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Jeunesse cruelle : le monde des ados solitaires

On est loin de l’incontournable crise de l’adolescence. Le sujet qui est abordé ici touche ces jeunes qui n’arrivent pas à se faire des amis et qui vivent en solitaires. Quelles en sont les causes? Des éléments de réponse fournis à travers de troublants témoignages livrés à chaud par les principaux intéressés eux-mêmes au Défi Quotidien. Incursion dans leur univers.

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Ziggy, 17 ans : «Je suis fatigué de la solitude»

Cela va faire plus de cinq ans que Ziggy n’a pas d’amis. Il raconte : « Cela a commencé depuis que je suis entré au collège. Au début cela ne me dérangeait pas. Je ne ressentais nullement la nécessité de nouer des liens d’amitié avec qui que ce soit. Je ne faisais d’ailleurs aucun effort dans ce sens. C’était la peur d’aller vers les autres et de se faire repousser. Je ne suis pas particulièrement doué dans ce genre de chose. »

Depuis quelques temps, l’adolescent dit avoir commencé à éprouver une certaine anxiété. « Je me suis rendu compte que personne ne veut m’approcher ? Ce qui me poussait à me demander si je suis quelqu’un de normal dans ma tête.  Ma solitude me fatigue. Je passe le plus clair de mon temps à réfléchir à la vie que je mène. Parfois, je me sens dépressif. Je ne veux rien faire. J’essaye alors de faire diversion en me plongeant dans mes livres scolaires et en effectuant des sorties comme me le suggère ma maman. Et après je pense : à quoi bon sortir seul. Le mieux serait de se retrouver avec les autres pour s’amuser, rire et discuter ensemble. »

Le fait de ne pas avoir d’amis a des répercussions sur la vie familiale de Ziggy : « Il y a une sorte de gêne qui s’est installée entre mes parents et moi. Ils sont au courant de mon problème, mais évitent d’en parler. Sûrement pour ne pas me blesser ou tout simplement parce qu’ils ne savent pas comment aborder le sujet. Le souci c’est que moi non plus je n’arrive pas à les approcher. Pendant les sorties familiales avec les oncles et en compagnie des tantes je me sens mal. Une fois, on m’a qualifié de ‘sournois’, car je me tenais à l’écart de la famille, évitant tout contact avec les cousins. J’ai donc cessé de participer à ce genre de rencontres. »

Liliane Amaury : «Ma fille se fait rejeter par ses amies»

Elle est surnommée la géante. À 14 ans Lizie, la fille de Liliane Amaury, mesure 1m78. Comparée à ses amies de classe, Lizie est très grande et se fait rejeter par toutes pour cette raison. Toutefois, ce qui a aggravé la situation, c’est le caractère de Lizie, nous dit sa mère. « Ma fille n’a pas d’amis et je sais que son sale caractère y est pour beaucoup. Mais c’est un peu aussi la faute à ses amies si elle agit parfois de façon brutale. Car elles se moquent d’elle en raison de sa très grande taille pour son âge. Certains jours, elle est absolument inabordable et repliée sur elle même. Lizie peut être très renfermée et se montrer avare de paroles. Elle est très timide et panique si elle doit aller vers les autres, c’est-à-dire vers l’inconnu. »

Selon sa mère, depuis qu’elle est toute petite, Lizie n’aime pas être entourée. « Elle était casanière, préférant rester dans sa chambre plutot qu’accompagner ses parents pour le shopping, ou se livrer à des activités qu’affectionnent les jeunes de son âge. »

Très inquiète, Liliane espère voir un changement s’opérer chez sa fille : « Je suis sûre que ma fille est malheureuse. J’espère qu’elle va se montrer plus conviviale envers les autres au lieu de se comporter de manière à les repousser. Elle peut y parvenir, car elle a beaucoup de qualités. C’est une jeune femme drôle, très à l’écoute des autres et pour qui aucun sujet n’est tabou. Elle consacre beaucoup de son temps aux personnes qu’elle aime et c’est quelqu’un en qui on peut placer sa confiance. C’est dommage que ses amis la rejettent et la poussent à mal se comporter. Les jeunes sont parfois très cruels ».

Rishi, 19 ans : «Je n’ai pas d’amis, et alors ?»

