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Journée pour l’élimination de la pauvreté : le calvaire inhumain de Sheila PADAYACHEE

Sheila PADAYACHEE

« Il en est des pauvres dans un État à peu près comme des ombres dans un tableau : ils font un contraste nécessaire dont l’humanité gémit quelquefois, mais qui honore les vues de la Providence (…) ».

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P. Hecquet, La médecine, la chirurgie et la pharmacie des pauvres, Paris

La pauvreté est devenue phénomène de masse, tire toute la société vers le bas et l’implique dans toutes ses dimensions. Tout simplement parce que, au cœur du fléau, il y a évidemment les questions de l’emploi et de la formation qu’il faudrait développer et sécuriser, parce qu’elles posent la question de l’argent, de l’utilisation des ressources – à quoi et à qui doivent-ils servir ? – qui concernent toute la société, parce qu’elles appellent une lutte multiple contre toutes les formes de discrimination.

Le concept

L’objet de cet article est non seulement de vérifier les contenus du concept de la pauvreté, mais aussi d’établir les relations qu’ils ont avec la logique sociale, systématiquement à l’œuvre et partout repérable, de l’institué d’une époque déterminée. Il faut savoir que les pauvres n’ont généralement pas les moyens de se raconter.

À l’occasion de Journée internationale pour l’élimination de la pauvreté, l’équipe de DIS-MOI Maurice a rencontré une Mauricienne, Mme Sheila Padayachee de Vallée-des-Prêtres pour recueillir son témoignage. Elle a relaté ses malheurs, une histoire à couper le souffle, la transition d’une femme riche qui débarque au plus bas de l’échelle de la pauvreté. Cette dame souffre en silence depuis des décennies, et à travers le récit de son calvaire, elle veut faire entendre la voix des plus démunis .

Mme Padayachee, présentez-vous et racontez nous comment a commencé votre calvaire ?
« Je m’appelle Sheila Padayachee, j’ai travaillé à l’hôpital Dr A.G. Jeetoo (autrefois Civil) à Port-Louis pendant 22 ans. Mariée, j’avais une fille, après ma séparation, j’ai vécu avec mes parents à Vallée-des-Prêtres.

Pour soulager la souffrance des habitants de Vallée-des-Prêtres, j’ai ouvert un supermarché. Mes parents m’ont soutenu dans ma démarche en me donnant un terrain, là-même où j’ai construit un supermarché et une maison, à l’aide de prêts que j’ai obtenus auprès de trois banques.

J’ai lancé mon projet en 1992, et pendant 10 ans, j’ai réussi plus au moins à m’en sortir. Hélas, mon manque d’expérience dans le business ma conduite dans le piège de l’endettement. Une personne que j’ai rencontrée m’a fait comprendre qu’elle m’aiderait et faciliterait ma tâche, financièrement, en m’avançant une somme de Rs 500 000.  Ce prêteur sur gages m’a avancé au début une somme de Rs 200 000. Pour avoir cette somme, il m’a fallu consentir à des intérêts de Rs 40 000, les frais de notaire et d’enregistrement de cette reconnaissance de dette sur mes frais personnels. En sus de cela, pour garantir cette première avance de Rs 200 000, l’une des conditions était que je signe une hypothèque sur mes biens (terrain et bâtiment), chose dite, chose faite…

Pour dormir, je me mets sur une chaise. Je n’ai pas l’eau courante, je vis dans un trou à rats inhabitable, j’ai perdu mon humanité…»

C’est là qu’a commencé mon cauchemar : les banques qui réclament leur argent, les produits expirés dans ma boutique, l’arnaqueur qui a saisi ma maison et les terres, etc…

Avec les larmes et la tristesse dans la voix, Sheila Padayachee relate son naufrage, comment elle a perdu tout ce qu’elle possédait, et même ses parents, son enfant, la chose la plus chère à son cœur.

Avec des soupirs, la vieille dame reprend la parole : « Les bâtiments, ma maison et le supermarché, dans le temps, ils valaient dans les Rs 15 millions, maintenant cela vaut bien plus… Mes parents, dans le temps, ne savaient pas quelle bêtise j’ai commise envers moi-même. Aujourd’hui, je paie très cher de ma vie, moi qui suis rejetée de la société, abandonnée dans ce lieu qui m’a été offert par une organisation. Hélas, il y manque beaucoup de choses. Ainsi, pour dormir, je me mets sur une chaise, ce qui est inhumain. Il me manque l’essentiel : je n’ai pas l’eau courante, je vis véritablement dans un trou à rats inhabitable, j’ai perdu mon humanité… Je me demande si je fais encore partie des humains ? ».

À travers cet article, quel message voulez-vous passer aux Mauriciens et au gouvernement ?
« Mon message : je demande d’abord au gouvernement d’ouvrir à nouveau une enquête sur la saisie de mes terres, car j’ai été victime d’arnaqueurs, et je désire que vous me souteniez en tant qu’humain, quoique j’ai pu faire des erreurs dans mon existence.

Pour mes confrères mauriciens, je dis : attention, il serait illusoire de croire que le phénomène de la pauvreté ne touche que les catégories sociales les plus modestes. J’espère que mon histoire servira de leçon pour tous ceux qui croient à l’apparence des anges déguisés dans la peau d’un loup; que j’appelle les chasseurs d’imbéciles qui ignorent leurs droits. Les chasseurs et les arnaqueurs des biens, ils sont partout, surtout ne vous fiez jamais aux apparences et surtout à ceux qui prétendent vous tendre la main pour vous aider ».

Latifa El Morabet

 

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