José Ah-Choon du Centre d’Accueil de Terre-Rouge (CATR) est contre la dépénalisation du gandia, même à des fins thérapeutiques. Pour lui, cela équivaudrait à attirer nos jeunes vers l’héroïne après être devenus des accros au cannabis.
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Quel est le sentiment du travailleur social que vous êtes par rapport aux saisies de drogue de ces derniers temps ?
Il y a toujours eu des saisies, mais actuellement ces exercices ont une plus grande couverture médiatique. Ce que tout le monde ne sait pas, c’est qu’une partie de la drogue saisie revient dans le circuit... Quand l’Adsu saisit un kilo de drogue, 10 kilos passent la douane sans aucun problème. Le combat contre la drogue est un cercle infernal. Sinon, comment expliquer qu’un trafiquant arrêté dans son laboratoire alors qu’il est en train de fabriquer de la drogue synthétique, puisse quitter sa cellule, aller chez lui et revenir sans encombre. La mafia est à l’œuvre. Elle n’a pas de couleur politique, pourvu qu’elle puisse opérer en toute impunité. Elle est devenue sophistiquée et va jusqu’à blanchir son argent à travers des chiens de race qui coûtent jusqu’à Rs 400 000.
Les saisies se font à un rythme effréné ?
Il faut se rendre à l’évidence, ce n’est pas demain qu’on viendra à bout du trafic de drogue, loin de là. Quand leurs produits sont surveillés de près par les autorités, les traquants inventent d’autres subterfuges. Donc, vous tapez à gauche, ils sortent à droite. C’est la dure réalité.
La mafia n’a pas de couleur politique, pourvu qu’elle puisse opérer en toute impunité»
Le rajeunissement de la toxicomanie vous interpelle-t-il ?
Au CATR, nous recevons des mères de familles en larmes qui ne savent que faire de leurs enfants tombés dans l’enfer de la drogue. Vendredi, une d’entre elles m’a avoué que son fils vole de la viande de son réfrigérateur pour la vendre afin d’avoir sa dose. Une autre m’a confié qu’elle préfère donner de l’argent à son fils pour qu’il se paie sa dose de drogue afin qu’il n’aille pas voler. Voilà où on en est arrivé. C’est le point de non-retour. C’est la raison pour laquelle je fais un appel aux autorités pour qu’on travaille ensemble sur un projet de société sérieux qui touche surtout les jeunes. Maurice est profondément malade et ceux qui ne voient pas cela sont des aveugles.
Pensez-vous que l’accessibilité des drogues de synthèse attirent les jeunes davantage ?
Il n’y a pas que l’accessibilité de la drogue synthétique qui attire, mais surtout son prix. Une dose coûte entre Rs 50 et Rs 100. Un jeune étudiant peut s’en procurer avec son argent de poche. Une fois qu’il entre dans cet engrenage, il ne s’en sort pas et passe à l’héroïne. Est-ce ce genre d’adultes qu’on veut pour notre pays demain ? Saviez-vous qu’il y a des collèges qui suspendent des élèves car ces derniers sont sous l’effet de la drogue synthétique ? Qu’il y a eu des descentes en catimini de l’Adsu dans des collèges ? La situation est grave. Cela risque de vous surprendre, mais il y a même les seniors qui prennent de la drogue synthétique, car c’est bon marché.
On dit que les trafiquants utilisent n’importe quoi pour fabriquer des drogues synthétique. N’est-ce pas dangereux ?
La drogue synthétique est dangereuse, car on ignore sa composition exacte. Certains y ajoutent des pesticides, de la mort-aux-rats, de la javel ou encore de l’acétone. C’est tout simplement un cocktail explosif.
Une maman m’a avoué que son fils vole la viande de son réfrigérateur pour avoir sa dose»
Une forte quantité de cocaïne a été récemment saisie, alors que cette drogue est très peu connue chez les toxicomanes mauriciens...
La cocaïne est consommée principalement par des personnes dites high class. Cette drogue ne se prend pas à travers des seringues. La cocaïne se sniffe. Ce n’est pas l’apanage du simple drogué, c’est l’affaire de gens aisés qui la prennent tranquillement entre les murs de leur maison. Ni vu, ni connu.
Les autorités affirment qu’elles vont ouvrir les débats sur la dépénalisation du cannabidiol à des fins thérapeutiques. Votre avis sur la question ?
Je suis totalement contre la dépénalisation du cannabis, fut-il à des fins thérapeutiques. Peu importe son usage, le cannabis demeure une drogue. Il n’y a pas de drogue douce, c’est un leurre. Le gandia peut être naturel, il n’en demeure pas moins nocif. Certains de ceux qui consomment de l’héroïne ont commencé par le gandia. Le dépénaliser équivaudrait à attirer davantage nos jeunes vers l’héroïne dans quelques années.
On parle d’une pénurie de gandia, est-ce réellement le cas ?
C’est une pénurie artificielle.La vente du gandia est après tout un commerce. Il y a suffisamment de cannabis pour approvisionner tous les consommateurs et cela pour encore des années. C’est une plante et cela pousse. Le moment venu, on la cueille et on en met d’autres en terre.
Récemment, les autorités ont intercepté deux enfants qui servaient de mules. Cela vous choque-t-il ?
C’est un cas exceptionnel. Fort heureusement, même s’ils sont trempés dans le trafic de drogue, la majorité des parents, n’accepteront pas d’utiliser leurs enfants pour faire passer de la drogue.
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