Pour Rishi ce n’est pas un problème le fait de ne pas avoir d’amis ni de petite amie à 19 ans. Il se dit simplement dans un monde bien à lui. « À l’âge de 15-16 ans je me faisais du souci. À tel point que j’ai déjà essayé d’être quelqu’un d’autre, histoire de plaire aux amis que je me faisais. Sincèrement je n’ai pas aimé ça. J’ai par la suite arrêté. D’habitude, quand on est entre amis, on accepte les qualités mais aussi les défauts et la différence des autres. On était trop différents. Je me suis alors dit : je n’ai pas d’amis et alors ? Entre-temps je me suis créé un petit monde où je me sens bien. Pour le moment, je vis à fond et je fais tout ce que j’aime et ce qui m’intéresse. Je suis passionné par le bricolage et j’aime inventer des choses. J’aime aussi la lecture et je suis tout le temps à la recherche de nouveaux livres. Je me cultive et je me fais du bien. Je ne veux pas déprimer. Je partage tout avec mes parents. Aujourd’hui encore, je n’ai ni petite amie, ni amis, et cela ne me dérange nullement. Je préfère ne pas avoir d’amis pour le moment plutôt que d’en avoir sans pouvoir m’épanouir. Concernant l’amour, je me dis qu’il arrivera quand il arrivera. Tout comme l’amitié. »


Karuna Rajiah, psychologue : «La socialisation est un aspect primordial du développement»

Quelle est l’importance des copains à l’adolescence ?
C’est important pour les adolescents de communiquer pour pouvoir s’exprimer librement. Il est aussi primordial pour eux de savoir comment se faire des amis à travers le partage et le respect de l’opinion d’autrui. Quand les adolescents se font des amis, c’est surtout avec les autres adolescents qui partagent les mêmes idées, les mêmes goûts et les mêmes passe-temps. C’est l’aspect de la socialisation.

C’est l’un des aspects de développement qui est primordial pour l’être humain, car cela fait partie du développement socio-émotionnel d’une personne. Ce côté socio-émotionnel aide les tout petits à se faire des amis et cela, aux différentes étapes de leur vie: à la crèche, à la maternelle et dans les autres lieux de rencontre où ils peuvent se retrouver. C’est cela qui va les aider à se sentir en sécurité loin de leur environnement habituel.

Donc, pour les ados également, c’est important de se faire des amis pour pouvoir communiquer, être interactifs et comprendre les autres.

Est-ce grave si un adolescent n’a pas d’amis ?
Cela dépend. Si c’est un adolescent qui n’a jamais eu d’amis oui c’est un problème. Si c’est un adolescent qui a cessé de se faire des amis, c’est un autre problème. C’est nécessaire pour les parents de suivre leurs enfants quand ils se font des amis. Cela permettra aux parents de savoir quelles sont les choses qui les attirent vers ces amis et comment leur amitié progresse.

Parfois, il y a des amis qui ne sont pas de vrais amis, mais des profiteurs, des ‘bully’ ou même des ‘chefs’ qui poussent les plus faibles à commettre des actes répréhensibles. Et c’est là que certains adolescents se retrouvent sans amis ou décident de se faire de nouveaux amis ou même d’éviter d’en avoir pour ne pas se retrouver confrontés à des problèmes aux répercussions graves.

Comment gérer cette situation sociale difficile ?
Ce n’est pas si facile à gérer, mais ce n’est pas impossible non plus. Les parents doivent se tenir au courant, à travers le dialogue, de la façon dont cela se passe à l’école, aux cours, dans les centres récréatifs et les lieux que fréquentent leurs enfants. Il faut se souvenir qu’il est important de ne pas trop s’immiscer dans leur vie personnelle, mais en même temps, il importe d’essayer de rencontrer ses amis d’une façon très informelle pour en savoir plus sur son comportement.

Parfois, c’est difficile pour les parents de partager les mêmes activités que leurs enfants. Il convient donc de commencer par celles que l’on pourrait faire ensemble. Comme aller déposer quelque chose chez le voisin, inviter les amis qui ont des enfants du même groupe d’âge, emmener les enfants à des sessions de prière, faire du lèche-vitrine pour connaître ses goûts.  La natation et le zumba ou encore le tennis et la musique, c’est encore mieux si ce n’est pas de la danse, pourquoi pas ? Mais tout en gardant en tête, pour la protection de votre rejeton, ce proverbe : « Dis-moi qui tu hantes je te dirai qui tu es ».

 

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