
C’est une entreprise locale qui témoigne du talent d’entrepreneurial de certains Mauriciens et de leur dynamisme. En effet, la société Racso, créée en 2015, est engagée dans la livraison et de la gestion du diesel, ainsi que dans le fleet management. Le directeur général de Racso, Jean Alain Mamet, peut se satisfaire d’un portefeuille de clients qui varient entre les plus grosses entreprises cannières de Maurice et des petites et moyennes entreprises.
De quel constat est partie l’idée de mettre sur pied une société comme Racso en 2015 ?
L’idée de lancer l’entreprise m’est venue après un concours de circonstances. J’avais créé, en 2010, une entreprise spécialisée dans la location d’engins : des excavatrices, des camions et des bulldozers. Nous travaillions principalement avec les concasseuses. J’ai ensuite vendu l’entreprise. Mais, peu après, j’ai découvert que certains employés volaient du diesel et sous-louaient les machines de manière illégale durant le week-end.
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Je me suis alors posé la question : qu’en est-il des autres entreprises ? Sont-elles également sujettes à ce genre d’arnaque et disposent-elles de moyens de contrôle pour éviter de tels problèmes ? Nous avons alors effectué une étude de marché qui a révélé que la majorité des sociétés sondées avaient connu des cas de vols de diesel, représentant 8 à 10 % de leur consommation.
C’est à partir de là que m’est venue l’idée de créer une entreprise qui permettrait de contrôler les vols de diesel et de gérer les équipements à travers un service de GPS et de livraison de diesel. Au début, nous proposions nos services principalement aux petites sociétés.
Nous avons ensuite été approchés par une grosse société qui avait un besoin important en diesel, soit plus de 200 000 litres mensuellement. Les implications financières, notamment en termes d’investissement dans les équipements, étaient conséquentes. Pour répondre au besoin du client, nous devions mettre en place une structure plus solide. C’est ainsi que nous avons créé Racso en 2015, avec le soutien de Jean Pierre Mamet, fondateur et président du conseil d’administration du groupe APTIS. Depuis, l’entreprise fait partie du pôle distribution du groupe.
Racso a connu une évolution dynamique. Nous avons élargi notre portefeuille de services, investi dans des équipements de pointe et conclu des partenariats solides avec des entreprises étrangères afin d’offrir un service de qualité et fiable à nos clients.
Aujourd’hui, Racso est une référence dans le domaine de la livraison et de la gestion du diesel, ainsi que du fleet management. Nous proposons une panoplie de services visant à optimiser la gestion des flottes de véhicules et de machines. Grâce aux données précises recueillies par notre système — notamment sur la consommation de diesel, le comportement du véhicule et du conducteur, entre autres — nos clients peuvent prendre des décisions éclairées, que ce soit pour le renouvellement de leurs flottes ou pour améliorer leur système de gestion de performance (PMS).
Aviez-vous réalisé une étude sur cette problématique ou vous vous êtes fondé sur des données empiriques ?
Comme mentionné plus haut, nous avons effectivement mené une étude de marché sur cette problématique. L’étude a montré que des vols de diesel, qui représentent en moyenne de 8 à 10 % de leur consommation, avaient été enregistrés dans la majorité des entreprises sondées.
Pour éviter ces abus et pour des raisons économiques, car ils ont un impact direct sur les finances, les entreprises ressentaient la nécessité de mettre en place un système de contrôle. Un système qui leur permettrait de décourager les vols de diesel, mais aussi de suivre concrètement, avec l’appui d’informations pertinentes, les fluctuations de leur consommation de diesel et de prendre les mesures correctives nécessaires. Il permet également de connaître le positionnement exact de chaque véhicule et de suivre leurs trajets.
Grâce au système que nous avons mis en place, nous sommes en mesure de fournir des rapports détaillés sur la consommation de diesel et la gestion des véhicules et des machines.
Aujourd’hui, les entreprises font appel à nous pour plusieurs raisons. Il y a certes l’aspect sécurité et économique, mais les données récoltées aident aussi à la prise de décisions stratégiques.
À ce jour, comment a évolué la société et comment avez-vous survécu aux conséquences de la covid-19 sur l’économie locale ? Avez-vous recouru aux soutiens publics ?
