Harcelé par les paparazzi, le père de Meghan Markle, hospitalisé pour des problèmes cardiaques, apparaît comme la victime collatérale de la relation complexe entretenue par les tabloïds britanniques avec la famille royale. Thomas Markle, 73 ans, a précisé qu'il allait subir une intervention chirurgicale et ne pourra plus conduire sa fille à l'autel comme prévu, samedi au château de Windsor, près de Londres.
Avant cette annonce, intervenue mardi soir, sa présence était remise en question en raison d'une polémique née de la publication de photos posées le montrant en train de se préparer pour le mariage alors même qu'il se plaignait de l'intrusion de la presse. Ces rebondissements ont terni l'opération de communication jusque-là sans anicroche du palais royal, qui distille depuis des mois au compte-gouttes des informations concernant le jour-J: de la liste des enfants d'honneur au parfum du gâteau en passant par la publication du faire-part royal.
Surtout, ils risquent à plus long terme de détériorer davantage les relations des médias avec le prince Harry, qui continue de tenir pour responsables les paparazzi de la mort de sa mère Diana, dans un accident de voiture à Paris en 1997. "Quoi qu'il arrive le jour dit, les événements de la semaine passée laisseront un goût amer", estime Valentine Low, chroniqueuse royale pour le quotidien Times.
Le régulateur britannique de la presse a été contraint de publier au cours du week-end une mise en garde aux médias, les appelant à cesser de poursuivre Thomas Markle. Selon sa fille Samantha Grant, la demi-sœur de Meghan Markle, il lui est arrivé d'être suivi par "sept ou huit voitures" et certains ont même "loué une maison" à côté de son domicile au Mexique. "Il ne peut pas ouvrir les volets, il ne peut aller nulle part sans être suivi, c'est atroce", a-t-elle raconté.
Elle a défendu la décision de son père d'essayer de contrôler son image en coopérant avec quelques journalistes choisis, comme avait coutume de le faire Diana elle-même. Car la famille royale a conscience de la nécessité de "donner" quelque chose au public pour justifier son existence, son coût pour les finances publiques britanniques et aussi pour promouvoir les causes qu'elle défend.
Face aux mésaventures de Thomas Markle, certains commentateurs estimaient qu'il aurait dû être mieux conseillé sur la manière de gérer l'attention des médias. "La conjonction royauté-média-public est un monstre qui peut broyer ceux qui ne savent pas la gérer", note la journaliste Jane Merrick. Après la mort de Diana, la famille royale a conclu une trêve avec la presse - au Royaume-Uni en tout cas -, qui a laissé grandir ses enfants William et Harry dans une relative tranquillité.
Mais à partir de la vingtaine, le fêtard Harry et ses débordements ont fait régulièrement la Une des tabloïds : des photos l'ont montré nu à Las Vegas ou déguisé en uniforme nazi. Fin 2016, confronté aux rumeurs, il a officialisé sa relation avec Meghan Markle avec un communiqué de presse au ton inhabituel dans lequel il a dénoncé "le harcèlement" et les propos racistes dont est victime sa fiancée métisse. Son frère aîné William, deuxième dans l'ordre de succession au trône, a aussi été contraint à plusieurs reprises d'agir pour limiter la curiosité des médias.
En 2015, le palais a ainsi mis en garde les photographes qui allaient "de plus en plus loin" pour prendre des photos du fils aîné du prince William, George, alors âgé de deux ans. Un photographe s'était caché dans le coffre de sa voiture garée devant une aire de jeu fréquentée par le bambin et sa nanny, un autre s'était enterré dans le sable sur une plage pour le photographier. Mais quels que soient les discours sur le droit à une vie privée, l'intérêt du public l'emportera toujours, estiment des éditorialistes.
"On peut se contorsionner dans tous les sens, la réalité est là : un paparazzo m'a un jour dit qu'un seul cliché, le bon, pouvait le faire vivre pendant un an", écrit Suzanne Moore dans le Guardian. Car "un cliché - de larmes, de tétons ou de tiare - se vendra à travers le monde entier"
AFP/ Photo : Adrian DENNIS
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