Inondations meurtrières du 30 mars 2013 : souffrance à perpétuité pour les proches des victimes 

Leurs noms resteront associés à la tragédie du 30 mars 2013. Rabindranath Bhobany, Stevenson Henriette, Pravin Kumar Khoosye, Vincent Lai Kin Wong Tat Chong, Christabel Moorghen, Toolseram Ramdharri, Retnon Ramdhani, Amrish Tewany, Trishul Tewary, Sylvia Wright-Fokeer et Jeffrey Allan Wright sont les 11 personnes ayant perdu la vie dans les inondations à Port-Louis, ce jour-là. Ils ont tous péri noyés. Neuf ans plus tard, la souffrance demeure présente pour leurs familles.

Vinod Khoosye, le père de Pravin Kumar Khoosye : «J’ai perdu un fils exemplaire»

Vinod Khoosye, le père de Pravin Kumar Khoosye, évoque la disparition de son fils. La déchirure, confie-t-il, reste la même, malgré le temps qui passe. « Nous continuons à vivre, car Dieu nous arme de courage, mais la vie n’a plus de sens. Mon fils avait 26 ans, il avait tout pour réussir. Li ti ena tou seki bon. C’était un fils exemplaire. Il était intelligent et très sportif. Il pratiquait le football, la course et la natation. Pravin était un grand nageur et il a péri noyé lors des inondations. »

Nous continuons à vivre, car Dieu nous arme de courage, mais la vie n’a plus de sens. Mon fils avait 26 ans, il avait tout pour réussir»

Le jeune homme travaillait dans un centre d’appels. « J’avais plein de projets pour lui. Il ne manquait de rien. Je voulais qu’il poursuive des études de droit à l’étranger. Une fois ses études terminées, je l’aurais aidé à trouver du travail », explique son père. « Ce n’est pas nous qui décidons. Dieu m’a donné un fils pour une durée de 26 ans. Le plus dur est de réaliser que je dois tenir jusqu’à la fin de ma vie en sachant que je ne reverrai plus mon fils que j’ai tant aimé », se désole-t-il. Le meilleur souvenir qu’il garde de Pravin ? « Il y en a plusieurs, mais ce que je retiens le plus, c’est que mon fils était comme mon ami. » 

Allan Wright, époux de Sylvia Wright et père de Jeffrey Wright : «Tout a été bouleversé au sein de la famille»

Allan Wright a perdu son épouse Sylvia et son fils Jeffrey dans les inondations du 30 mars 2013. Il ne peut contenir sa peine. « Nous sommes condamnés à vivre une souffrance à perpétuité », dit-il. Sa seule consolation réside dans le combat mené devant la justice par les proches des victimes pour obtenir réparation. 

Mes petits-enfants ne connaîtront pas leur grand-mère paternelle. C’est ma plus grande tristesse. Cette disparition se fait sentir nuit et jour»

« Il fallait agir afin d’apaiser nos souffrances. C’est pourquoi nous avons décidé de poursuivre l’État. La mairie de Port-Louis et les services météorologiques ont été ciblés dans le rapport sur les circonstances entourant les inondations meurtrières. Nous pensons qu’une réclamation de Rs 11 millions par famille est raisonnable. Ce n’est qu’après que justice aura été rendue que nous pourrons enfin faire le deuil de nos proches disparus », estime-t-il.

Depuis le drame, confie-t-il, son fils aîné Jason, qui aura bientôt 31 ans, s’est marié. Il est père de deux enfants. « Je suis devenu grand-père », se réjouit Allan Wright. « Mes petits-enfants ne connaîtront pas leur grand-mère paternelle. C’est ma plus grande tristesse. La disparition de mon épouse et de mon fils se fait sentir nuit et jour. Tout a été bouleversé au sein de la famille. Tout ! »

Marie-Hélène Henriette, la sœur de Stevenson Henriette : «Que ces événements ne se reproduisent plus !»