En plus de dix ans d’existence, Racso n’a cessé d’évoluer. Notre large éventail de services permet une gestion optimisée et une performance accrue des flottes de véhicules et de machines. Nous délivrons également des rapports détaillés sur la gestion des véhicules et des machines ainsi que sur la quantité de diesel consommée, à la demande de nos clients.
Ces données leur permettent de mieux gérer leurs budgets et, dans certains cas, aident à la prise de décisions stratégiques, à l’élaboration de propositions financières pour les appels d’offres ou simplement à finaliser les cotations pour leurs clients.
Un autre service que nous offrons est la livraison de diesel. Cette activité représente une part importante de notre portefeuille de services. Nous disposons de douze camions de livraison qui couvrent l’île quotidiennement et desservent des clients évoluant dans divers secteurs, comme le secteur sucrier, le bâtiment et les travaux publics et le port franc.
Autrefois, les sociétés sucrières possédaient leurs propres camions de livraison de diesel, mais ceux-ci n’étaient pas toujours suffisants pour couvrir toutes les superficies, dispersées sur différents sites et régions, ce qui affectait grandement l’efficience.
Aujourd’hui, ces entreprises préfèrent recourir à nos services sans se soucier de l’approvisionnement et de la distribution du diesel sur leurs sites. Leurs véhicules et autres engins sont approvisionnés sur place en moins de quinze minutes, ce qui leur permet de gagner en temps et en efficience.
Grâce à notre système de contrôle, nous pouvons indiquer exactement la quantité de diesel livrée et celle qui entre dans les réservoirs des véhicules. À titre d’exemple, lorsqu’un véhicule reçoit 400 litres de diesel, nous savons qu’il a effectivement reçu cette quantité, avec une différence maximale d’un ou deux litres.
Les chiffres recueillis via le système sont donc précis et nous ont permis, dans de nombreux cas, de détecter des vols au détriment de nos clients. Nous compilons également ces données et leur remettons des rapports régulièrement - sur une base journalière, chaque quinzaine ou mensuellement. Nous fournissons aussi des benchmarks pour chaque véhicule, ce qui permet de comparer la consommation de chacun et de détecter toute variance importante.
Notre système permet aussi de recueillir des informations sur la conduite et le comportement des chauffeurs. Par exemple, nous pouvons informer un client si son chauffeur conduit de manière brusque, accélère ou freine brutalement, ou aborde les ronds-points de façon brutale. Cette mesure comporte un aspect sécuritaire, mais aussi économique, car le type de conduite influence fortement la consommation de diesel et la durabilité des véhicules.
Pour offrir un service de qualité et fiable à nos clients, nous utilisons des technologies de pointe, avec l’apport de l’intelligence artificielle. Nous sommes en partenariat avec un groupe étranger qui met à notre disposition une plateforme permettant de stocker toutes les données recueillies, pour ensuite les extraire et les analyser selon les besoins du client.
Pendant la covid-19, Racso était classée dans la catégorie des secteurs essentiels. Nous approvisionnions les hôpitaux en diesel pour alimenter leurs générateurs, ainsi que les gros agriculteurs qui, à la demande du gouvernement, s’étaient concentrés sur la production locale de légumes. Nous n’avions donc pas connu d’arrêt de nos activités, même si elles étaient sévèrement réduites.
Racso, qui fait partie du pôle distribution du groupe APTIS, n’a pas eu besoin de recourir au soutien public et a pu compter sur l’appui du groupe pendant cette période difficile.
Quels sont vos principaux clients et quelle est la nature des services que vous leur offrez ?
Racso travaille à la fois avec les grosses sociétés, ainsi qu’avec les moyennes et petites entreprises. Les besoins varient selon la taille de l’entreprise. Les moyennes et petites entreprises ont recours à notre service pour éviter les vols de diesel, car leur consommation peut représenter jusqu’à 60 à 70 % de leur budget. Elles constituent une part importante de notre chiffre d’affaires. À titre d’exemple, pendant la récolte de la canne, nous livrons plus de 1 million de litres de diesel par mois. Les grosses sociétés représentent trois quarts de ce volume, et le reste est livré aux petites et moyennes entreprises.
