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La lutte des mamans face à la toxicomanie 

Ragini Runghen est entourée de mamans devenues animatrices au centre.
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Dans l’ombre de la toxicomanie, des mères témoignent de leur combat acharné pour sauver leurs enfants. Entre culpabilité, espoir et désespoir, elles partagent leur expérience poignante face à une réalité dévastatrice. De la découverte de la dépendance à la recherche de soutien, ces histoires révèlent la force d’un amour inconditionnel et l’importance de la solidarité au sein de la communauté. À travers Lakaz A, elles trouvent une voix et un refuge pour accompagner d’autres familles confrontées à ce fléau.

La toxicomanie affecte non seulement les personnes qui sont accros à la drogue, mais aussi leur famille.
La toxicomanie affecte non seulement les personnes qui sont accros à la drogue, mais aussi leur famille.

Edwidge : une battante

Edwidge, sexagénaire, a traversé un long combat contre la toxicomanie. Il y a six ans, son fils, alors trentenaire, est tombé dans ce fléau. Élève brillant, il travaillait comme Marine surveyor. Cet ancien scout était très actif dans l’église. Cependant, des problèmes familiaux et personnels l’ont poussé vers la drogue. Au début, son fils, bien que constamment entouré de drogués, n’avait jamais cédé à la tentation jusqu’à ce que les difficultés s’abattent sur lui. « Puis, ses amis lui ont proposé d’essayer et c’est ainsi qu’il est tombé dans le fléau de la drogue », confie Edwige. Par la suite, il a perdu son emploi et a sombré.

Elle a assisté avec impuissance à la descente aux enfers de son fils. « Je connais la souffrance. J’ai lutté seule et mon dernier espoir, c’était lui. Même dans ses pires moments, je gardais l’espoir qu’il se relèverait », dit-elle avec émotion. Elle précise qu’elle n’est pas seule dans cette douleur. De nombreuses mères souffrent en silence, perdues face à ce drame. Malgré tout, elle n’a jamais abandonné son fils. Elle refuse de le rejeter, même après ses échecs. « On pense à l’avenir de nos enfants. Jamais je ne baisserai les bras », affirme avec force cette sexagénaire qui a frappé à toutes les portes pour sortir son garçon de cet enfer. Au final, ses efforts ont abouti, puisque son fils est en phase de réhabilitation. D’ailleurs, ce dernier lui a écrit plusieurs lettres pour lui demander pardon. « Quand il se remémore où il était et où il en est aujourd'hui, c’est touchant », dit-elle avec émotion. Elle exprime sa fierté d’être là pour lui, tout en étant consciente que le chemin est semé d’embûches. De plus, elle confie qu’elle est toujours animée par la peur qu’il ne rechute. 

Solidarité collective 

Edwidge déplore le fait que la société stigmatise non seulement les toxicomanes, mais aussi leurs parents. Des mères, comme elle, vivent dans la honte. Cependant, elle insiste sur l’importance d’une solidarité collective pour aider ces jeunes à se relever. « Nous avons tous besoin de soutien. C’est grâce à cela que mon fils a réussi à s’en sortir », ajoute notre interlocutrice. Cette dernière dit garder espoir que les choses vont un jour s’améliorer non seulement pour son fils, mais également pour les autres jeunes qui sont pris dans la spirale de la drogue. Si elle a retrouvé le goût à la vie et aussi de l’espoir, c’est grâce à Lakaz A, nous dit-elle. « J’ai pu trouver cette force avec le soutien et l’appui de Lakaz A. Il y a des personnes qui sont toujours là pour aider ceux qui souffrent », conclut-elle. 

Le témoignage d’Edwige prouve que l'entraide et la solidarité peuvent être des armes puissantes contre la souffrance.

Chantal : une mère courage 

Chantal a amassé des preuves contre son fils toxicomane  et l’a dénoncé à la police pour qu’il sorte de la drogue.
Chantal a amassé des preuves contre son fils toxicomane et l’a dénoncé à la police pour qu’il sorte de la drogue.

