Les employés du transport ne sont pas totalement contre le projet Metro Express mais ils veulent avoir des garanties que leur emploi sera préservé. C’est l’avis du président de l’United Bus Service Employees’ Union (UBSEU), Iqbal Sheik Abbass. Il dit craindre qu’un millier d’employés du transport risquent de se retrouver sur le pavé si aucune décision n’est prise.
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Avec le lancement imminent du Metro Express, pourquoi dites-vous que 500 travailleurs vont perdre leur emploi ?
Lorsque le Metro Express sera opérationnel, il est évident que ceux – essentiellement les fonctionnaires – résidant à Quatre-Bornes, Vacoas et Curepipe et qui travaillent à Port-Louis vont prendre le métro. Ces personnes seront munies de cartes à puces électroniques (Ndlr : Contactless Smart Cards) afin de pouvoir voyager par le métro. Donc, cela va représenter un manque à gagner pour les opérateurs d’autobus, surtout pour le trajet Curepipe/Port-Louis. Des dizaines d’autobus desservant cette ligne au quotidien se retrouveront du coup sans passagers.
Comment pouvez-vous êtes sûr que ces gens vont prendre le métro ?
C’est logique, car les gens vont économiser de l’argent grâce aux ‘feeder buses’ qui assureront gratuitement le transport des passagers issus des faubourgs vers la station du métro. Ainsi, ils n’auront pas à payer de leur poche pour une navette chaque jour pour aller à la gare, comme c’est le cas pour de nombreuses personnes actuellement.
Sur quels critères vous êtes-vous basé pour avancer le chiffre 500 ?
Dans son memorandum envoyé au ministre Nando Bodha en août 2017, l’Union Joint Panel (UJP) avait estimé que, dans le sillage du Metro Express, quelque 100 autobus seront retirés de la circulation. Cela aura ainsi un impact direct sur environ 500 employés du transport.
Ce sont 500 pertes d’emploi dans le secteur en général ou uniquement au sein de la compagnie UBS ?
Uniquement chez UBS ! Si nous tenons en compte les autres compagnies d’autobus, je suis en mesure de vous dire que ce sont environ 1200 employés – chauffeurs, receveurs et contrôleurs – qui vont se retrouver sur le pavé. Là encore, nos estimations sont basées uniquement sur le trajet initial du Metro Express, c’est-à-dire, de Port-Louis à Curepipe. Sachant que le gouvernement a l’intention d’étendre le Metro jusqu’à Ébène, il nous faudra craindre le pire.
Le gouvernement a, n’empêche, donné la garantie que les employés du transport n’ont rien à craindre avec l’avènement du Metro Express. Vous n’y prêtez pas foi ?
À chaque question parlementaire axée sur ce sujet, le Premier ministre, Pravind Jugnauth, ainsi que le ministre du Transport, Nando Bodha, n’ont cessé de répéter : « Pena problème, travayerr ena lasirans ki tou pou parey». Mais nous, nous savons très bien que rien ne sera comme avant lorsque le Metro Express sera opérationnel. C’est pourquoi nous demandons à avoir des garanties en écrit, car au départ, le gouvernement avait dit qu’il n’irait pas de l’avant avec le projet du métro, mais au final, il est revenu sur sa décision. Aussi longtemps qu’il n’y a aucune garantie en écrit, les employés ne prêteront foi à aucune déclaration.
Je pense que le ‘cashless system’ est un avantage dans la mesure où les receveurs n’auront pas de sacoche sur eux.»
Quel genre de garanties demandez-vous ?
Nous voulons avoir la garantie que notre travail va rester le même après l’entrée en opération du Metro Express et que nous ne subissons aucune réduction de salaire afin de compenser tout manque à gagner subi par les compagnies de transport. Il est certain que les compagnies vont réduire la flotte d’autobus sur les routes pour diminuer les dépenses inutiles et ce sont les employés qui en feront les frais. Aussi, depuis des années, nous militons que le ‘Tripartite Agreement’ soit signé par les travailleurs, le gouvernement et l’employeur. Néanmoins, j’aimerai préciser que les employés du transport ne sont pas contre le projet Metro Express. D’ailleurs, nous sommes contents que le pays connaisse de tels développements. Mais nous demandons simplement d’avoir des garanties.
Dans une correspondance adressée au ministre Nando Bodha, lundi, vous avez fait part de vos appréhensions par rapport aux ‘feeder buses’. En quoi ceux-ci vous inquiète ?
Outre la gratuité des ‘feeder buses’, ces autobus vont opérer selon le ‘cashless system’. On nous a fait comprendre que dans un premier temps, les ‘feeder buses’ vont opérer avec les receveurs également. Mais nous n’avons pas la garantie que ce sera le cas après lorsque le système ‘cashless’ sera opérationnel à 100%. Qu’adviendra-t-il alors de ces receveurs? Les compagnies de transport ne vont également pas payer des receveurs à ne rien faire.
Tôt ou tard, le ‘cashless system’ est appelé à devenir une réalité dans nos autobus. Le métier de receveur va-t-il disparaître ?
À l’instar des ‘feeder buses’, nous craignons que tous les autobus deviennent des ‘one-man operator’ où seul le chauffeur doit tout faire. La présence d’un receveur dans un autobus procure aux passagers un sentiment de sécurité. On est conscient que le ‘cashless system’ est une révolution mais le receveur est aussi celui qui veille à ce que tout se déroule correctement dans un autobus durant un trajet, car le chauffeur ne peut tout faire. Je pense que le ‘cashless system’ est un avantage dans la mesure où les receveurs n’auront pas de sacoche sur eux.
Le Metro Express n’est-il pas une occasion pour les compagnies d’opter pour d’autres lignes où il y a un manque cruel de dessertes ?
Le gouvernement a certes annoncé que les compagnies d’autobus auront de nouvelles lignes à desservir. Mais quelles lignes devrons-nous desservir? Couma dir pé tire nou dan nou lakaz la ! Au fil des années, nous nous sommes habitués à desservir telle ou telle ligne et il y a une relation qui s’est établie entre nous et les passagers. Si le gouvernement décide de nous aligner sur les mêmes lignes que desservent les autobus individuels, nous aurons à faire face à une multitude de problèmes. Mais, personnellement, je ne vois pas quelles autres lignes les autobus existants vont pouvoir desservir après l’entrée en opération du Metro Express.
Regrettez-vous le manque de solidarité entre les employés du transport ?
C’est dommage que ce soit ainsi, mais nos actions sont entreprises au nom de tous les employés du transport. Plus de solidarité entre les travailleurs nous aurait donné plus de pouvoirs de négociations. Mais les employés ne sont pas tous à blâmer. Il faut comprendre le contexte et les conditions dans lesquels ils travaillent.
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