Parmi nos plus gros clients, nous comptons les sociétés Alteo, CEAL, Dippo, La Moisson, Médine, Terra, Transinvest, UBP et Reihm Grinaker, entre autres. Il faut savoir qu’à travers CEAL et La Moisson, nous touchons presque toute l’industrie agricole.
Les besoins de nos clients varient selon leur secteur d’activité. Les grosses entreprises font appel à nous pour des raisons stratégiques et économiques. Les informations fournies dans nos rapports leur permettent d’effectuer des analyses sur l’utilisation optimale de leurs véhicules et machines. Par exemple, ils peuvent savoir quel véhicule ou machine est le plus adapté à un type de travail. Ils notent la superficie des travaux réalisés dans la préparation du sol quotidiennement, ainsi que le nombre de litres de diesel consommé pour ces travaux.
Les informations sont personnalisées selon les besoins du client. Une fois nos équipements installés sur les véhicules et machines d’un client, nous le rencontrons régulièrement durant les premiers mois pour étudier ses besoins en termes d’informations et lui proposer un rapport personnalisé.
Les points communs que nous constatons chez nos clients sont les vols de diesel, l’excès de vitesse et l’« idle time » (période où le véhicule est en service, mais ne travaille pas). Bien souvent, les opérateurs laissent tourner leurs véhicules pendant leur pause déjeuner pour profiter de la climatisation, rendant le véhicule non productif durant ce temps. Il y a également des cas où les récolteuses de canne ont des périodes d’« idle time », car elles attendent l’arrivée des camions pour transporter les cannes. Aujourd’hui, nous pouvons dissocier ces deux cas. Ces informations contribuent considérablement à améliorer l’efficience des activités de l’entreprise.
Nous travaillons aussi en étroite collaboration avec les groupes pétroliers, qui proposent notre système à leurs clients.
Les conditions des infrastructures routières de Maurice vous permettent-elles de délivrer vos services à n’importe quelle heure et n’importe où ?
Les infrastructures routières sont bien développées à Maurice. Toutefois, c’est la congestion routière qui impacte nos activités. Nous perdons énormément de temps dans les embouteillages. Chaque heure passée dans un embouteillage équivaut à 3 000 litres de diesel non livrés.
La particularité de Racso est que nous livrons principalement dans les champs et sur les chantiers. Nos camions sont conçus pour circuler sur des routes non goudronnées. Et lorsque le lieu de livraison se trouve dans un endroit difficilement accessible, nous utilisons des véhicules 4 × 4.
Vous considérez-vous comme un appoint – ou un concurrent - aux stations-service de l’île et comment vous approvisionnez-vous ?
Nous ne sommes pas un concurrent des stations-service. Les sociétés à qui nous livrons le diesel disposaient auparavant de leurs propres réservoirs et de leur camion de livraison. Ce sont les mêmes volumes qui leur étaient alors livrés. Aujourd’hui, nous avons en quelque sorte repris cette activité. Nous nous approvisionnons directement auprès des principaux distributeurs de diesel de l’île.
Un de vos services est le ‘fleet management’, est-ce que vous considérez que certaines - ou de nombreuses - sociétés mauriciennes ne savent pas gérer leurs services véhicules ?
Non, pas du tout. Nous leur apportons tout simplement les données nécessaires pour qu’ils puissent prendre des décisions judicieuses et rapides. Nous n’intervenons pas dans la gestion des sociétés. Nous assurons la livraison et leur fournissons les outils pour qu’ils puissent continuer à effectuer leur travail dans les meilleures conditions.
Un défi majeur au niveau des véhicules à Maurice – dont les voitures – est la réduction des émissions de CO2, l’idéal serait d’arriver à retirer de la circulation ces voitures d’ici à 2030. Comment appréhendez-vous cette perspective ?
Au niveau de Racso, nous n’avons aucune appréhension à ce sujet. D’ailleurs, nous fournissons à nos clients des rapports sur la consommation de CO2 liée à leurs véhicules et machines. Qu’il s’agisse d’un véhicule ancien ou neuf, la consommation est là. Tout en sachant que Racso approvisionne principalement de gros engins comme les récolteuses de canne, les tracteurs et les excavatrices. Ces engins sont généralement renouvelés régulièrement.