À 68 ans, Chantal, habitante de Floréal, raconte son parcours difficile face à la toxicomanie de son fils. Tout a commencé quand il avait entre 18 et 19 ans. Il a été influencé par des camarades. « C'est à ce moment-là qu'il a commencé à consommer de la drogue », se souvient-elle, le cœur lourd. Au début, il semblait normal, mais la situation s'est vite détériorée. Chantal se rappelle qu'il avait quitté l'école pour travailler comme maçon. « Je lui ai dit de ne pas faire ce travail, car c’est vraiment dur pour son âge, mais il me disait que sans les maçons il n’y aurait pas de maison. J’ai compris sa logique sans me douter qu’il devait travailler pour avoir de l’argent pour acheter de la drogue », dit-elle.

Elle avoue avoir été la dernière à découvrir que son fils était toxicomane. En apprenant la vérité, Chantal a décidé de chercher de l'aide. « J'ai parlé à un policier et lui ai demandé d'arrêter mon fils. Mais il m'a répondu qu'il ne pouvait rien faire sans preuve. J'ai donc rassemblé des preuves et suis retournée le voir. Ce n'était pas facile, mais j'ai fait ce qu'il fallait », explique-t-elle. 

Coupable de la mort de son père

Il a été incarcéré pendant trois mois, mais quand il a retrouvé la liberté, les problèmes ont continué. Tragiquement, à peine 15 jours après sa sortie, Chantal a perdu son époux. Son fils, rongé par la culpabilité, a vu sa situation empirer. « Il se sentait coupable de la mort de son père », confie-t-elle. Comme si cela ne suffisait pas, il a aussi été diagnostiqué d'un cancer. Malgré sa volonté d'arrêter, la maladie l'a emporté à seulement 35 ans. 

Ce drame a profondément changé la perception de Chantal vis-à-vis des toxicomanes. « Grâce à des initiatives comme Lakaz A, j'ai appris à mieux comprendre ces jeunes et leur souffrance  », raconte-t-elle. C’est ainsi qu’elle a décidé d'utiliser son expérience pour aider d'autres parents confrontés à des situations similaires. « Je veux être là pour ceux qui traversent des épreuves aussi dures que les miennes », déclare-t-elle avec détermination. Malgré sa douleur, Chantal reste un pilier de soutien pour les familles touchées par la toxicomanie. « Nous devons nous unir, nous encourager et surmonter ces problèmes ensemble », conclut-elle. 

Son témoignage est un appel à la solidarité, un cri du cœur pour ceux qui luttent encore dans l'ombre.

Zoom sur Lacaz A  

Le Groupe A de Cassis/Lacaz A est au service de l’humain dans toute sa dimension. Il a pour but d’offrir un service humanitaire qui met l'accent sur la valorisation de l’homme, tout en respectant et en réhabilitant le bénéficiaire afin qu'il/elle puisse apporter des changements significatifs à sa vie. 

Leur mission est d’offrir un service qui est exempt de tout jugement préconçu afin d'établir de bonnes relations interpersonnelles et amicales au fil du temps. Leur objectif est de redonner à l’Homme sa dignité humaine et que l’Homme puisse découvrir la joie de vivre sainement.

LacazA était le pionnier dans la mise sur pied des centres qui s’occupent du problème des personnes dépendantes aux drogues comme le CATR (Centre d’Accueil de Terre-Rouge), CDS (Centre de Solidarité), Centre Lotus à la prison, Groupe Elan, CUT (Collectif Urgence Toxida), et le centre Ste Gabriel à Rodrigues.

Le groupe a été toujours reconnu par ses prises de position et ses plaidoyers. Il est situé  à la rue Saint-Georges, Port-Louis.

Maud : une maman résiliente 

Maud, 65 ans, une habitante de Sainte-Croix, partage son histoire de persévérance face à la toxicomanie. Cette mère d’une fille et d’un garçon de 43 ans se souvient d’un temps où ce dernier était un bon élève, plein de promesses. Puis quand il a atteint l’âge de 18 ans et que sa maman travaillait dans une usine, la situation a basculé. « Je ne savais pas quoi faire quand il a commencé à abandonner l'école. Je me sentais coupable et mal à l'aise, pensant que mon travail avait éloigné mon fils. Malheureusement, il a été influencé par ses camarades. Au début, ils lui offraient de la drogue, puis, une fois accro, il devait payer pour en avoir », se rappelle-t-elle. 

