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Jayshan Keejoo: le boss de Boston

C’est l’histoire d’un Mauricien, ancien élève au collège Imperial, à Curepipe, qui a fait une carrière exceptionnelle aux États-Unis. Jayshan Keejoo, 40 ans, domicilié à Boston, dirige une étude spécialisée en arbitrage international et en conseils en entreprise. Il était en vacances à Maurice. Au lendemain de son arrivée à Maurice, un jet privé est venu le quérir pour l’emmener à La Réunion afin qu’il préside à un arbitrage, à la demande d’un client sud-africain. Le même jour, jeudi 23 juin, il rentrait à Maurice par le même jet privé. « Tout cela n’est rien d’extraordinaire pour moi. Cela fait partie de mon job. Je ne me sens pas vraiment en vacances à Maurice. Je peux devoir rentrer à Boston à tout moment », souligne Jayshan Keejoo. Ce jeudi là, le Mauricien a dû se trouver illico une veste pour la photo de presse. « Aux États-Unis, vous n’impressionnez personne par vos vêtements, mais par vos connaissances, votre vitesse de compréhension et vos propositions », indique l’enfant d’un ex-Town Clerk de Curepipe, qui en a trois. « Je suis ici pour voir mon père. Sa santé est devenue très fragile. »

Simple et chaleureux

Au collège, confie ce grand gaillard, simple et chaleureux, il a toujours été un peu turbulent, pas trop heureux en études. Aussi, son père l’envoie en Angleterre décrocher une licence en droit, suivie d’un MBA à Leicester. Puis, à la faveur d’une bourse, il part à la Wisconsin-Madison University, aux États-Unis, où il passe un doctorat en management.
Spécialiste en arbitrage, à son retour en Angleterre, il intègre un cabinet de juristes londoniens. Il se souvient encore de sa participation à un litige opposant un grand club londonien à son entraîneur, un étranger force à la démission. « C’est la que j’ai vu la beauté, l’intrigue, l’épreuve de force qui sous-tendent l’arbitrage. Durant presque 7 mois, je me suis initié aux arcanes de ce métier, tant dans le privé que dans le secteur public. » En 2009, il retourne aux États-Unis où il s’inscrit à la Bar Association à New York. Puis, grâce à son bilinguisme, il commence par la traduction des textes juridiques. « Ce n’était pas d’une pure perfection, mais cela a aidé certaines personnes à mieux comprendre les affaires. »
[blockquote]« Lorsque vous êtes à New York, vous êtes au centre du monde, que vous le vouliez ou pas. C’est le nombril des affaires. The bull is there. C’est à l’étranger de s’adapter à son style de vie. »[/blockquote]
[row custom_class=""][/row] Ensuite, il commence un stage en Leadership Global Change à Harvard. « C’était à la fois un rêve et un défi. Harvard, c’est un passeport pour n’importe où dans le monde. Pour obtenir l’inscription, il fallait passer l’oral et l’écrit et surtout convaincre les intervieweurs. Mais une fois que vous sortez de Harvard, vous devenez un ‘global leader’. »

À Boston

Après son stage, Jayshan Keejoo ouvre son cabinet conseil à Boston, une ville à vocation internationale, avec sa pluralité ethnique, classée parmi les 30 villes les plus puissantes au monde. Au XIXe siècle, Boston était considérée comme la capitale culturelle des États-Unis. C’est là que notre compatriote va créer lentement mais sûrement sa niche, à travers des contacts, des rencontres et des conférences internationales. « La vie à Boston, au sein de la profession légale, ressemble à ce que décrit John Grisham dans ses romans. Ça grouille de monde partout, dans les bureaux et les restaurants à l’heure du déjeuner, dans les bars le soir. Les gens travaillent au bureaux, dans les pubs, chez eux. Il n’y a pas de place pour les sentiments, la vie sociale et familiale, comme on le conçoit a Maurice », explique Jayshan Keejoo. Mais Boston, grâce à ses spécificités ethniques et sa vocation internationale, lui sert à comprendre les mutations dans le monde des entreprises. « Lorsque vous êtes à New York, vous êtes au centre du monde, que vous le vouliez ou pas. C’est le nombril des affaires. The bull is there. C’est à l’étranger de s’adapter à son style de vie. »

Vigilance constante

Mais depuis les attentats du 11 septembre 2001, les États-Unis vivent en vigilance constante, frôlant la paranoïa. « Je suis sur écoute, surtout depuis que j’ai à mon service un ex-juge fédéral et des ex-enquêteurs du FBI et du Pentagone. Je sais que les 17 personnes que ma boîte, la Boston Management and Law Professionnal, emploie sont sur écoute. C’est normal, compte tenu de mes activités. Le gouvernement américain veut connaître mes clients et la teneur de mes conversations avec eux. » Lorsqu’on lui fait remarquer que Maurice fait souvent appel à des conférenciers américains pour des conseils en management, Jayshan Keejoo esquisse un sourire. « Encore faut-il qu’il y a un suivi par la suite. Je n’en suis pas sûr… Ce qui intéresse certains salariés, c’est le certificat de présence », dit celui qui a poussé le bouchon très loin en Indonésie, lorsqu’il a invité des salariés à marcher sur un brasier ou des bris de verre. « Cela n’avait aucune connotation religieuse, je voulais les amener à surmonter certaines peurs. C’est dans la tête que tout se passe. Ils avaient à réagir devant un incendie et des verres cassés, sur le sol. Au-delà de ces épreuves, c’est toute la problématique du blocage psychologue qu’il fallait qu’ils surmontent. »

Présidentielles américaines

Attentif au climat politique aux États-Unis, Jayshan Keejoo ne croit pas à une victoire de Donald Trump aux prochaines présidentielles américaines. « Il est tellement riche qu’il finance lui-même sa campagne. Hillary Clinton, elle, doit compter sur des donateurs. Trump tient un discours qui plaît aux conservateurs, mais cela ne concerne que la politique intérieure. Trump ne propose rien en ce qui concerne la politique étrangère. Les Américains constatent cela, puis ils craignent qu’il transforme les États-Unis en sa propriété personnelle. » Et si Trump gagnait, resterait-il à Boston ? « Bien sûr. Je ne risque rien. Puis que ferais-je à partir de Maurice ? » À 40 ans, Jayshan Keejoo n’a pas planqué l’épineuse question de mariage au fond d’un tiroir. « Ici, ma famille ne fait aucune pression sur moi. Mais je sais qu’il faudra tôt ou tard franchir le Rubicon. Mais je n’emménagerai pas avec ma femme à Boston. Cette ville n’est pas faite pour la famille. Nous irons ailleurs, en Arizona, plus paisible et conviviale. Mais je garde mes bureaux à Boston ». Lorsque vous êtes à New York, vous êtes au centre du monde, que vous le vouliez ou pas. C’est le nombril des affaires. The bull is there. C’est à l’étranger de s’adapter à son style de vie.
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