Importation de drogues : en six mois, 39 passeurs arrêtés

En six mois, les chiffres font frémir : 39 arrestations, 664 kilos de cannabis saisis, des colis saturés de drogues de synthèse, et des passeurs venus des quatre coins du monde. Maurice s’enfonce dans les rouages d’un narcotrafic globalisé, où les mules ont parfois les traits d’un retraité… ou d’un enfant. Notre enquête dévoile les itinéraires, les complicités et les acteurs de cette déferlante silencieuse mais redoutable. 

Entre janvier et juin 2025, 25 cas d’importation de drogues dangereuses ont été recensés par les autorités mauriciennes, dont 16 à l’aéroport international de Plaisance et 9 via les services de fret aérien (PATS). À ce jour, 39 personnes ont été arrêtées à l’aéroport. Parmi elles : un enfant, un fait qui suscite une vive inquiétude tant chez les autorités que dans les rangs des ONG.

Le cannabis, roi des valises

C’est la drogue la plus fréquente dans les saisies : plus de 664 kg en six mois, souvent en provenance de Dubaï, Bangkok ou Paris. Des suspects britanniques, américains, indiens, thaïlandais et mexicains ont été appréhendés.

Des quantités faramineuses circulent : 210 kg saisis le 29 mai, 47 kg le 8 mars, ou encore 33 kg le 1ᵉr mars, ajoutés aux 161 kg interceptés dimanche à l’aéroport de Plaisance.
Mais d’autres substances circulent aussi :

• Drogues synthétiques (liquides et solides) : 3,731 kg
• Héroïne : 1,1 kg
• Hashish : 120,55 kg
• Cocaïne : 3,13 kg

Les saisies les plus impressionnantes ont été faites dans les colis postaux, en particulier en provenance de Chine, de Dubaï et d’Aruba.

Les routes aériennes du trafic

Si les mules viennent des quatre coins du globe, elles ont pourtant quelques itinéraires favoris et des compagnies aériennes bien connues des autorités.

Kenya Airways revient à deux reprises, avec des passeurs interceptés à bord des vols KQ270 et KQ274 en provenance directe de Nairobi.

Air France et British Airways sont régulièrement citées, bien que non officiellement confirmées, pour des trajets depuis Paris et Londres.

FlyDubai et Thai Airways semblent impliquées dans certains voyages via Bangkok.

Mais la reine incontestée des liaisons douteuses reste Emirates, à travers son vol EK701 reliant Dubaï à Maurice. Elle est la plus citée dans les saisies de drogues, que ce soit pour les passeurs humains ou les colis dissimulés dans le fret express.

Dubaï devient ainsi un véritable hub du trafic international vers Maurice, un point d’étape stratégique que les trafiquants utilisent pour masquer l’origine réelle des cargaisons. Les autorités mauriciennes envisagent désormais un renforcement du contrôle ciblé sur les vols en provenance de Dubaï, Paris et Bangkok.

Une cartographie des routes du narcotrafic vers Maurice

Le trafic de drogues vers Maurice prend des allures de tapis mondial, tissé de vols internationaux et d’escales stratégiques. L’analyse des arrestations entre janvier et juin 2025 met en lumière les principales plaques tournantes utilisées par les passeurs.

En tête de ce réseau : Dubaï, avec 6 groupes arrêtés, s’impose comme le hub privilégié du narcotrafic. Qu’il s’agisse de passagers en transit ou de colis envoyés via des services express, la ville émiratie est une plateforme logistique majeure pour les trafiquants.

Juste derrière : Paris, avec 3 groupes arrêtés à l’arrivée à Maurice, confirme son rôle central dans les liaisons Europe/Maurice.

Nairobi, point de départ de deux tentatives d’introduction, notamment via Kenya Airways, alerte sur une route de plus en plus exploitée entre l’Afrique de l’Est et l’océan Indien.

D’autres foyers émergent : 

• Mumbai, point d’origine d’un couple indien transportant 13 kg de cannabis.
• Bangkok, avec un groupe de 9 personnes interpellées pour 210 kg de cannabis.
• Johannesburg, avec des Sud-Africains arrêtés pour avoir importé de la cocaïne.
• Londres et les États-Unis, point de départ de groupes britanniques et américains arrêtés avec plusieurs dizaines de kilos de cannabis.

Maurice est aujourd’hui au croisement d’un trafic mondial, orchestré à partir de capitaux européens, logistique asiatique, mules africaines et réseaux sud-américains. Le défi n’est plus local, il est global, et exige une réponse coordonnée l’échelle internationale.

La douane, la police anti-drogue et les services de renseignement tirent la sonnette d’alarme : la logistique des trafiquants se perfectionne, les mules sont de plus en plus jeunes et les volumes explosent.

La majorité des arrestations ont lieu à l’aéroport, tandis que les saisies en entrepôts (PATS) concernent surtout le trafic via colis postaux.

Les trafiquants viennent de tous horizons, mais une forte concentration est observée chez les Européens et Américains

Les trafiquants sont de plus en plus jeunes, parfois des femmes en duo ou couples. Certains se présentent comme touristes ou professionnels.

Tranches d’âge des passeurs arrêtés

Les drogues synthétiques sont les plus nombreuses en volume dans les colis. Le cannabis reste la drogue la plus importée en termes de fréquence d’arrestation.

Voici le bar chart illustrant le nombre de cas de trafic de drogues par ville ou pays de départ enregistrés à Maurice entre janvier et juin 2025. On y observe clairement que Dubaï domine largement comme point d’origine, suivi de Paris et Nairobi.