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Incendie sur le Gryphon - Reshma : «Mon mari s’est sacrifié pour sauver ses amis»

Reshma Seebaruth Reshma Seebaruth entourée de ses fils. Son défunt époux, Ravidutt (en médaillon).

La vie de Ravidutt Nundlall Seebaruth, dit Ravi, 43 ans, tournait autour de son travail et de sa famille. Ce soudeur, domicilié à Camp-Benoît, Montée S, qui était passionné par son métier, n’aura pas l’occasion de voir grandir ses trois fils, de 12, 8 et 4 ans, dont un souffre d’un handicap. Mercredi, un terrible incendie s’est déclaré lors des travaux de réparation sur le bateau Le Gryphon. Ce père de famille est mort électrocuté.

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Les yeux rougies d’avoir trop pleuré, la voix tremblante, Reshma Seebaruth, 40 ans, est assise sur le lit. Elle est entourée de ses enfants et de sa sœur. « Li ti kontan so fami ek so travay. Me malerezman, so travay mem kinn pran so lavi », lâche la veuve. En effet, depuis qu’il l’a rencontrée, Ravi a toujours été un bosseur, ajoute-t-elle.

« Il travaillait très dur. Li pas konn samdi, dimans ou konze piblik. Fode lager ar li pou li res lakaz »

Anita, 65 ans, la mère de la victime, nous raconte que  Ravi était l’aîné de la famille. Il n’a pas eu la possibilité d’entreprendre des études secondaires. « Il a fréquenté l’école primaire de Richelieu, mais en Standard V, il a arrêté ses études », explique-t-elle. Il a d’abord commencé par s’intéresser à la menuiserie, puis, petit à petit, s’est tourné vers la soudure. « à l’âge de 18 ans, il a  débuté au sein de l’usine World Knits. Il était attaché à l’équipe d’entretien », explique son frère Ootam, 40 ans.

C’est durant cette période qu’il a fait la connaissance de Reshma. « J’avais alors 15 ans. Nous habitions la même localité. Ravi était honnête, gentil et travailleur », nous confie sa jeune veuve. Cependant cela n’a pas été facile, poursuit-elle. « Vu mon jeune âge, mes parents n’étaient pas d’accord que je le fréquente. Mais nous nous aimions et avons persévéré », soutient-elle.

Dès que Reshma a atteint l’âge de la majorité, les deux se sont mariés. « Nous avons dû faire face à l’adversité de nouveau »,  ajoute-t-elle. Durant les dix premières années de leur mariage, ils ont tout fait pour avoir un enfant. « Au bout de 10 ans, je suis tombée enceinte pour le plus grand bonheur de Ravi », nous relate Reshma.

« Il travaillait très dur. Li pa konn samdi, dimans ou konze piblik. Fode lager ar li pou li res lakaz », explique Reshma. Puis, le couple a eu un second fils. Voulant assurer l’avenir de ses enfants, le papa redoublait d’efforts. Ensuite, il y a eu la venue au monde de leur troisième garçon, atteint de cerebral palsy, une paralysie affectant sa mobilité.

Un ressortissant indien, qui se trouvait à bord du Gryphon,
a échappé à la mort.

« Le traitement pour le petit coûte énormément. Il ne peut se mouvoir et a besoin de soins constants. Je ne travaille pas justement pour m’occuper de lui. Ravi faisait tout pour nous soutenir. Il avait trouvé un centre spécialisé », nous explique-t-elle. Lorsqu’il ne travaillait pas, c’est auprès de sa famille qu’il passait son temps. « Il aimait regarder les matchs de foot à la télé avec ses fils. Il n’en manquait jamais un. C’était un fervent supporteur de Manchester United », dit-elle.

Pour le dimanche de Pâques, Reshma dit avoir dû insister pour que Ravi accepte de rester à la maison. « Nous avons passé un très bon moment ensemble », se souvient-elle. Mais lundi, Ravi a tenu à reprendre le travail. « Il m’avait dit qu’il voulait donner la possibilité à ses collègues de foi chrétienne de prendre un congé le lundi de Pâques. Il a travaillé deux jours à l’usine », explique-t-elle.

Mercredi, c’est sur le Gryphon, bateau de plaisance amarré à la Marina, au Caudan, que Ravi s’est rendu pour effectuer des travaux de réparation. Le destin s’est montré cruel envers cet époux dévoué. Alors qu’il était dans la salle des machines, il y a eu une explosion. Les ouvriers qui s’y trouvaient, une dizaine, ont pu prendre la fuite. Certains ont essayé de se porter au secours du soudeur, mais c’était trop tard. Ravi est resté prisonnier des flammes. Il a fallu l’intervention des sapeurs pompiers pour circonscrire l’incendie au bout de trois heures. Le cadavre de Ravi a été retiré des décombres. L’autopsie a révélé qu’il est mort électrocuté.

«Il s‘est sacrifié…»

Cette nouvelle a plongé la famille de la victime dans une profonde tristesse. Reshma est inconsolable. « Je suis sûre qu’il s’est sacrifié pour sauver ses amis. C’était une personne tellement droite et dévouée », lâche-t-elle en larmes. Désormais, elle se retrouve avec trois fils à sa charge. « Mon aîné vient d’entrer au collège, le second est encore au cycle primaire et le benjamin a besoin d’attention constamment. Comment vais-je faire pour m’en sortir ? Ravi s’occupait de tout », dit-elle la voix nouée. Elle sait, cependant, pouvoir compter sur l’aide des siens.

« Mon fils bénéficie d’une pension, mais cela ne suffit pas. Je compte l’envoyer dans le centre dont Ravi avait parlé. Je suis certain qu’il aurait aimé que, même après sa mort, ses fils ne manquent de rien », soutient la veuve. Les funérailles de Ravi Seebaruth ont eu lieu jeudi après-midi. Ils étaient nombreux à venir lui rendre hommage. « Ses projets sont restés en suspens, avec sa soudaine disparition », se désole Ootam, son frère cadet.

 

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