Avez-vous une cartographie des régions où vos services sont les plus requis et comment voyez-vous évoluer vos services dans les dix prochaines années ?
Nous couvrons les quatre coins de l’île, nord, ouest, sud et est, qui incluent également les régions du plateau central. La répartition est assez équitable, puisque nos gros clients sont surtout issus de l’industrie sucrière, qui couvre une grande superficie de l’île. Nous ne prévoyons pas de grandes évolutions au niveau de ce secteur.
Cependant, d’autres opportunités de développement existent, avec la volonté du gouvernement de mettre en place un système de gestion de flotte pour améliorer la qualité des services de transport public. Cette volonté a été confirmée par le ministre du Transport terrestre, Osman Mohammed, lors des débats budgétaires en juin.
Racso possède les technologies et l’expertise — avec le soutien de développeurs locaux et internationaux — nécessaires pour accompagner le gouvernement dans la réalisation de ce grand chantier. Notre système GPS permettrait d’obtenir, entre autres : le positionnement en temps réel des véhicules, la définition des trajets pour chaque véhicule, l’indication de l’heure de passage sur chaque arrêt de bus et aux autres points de ramassage, le contrôle comportemental du chauffeur (accélérations et freinages brusques), le suivi des immobilisations volontaires des bus par les chauffeurs, l’indication du nombre de passagers dans le bus et l’analyse précise de la consommation par trajet. D’autres services que nous proposons comprennent l’installation de boîtes noires et de caméras avant, arrière et intérieure dans les véhicules, l’enregistrement des événements intérieurs et extérieurs, une alarme anti-endormissement et une information immédiate sur le type de panne. Nous pouvons également offrir, à travers notre système de gestion du diesel, un contrôle sur la consommation et l’efficience du carburant.
Racso est une entreprise dynamique et évolutive qui bénéficie du soutien du groupe APTIS. Nous continuerons à développer nos services. Nous travaillons actuellement sur des projets concernant la charge des véhicules (poids) et les caméras. Aujourd’hui, nos propres camions sont équipés de caméras. Les images sont enregistrées dans une boîte noire, un peu comme dans les avions. En cas de problème, nous récupérons les informations pour voir exactement ce qui s’est passé. Nous comptons proposer ce service à nos clients prochainement.
Nous prospectons la possibilité d’étendre nos services dans la région de l’océan Indien et en Afrique, et sommes en discussion avec quelques clients potentiels.
Quels arguments mettez-vous en avant pour motiver les potentiels clients à recourir à vos services ?
L’argument principal reste l’efficience, grâce à un meilleur contrôle de l’utilisation du diesel, des engins et des opérateurs. Racso jouit également d’une excellente réputation sur le marché et nous avons la confiance de nos clients, que nous accompagnons depuis de nombreuses années. Notre sérieux et notre professionnalisme constituent des atouts majeurs pour convaincre les clients potentiels.
Quelles sont les conditions qui doivent prévaloir afin que votre service soit pleinement efficace ?
Pour que notre système fonctionne, nous avons besoin d’une bonne couverture de réseau mobile. Néanmoins, en l’absence de réseau, les informations sont emmagasinées et nous pouvons les récupérer une fois la connexion rétablie. En ce qui concerne nos clients, nous leur recommandons notre service complet de surveillance pour un meilleur contrôle de la gestion de leurs véhicules et machines.
De manière générale, quelle est votre observation sur la gestion du trafic routier mauricien et sur les comportements/attitudes des conducteurs mauriciens ?
Comme partout ailleurs, le trafic routier est un véritable problème, mais nous devons composer avec. Au niveau des infrastructures routières, il n’y a pas grand-chose à redire par rapport à la qualité. Il y a de gros efforts qui sont faits à ce niveau par le gouvernement et nous n’avons rien à envier aux autres pays africains. Le métro express est aussi venu soulager en partie le trafic routier.
En ce qui concerne le comportement de certains conducteurs, je leur reproche leur manque de civisme. Il faut également trouver des solutions aux problèmes de bicyclettes et de chiens errants sur nos routes. Et aussi que les gens respectent les règles de la route et les espaces de parking.

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