Le corps de Stevenson Henriette, 30 ans, a été retrouvé dans des débris entassés à proximité du restaurant KFC de la rue La Chaussée. Sa sœur, Marie-Hélène, fait ressortir que son absence est ressentie au quotidien. Surtout lors des réunions de famille. Le jour de sa disparition, Stevenson Henriette, qui était commerçant au Ruisseau-du-Pouce, s’était rendu à Port-Louis pour travailler. Mais le drame s’est produit. Neuf ans après, la famille peine encore à faire son deuil.

Nous ne souhaitons à personne de vivre ce que nous avons vécu»

« Nous nous sommes réfugiés dans la prière. Les événements du 30 mars 2013 ont été cauchemardesques. Nous ne souhaitons à personne de vivre ce que nous avons vécu. Nous prions constamment pour que ce genre d’événement ne se reproduise plus, que ce soit à Port-Louis ou dans d’autres régions du pays. Maurice ne mérite pas ça », dit Marie-Hélène. 

Jenita Rughoo, la fille de Rabindranath Bhobany : «Ce drame restera à jamais gravé dans ma mémoire»

En mars 2013, Jenita Rughoo, la fille de Rabindranath Bhobany, était en Higher School Certificate. « Mon père était employé de banque. Il ne devait pas travailler ce jour-là, mais il a remplacé un collègue », explique cette habitante de Rivière-du-Rempart. Au moment des averses, poursuit-elle, il s’est rendu dans le parking souterrain pour prendre sa voiture, mais il n’est jamais ressorti. Son épouse et sa fille unique ont été alertées de la situation quelques heures plus tard. Elles ont signalé sa disparition aux autorités dans la soirée. Ce n’est que le lendemain que le cadavre de Rabindranath Bhobany a été retrouvé par le Groupe d’intervention de la police mauricienne.

Depuis sa disparition, c’est moi qui m’occupe de ma mère. Je fais de mon mieux pour trouver un équilibre dans ma vie d’épouse et de mère»

« J’ai perdu mon père dans des circonstances très dures. Sa mort a tout chamboulé. Ce drame restera à jamais gravé dans ma mémoire. On s’arme de courage, mais il nous faudra beaucoup de temps pour oublier ce qui s’est produit. » Le pire, dit-elle, est que son père allait célébrer son anniversaire quelques jours plus tard, le 8 mai. « S’il était en vie, il aurait 61 ans. » Mercredi, Jenita s’est rendue à la stèle érigée en hommage aux victimes du 30 mars 2013, pour honorer la mémoire de son père et des dix autres personnes emportées en ce samedi noir.

« Depuis sa disparition, c’est moi qui m’occupe de ma mère. Je fais de mon mieux pour trouver un équilibre dans ma vie d’épouse et de mère. » Employée dans l’hôtellerie, elle confie qu’il ne se passe pas un jour sans qu’elle pense à son père. C’est la raison pour laquelle elle réclame justice : « Ceux qui ont fauté doivent payer. Justice doit être rendue dans cette affaire. » 

Le ministère des Infrastructures nationales : «C’était un ‘wake up call’»

« Les événements de mars 2013 ont été un wake-up call. Le réchauffement climatique est à prendre au sérieux. Il faut améliorer notre résilience », déclare-t-on au ministère des Infrastructures nationales. Après les inondations meurtrières du 30 mars 2013, rappelle-t-on, il y a eu la création du National Emergency Operations Command en 2014, puis celle de la Land Drainage Authority en 2017. « Des études ont été menées à travers le pays et 67 zones à risques ont été identifiées », précise-t-on. 

Balraj Dhunputh injoignable 

Souvenez-vous. Balraj Dhunputh, qui était directeur des services météorologiques, a dû démissionner quelques jours après le drame du 30 mars 2013. Le Dimanche/L’hebdo a tenté en vain d’obtenir une déclaration de sa part.