Interview

Jack Bizlall, animateur du Mouvement 1er-Mai : «Pour la partielle, l’opposition fait le jeu du gouvernement»

Jack Bizlall

Si l’appel pour un candidat unique n’aboutit pas et si le MSM ne présente pas de candidat à la partielle, l’opposition s’entre-déchirera, faisant le jeu de l’Alliance Lepep. En l’absence d’un programme de changement acceptable et applicable, à quoi sert-il d’avoir la gauche au pouvoir ? C’est le sentiment exprimé par Jack Bizlall, qui se porte candidat à l’élection.

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■  Quel est le but principal de l’appel lancé pour un unique candidat de la gauche ?
Notre but est de préparer  les législatives de 2019. On ne pourra pas confronter la droite et espérer la battre s’il n’y a pas de grande alliance entre les organisations qui se proclament de la gauche. Quand je dis la gauche, j’inclus les syndicats, les organisations démocratiques, les diverses catégories sociales et des groupes de personnes qui sont confrontées à des difficultés de la vie comme les diplômés chômeurs, les licenciés et les gens vivant dans la précarité.

■  Il semble que Rezistans ek Alternativ et Lalit fassent la sourde oreille à cet appel de pied. Commentaires ?
Il n’est pas dit que la réponse à l’appel lancé par le Mouvement 1er-Mai que les gens comprennent l’importance de l’unité de la gauche. Il n’est pas dit qu’ils mettront de côté les conflits qui perdurent depuis des années entre ces différentes organisations sur le plan programmatique et stratégique. Il n’est pas dit que les organisations non gouvernementales sectaires briseront le sectarisme pour s’associer aux autres.

Il n’est pas non plus dit que le Mouvement 1er-Mai changera sa position, car dans notre constitution, notre approche est large, parce qu’à Maurice, il n’y a pas de comportements manœuvriers. D’ailleurs, Lalit le sait, car on a été ensemble lors d’une partielle à Rose-Hill quand Lindsay Collen et moi étions candidats. Rezistans ek Alternativ aussi le sait, car entre 2009 et 2012, on a partagé la même plateforme à chaque meeting du 1er-Mai.

■  Pensez-vous que cela pourrait finalement se faire ?
La date de la partielle n’a pas encore été annoncée. On a un laps de temps devant nous. Comme promis, le Mouvement 1er-Mai a choisi son candidat, mais l’action reste vivante et j’espère qu’on pourra le faire dans les semaines à venir.

«Tant qu’une minorité ne proposera pas de programme acceptable et applicable, la gauche ne méritera pas d’être au pouvoir.»

■  Quel est le poids des « petits » partis politiques dans une telle partielle ?
C’est pour cela que le Mouvement 1er-Mai affirme que la partielle au no 18 est un prélude aux législatives de 2019. Une minorité a toute son importance et ce sont les minorités qui font avancer les choses. Cette minorité dont vous parlez peut ne pas faire élire un candidat, mais en décembre 2014, certaines organisations ont présenté des candidats pour combattre les propositions du tandem Ramgoolam/Bérenger de faire notre République passer du système parlementaire à celui de présidentiel. On a attiré l’attention sur les dangers d’une telle proposition et nous avons été utiles aux élections de 2014.

■  Donc, les « petits » partis sont condamnés à ne faire que de la figuration ?
Le Mouvement 1er-Mai a toujours milité dans l’opposition extra-parlementaire. Moi, je le suis depuis 1980. Si j’avais voulu être un député, j’aurais pu, mais j’ai gardé ma ligne minoritaire. Je pose la question suivante : quel est le problème des autres ? C’est ma vie que j’engage.

Quand j’écoute les gens parler de ceux au pouvoir, cela m’horripile mais ces critiques les font passer à côté de l’essentiel qui est comment changer notre pays. Tant qu’une minorité ne proposera pas un programme de changement acceptable, compréhensible et applicable, la gauche ne méritera pas d’être au pouvoir.

■  Y a-t-il encore un électorat dit de gauche, principalement au no 18 avec sa composition ethnique ?
Toute la population est de gauche. Depuis la révolution bourgeoise au XVIIIe siècle, les gens comprenaient ce que c’était la liberté de l’individu, les droits à la liberté. Regardez : il n’y a aucun capitaliste qui rejette l’État-providence. À Maurice, on a de la chance de ne pas avoir de partis d’extrême droite. C’est le PMSD qui a fait abolir la peine capitale, car finalement c’est un des partis qui se réclament de la République et progressiste. Moi, j’ai tourné le dos au capitalisme et au stalinisme. Je cherche la voie pour une conciliation entre l’individu dans son individualisme et le collectif nécessaire du vivre-ensemble.

■  Avec la présence de plusieurs partis politiques pour la partielle, cela ne ferait-il pas le jeu de l’Alliance Lepep ?
En vérité, les partis de l’opposition dans la partielle au no 18 font le jeu du gouvernement Lepep. Si le MSM ne présente pas de candidat, l’opposition s’entre-déchirera. Mais je précise que le MSM a l’obligation de présenter un candidat, car ce n’est pas seulement le MSM qui a confronté l’électorat en 2014, mais le PMSD et les deux démissionnaires que sont Roshi Bhadain et Danielle Selvon. Le poste vacant est celui du MSM. Puis Pravind Jugnauth doit avoir le plébiscite en tant que Premier ministre et que cela soit ratifié par la partielle du no 18.

■  Avec le refus des autres partis dits de gauche de répondre à votre appel, pensez-vous que votre candidature défendant les couleurs du Mouvement 1er-Mai a une chance d’être plébiscitée ?
S’il y a une unité de la gauche, les partis concernés doivent désigner leur candidat. Pour le Mouvement 1er-Mai, c’est fait. Le choix était entre Dev Ramano et moi-même. C’est finalement moi qui ai été désigné.

■ Devons-nous vous souhaiter bonne chance ou nos condoléances ?
Souvent, quand il y a des élections, il y a des cassures. Si on me dit que j’ai une chance d’être élu, ce sera excessif. Une petite chance serait désobligeante. Ce que j’attends c’est de voir si j’ai raison ou pas de me porter candidat. En 2014, j’ai récolté quelque 3 000 voix. Je dis merci à ces citoyens qui n’ont pas gaspillé leurs croix, car ils n’ont pas soutenu le projet de République.

 

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