Il y a des arrestations. Puis, il y a les proches de ceux qui sont arrêtés. La compagne d’Andy Patate, un des trois Mauriciens arrêtés à la Réunion après l’échouement d’un speedboat, a accepté de se confier à Le Dimanche/L’Hebdo. Elle raconte l’angoisse qu’elle vit et le traumatisme subi par ses deux filles depuis l’éclatement de l’affaire.
Publicité
Les prières. C’est tout ce qu’il reste à Christelle (prénom d’emprunt) pour apaiser son angoisse, dans l’espoir que son compagnon Andy Patate soit de nouveau à ses côtés. Ce skippeur, qui est aussi footballeur professionnel, fait partie des trois Mauriciens qui ont été arrêtés, puis placés en détention à l’île de la Réunion, cette semaine après l’échouement d’un bateau rapide. De forts soupçons d’activités illicites pèsent sur les trois hommes.
« Mo pa pe kapav ni manze ni bwar. Mo bann zanfan tromatize. Zot bien afekte », confie la jeune femme. « Tou seki mo kapav fer se priy la vierge ek Velankanni », indique la mère de famille de 32 ans dans une déclaration accordée à Le Dimanche/L’Hebdo.
Depuis l’éclatement de l’affaire, elle n’a plus goût à rien. Cette sombre affaire a un impact psychologique très lourd sur l’éducation de leurs deux filles. « Bann zanfan bien afekte. Mo de tifi pa pe kapav al lekol. Gran la dan Form 4. Sa finn tromatiz li. Dan lekol, bannla pe poz li tou kalite kestion. Li pann kapav al lekol vandredi », se désole-t-elle.
Son seul et unique souhait : revoir son compagnon à ses côtés le plus rapidement possible. Cela fait une semaine qu’elle vit dans l’angoisse. Le lundi 24 avril 2023, Christelle a commencé à s’inquiéter qu’il soit introuvable. « Li pa abitie kit lakaz enn lanwit ale », insiste-t-elle.
Elle s’est immédiatement rendue au poste de police de Rivière-Noire pour signaler la disparition d’Andy Patate, qu’elle n’a plus vu depuis l’après-midi du dimanche 23 avril. C’est à ce moment-là qu’elle a appris qu’il n’était pas porté disparu, mais qu’il avait été arrêté par la gendarmerie de l’île de la Réunion.
Un père irréprochable
Si Christelle devait décrire son compagnon, elle le qualifierait de père de famille irréprochable. « Andy bien ‘caring’. Li okip so fami bien. Li san repros. » Elle dit ignorer qu’il avait pris le large pour rejoindre les côtes réunionnaises. « Li abitie sorti avek bann kamarad. Me li pa abitie kit lakaz ale enn lanwit. Sete enn gran sok pou mwa. »
À Rivière-Noire, où ils habitent, Andy Patate est réputé pour être un sportif accompli. Il évolue au sein de l’équipe de football du village, le Petite Rivière Noire Football Club. Il a déjà porté les couleurs de l’équipe nationale. Christelle explique que son compagnon est très engagé auprès des jeunes du village : « Li bien antrenn bann zanfan dan akademi football. Li ena so travay, apre li zwe football ousi. »
Jeannot Lamarque, footballeur : « Ziska ler mo pa krwar kinn ariv sa »
La nouvelle de l’arrestation d’Andy Patate et de son coéquipier Benjamin Leu a provoqué une onde de choc dans le village de Rivière-Noire dès lundi. Jeannot Lamarque, qui est footballeur professionnel, fait partie des premiers surpris. « Sa de kamarad la bien korek avek mwa. Noun zwe ansam dan seleksion Maurice. Ziska ler mo pa krwar finn ariv sa. Zot ed bann dimoun plizir plas. Se enn sok pou mwa. Mo leker fer mal », témoigne-t-il.
Les trois hommes sont soupçonnés de s’adonner à des activités illicites
Andy Patate et Benjamin Leu ont été arrêtés lundi matin à Piton-Sainte-Rose, tandis que Roddy Meunier a été appréhendé dans la soirée. Ces trois Mauriciens ont été placés en garde à vue après l’échouement du speedboat à bord duquel ils ont fait la traversée périlleuse entre Maurice et l’île sœur.
L’embarcation s’est endommagée après avoir percuté des rochers à Anse-Cascades, à Sainte-Rose. À ce stade de l’enquête, aucune trace de stupéfiants ni de produits illicites n’a été décelée sur l’embarcation, où se trouvaient encore des bidons de carburant.
Mais les trois hommes sont fortement soupçonnés de s’adonner à des activités illicites et que ce déplacement y serait lié. Andy Patate est accusé d’avoir pénétré le territoire réunionnais clandestinement en compagnie de son coéquipier de l’équipe de foot du village Benjamin Leu et de Roddy Meunier, un habitant de la capitale.
Un Réunionnais, considéré comme le quatrième suspect, écroué
L’enquête ouverte par la gendarmerie nationale de la Réunion, après l’échouement d’un speedboat sur le littoral Est dans la nuit du dimanche 23 avril au lundi 24 avril 2023, progresse. À la fin de la semaine écoulée, les gendarmes ont arrêté un quatrième suspect. Il s’agit d’un Réunionnais âgé de 69 ans.
Cet homme, originaire de Sainte-Suzanne, qui se trouve dans l’Est, est soupçonné d’être l’un des contacts locaux des convoyeurs mauriciens. Les limiers pensent que le trio de Mauriciens est impliqué dans un trafic présumé d’oiseaux en échange de stupéfiants.
Ce vendredi, Andy Patate, Benjamin Leu et Roddy Meunier, ainsi que leur complice réunionnais ont comparu devant le palais de justice de Champ-Fleuri à Saint-Denis. Ils sont provisoirement inculpés de trafic de stupéfiants, d’importation d’animaux vivants sans contrôle vétérinaire conforme et d’association de malfaiteurs. Présentés à un juge d’instruction, les quatre hommes ont été mis en examen, avant d’être reconduits en cellule, où ils sont en détention préventive.
Les enquêteurs orientent leurs investigations sur un possible cas de trafic de zamal entre les deux îles. Le bateau équipé de deux moteurs, utilisé par ces trois Mauriciens, intéresse l’Anti-Drug and Smuggling Unit de Grand-Baie. Leur enquête a abouti à l’arrestation de trois autres personnes sur le territoire mauricien.
Parmi, un dénommé Arshad Abdur Rahman, un homme d’affaires originaire de Palmar. Le bateau qui s’est échoué à l’île sœur appartenait à cet homme. Il a vendu son embarcation à un dénommé Jean Samuel Legentil, présumé trafiquant de drogue habitant Cap-Malheureux.
Ce dernier est accusé d’avoir demandé à Felix Dilaine Lapierre, qui agit comme son prête-nom, de signer un second acte de vente le jour où le speedboat a fait naufrage à la Réunion. Les enquêteurs sont en présence d’informations selon lesquelles Jean Samuel Legentil aurait ordonné d’antidater l’achat de ce bateau en inscrivant la date du 20 avril 2023. Les trois suspects sont provisoirement accusés de « conspiracy to pervert the course of justice ». Ils dorment en cellule policière.
Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !