'ai pas choisi la musique, c'est elle qui m'a choisie. » À l’âge d'un an, son premier gâteau d'anniversaire était en forme de guitare. Un signe du destin pour Hermans qui apprend le jazz. À 16 ans, il participait déjà à des concerts et collaborait avec des artistes locaux.

« Quand José est décédé, j'étais perdu. Je n'avais plus de repères ». Il fait alors la rencontre d’un chanteur qui l'encourage à se lancer dans la chanson et lui permet de développer des techniques vocales. Il y a un an, Hermans est désigné comme professeur de guitare à l'Atelier Mo'Zar.

« Je peux enfin partager ma passion et mes connaissances avec les plus jeunes », avoue Hermans. Le malvoyant s'envole pour l'Italie avec la troupe. Objectif : décrocher une bourse à la suite des master class, afin de se professionnaliser. Il travaille depuis trois ans sur son premier album. « Je prendrai mon temps pour le réaliser, car je souhaite qu'il marque les esprits et l'histoire », lance Hermans.

Navissen Mooneesamy : la musique comme rempart

Navissen joue de multiples instruments à percussion.
Navissen joue de multiples instruments à percussion.

Il est atteint d’un handicap intellectuel, mais cela ne l’a pas freiné dans la poursuite de sa passion pour la musique. Ce jeune homme, de 23 ans, a le rythme dans la peau. Les percussions n'ont aucun secret pour lui. Percussionniste dans le groupe de musique de la Mauritius Mental Health Association (MMHA), il développe cet amour pour les « drums » grâce à son professeur de musique Jean-Claude Emilien. « Au départ, il avait un problème à la main qui l'empêchait de jouer. Mais il n'a pas baissé les bras. Navissen fait beaucoup d’exercices pour pouvoir jouer », confie son prof de musique.

Très vite, Jean-Claude constate que Navissen a du talent. Il réussit à trouver les bonnes rotations, lorsqu'il joue du djembé et de la ravanne. Mais l'apprentissage de la musique est plus long surtout lorsqu’on est atteint d’un handicap et cela peut prendre quatre à cinq ans. « Nous leur demandons d’abord de taper. C’est à partir de là, que nous décelons les talents. » En dix ans, Navissen évolue très vite. Motivé par la passion du jeune homme, son professeur de musique l'encourage à prendre des cours à Pointe-aux-Sables, les samedis. Grâce à la musique, Navissen parvient à s’ouvrir aux autres.

Il participe à plusieurs représentations à l'école et reçoit de nombreux prix. Il remporte le deuxième prix lors d'un Music Day, organisé par la municipalité de Port-Louis. Aujourd'hui, Navissen est le leader des percussionnistes et dirige une petite troupe de cinq percussionnistes, lors des événements organisés par l'école. « Il donne le premier temps et les autres le suivent. » Autonome dans la vie comme dans la musique, on le retrouve souvent dans son coin en train de jouer avec des écouteurs aux oreilles.

Ameegah Paul : la voix d’or des autrement capables

Ameegah Paul a développé un amour pour le chant et la guitare.
Ameegah Paul a développé un amour pour le chant et la guitare.

Son handicap ne l’a jamais arrêtée. Ameegah Paul est née avec un handicap physique. Elle ne peut pas bouger la main droite et elle a le pied gauche plus long que le pied droit. Elle souffre aussi d'un handicap à la bouche. « J’avais deux ans quand ma mère a vu que je n’utilisais pas certaines parties de mon corps comme il le fallait », explique-t-elle. Au-delà de son handicap, Ameegah n'a jamais cessé de forcer le destin, faisant tout pour poursuivre ses études secondaires. « Le regard des gens n'a pas été facile à vivre tous les jours », nous confie-t-elle.

Encouragée par ses parents à mener une vie comme les autres enfants et avoir une éducation normale, Ameegah décide de prendre la vie à bras-le-corps. Elle découvre sa passion pour la musique alors qu'elle était en dernière année de primaire. Souhaitant apprendre à chanter, Ameegah intègre une chorale. La jeune fille se réfugie alors dans la chanson. « J'avais peur de chanter à cause de mon handicap à la bouche, mais le guitariste de la chorale m'a appris les techniques vocales. » Avec de la pratique et les répétitions, Ameegah s’améliore.

« J'ai pris six mois pour m'adapter et vraiment l'univers musical me plaisait. J'y trouvais une certaine liberté que je ne trouvais nulle part ailleurs », confie-t-elle. Elle décide alors d'apprendre à jouer de la guitare. « Mon handicap à la main n'est pas une barrière bien au contraire, j'en ai fait ma force. Au début, j'avais des difficultés à jouer mais avec de la pratique, j'y suis parvenue. » La jeune fille de 19 ans prévoit de travailler sur le prochain album de Nithin Chinien.

 

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