Ce besoin constant d’avoir de l’argent pour se procurer de la drogue a poussé son fils, qui ne travaillait pas, à voler dans la maison familiale, laissant cette mère de famille désemparée. « Je n'arrivais pas à croire qu'il était celui qui volait mes affaires. Quand je pleurais en lui racontant ce qui avait été volé, il pleurait avec moi, en jurant que ce n'était pas lui. Je le croyais sincère à cause de ses larmes », se remémore-t-elle. Puis, quand il est venu lui demander de l’argent, Maud a préféré lui en donner plutôt que de le voir voler chez des étrangers. Toutefois, elle a réalisé que cette situation ne pouvait pas continuer. 

Combat constant 

Ainsi, pour aider son fils à sortir de cet enfer, elle a entrepris de nombreuses démarches, consultant des psychologues et des médecins. Son époux et elle ont combattu ensemble pour soutenir leur fils. Ce dernier, après avoir fait plusieurs tentatives de réhabilitation, est même allé en prison. « C’était un combat constant, mais en tant que maman je ne compte pas l’abandonner », explique-t-elle. Puis, lorsque Maud a découvert Lakaz A, elle a trouvé un espace d’écoute et de soutien. « Ici, je ne me sens pas coupable. Je sais que je n’ai pas été responsable de sa toxicomanie », avoue-t-elle. 

Malgré ses efforts, son fils continue à rechuter. Certes, aujourd’hui il travaille, mais il n’est pas totalement sorti de la dépendance. « Quand ça ne va pas, il retourne à la drogue », dit Maud. Elle essaie de l’intégrer dans la famille, de lui montrer qu’il est important. Ils passent du temps ensemble à regarder des films et partager des repas. « Cela fait plus de 20 ans que je vis avec cette douleur », avoue notre interlocutrice. Cette dernière a appris à vivre avec son chagrin, même si parfois, elle retrouve son fils somnolent dans la maison. « Je lui dis : 'Tu as pris ta dose  ?' Il me répond toujours : 'Non, je suis juste fatigué.' Mais je sais qu'il s'est drogué. Je remercie Dieu qu'il ne soit pas agressif. Il reste calme dans sa chambre », relate-t-elle.

Maud est réaliste et sait qu’elle doit se préparer à tout, y compris une éventuelle overdose. « Je lui ai dit que si je venais à disparaître, il devra prendre ses responsabilités », raconte-t-elle, avant d’ajouter que son fils veille sur son neveu, lui conseillant toujours de ne pas sombrer face à ce fléau.  Malgré la souffrance, Maud se bat pour soutenir les familles dans des situations similaires. « Lakaz A est un refuge, un endroit où l’on peut parler et s’écouter », conclut-elle. 

Ragini Runghen, responsable de Lakaz A : « La famille entière est touchée par cette épreuve »

Ragini Runghen, à la tête de Lakaz A, affirme que souvent des parents ne savent pas où aller pour avoir le soutien nécessaire.
Ragini Runghen, à la tête de Lakaz A, affirme que souvent des parents ne savent pas où aller pour avoir le soutien nécessaire.

Dans le témoignage ci-dessous, Ragini Runghen relate la souffrance que ressentent les parents dont les enfants sont accros à la drogue : « Certains parents voient leurs enfants plonger sans jamais arrêter de consommer. Ils se retrouvent souvent isolés, souffrant en silence. La douleur et la peur de les voir s'enfoncer les rongent profondément. Tous rêvent d'un bel avenir pour leur enfant, mais quand la drogue s'invite, la maison devient un enfer. En général, la famille entière est touchée par cette épreuve. Malheureusement, l’accent est mis sur la personne en difficulté, et dans ce processus on oublie les parents. Toutefois, la SEL (Solidarité, Épanouissement, Libération) a décidé de faire la différence. Ce groupe de soutien pour les parents joue un rôle crucial en offrant un espace de compassion et de soutien aux parents confrontés à ces défis. Chaque jeudi, ils se réunissent pour partager leurs expériences, se soutenir mutuellement et participer à diverses activités ensemble. Cette initiative leur permet de trouver un exutoire à leurs souffrances quotidiennes et comprendre qu’ils ne sont pas seuls dans leurs épreuves. Ces parents, souvent déchirés, frustrés et enfermés dans leur douleur, sont aidés par la SEL à reprendre confiance. Ils apprennent à vivre au quotidien sans que la souffrance les paralyse. En se réunissant, ils deviennent des animateurs, partagent leurs expériences et écoutent d’autres personnes qui ont les mêmes problèmes qu’eux ».

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