Le 4 avril 1968, à 18 h 01, le pasteur Martin Luther King meurt assassiné alors qu’il se trouve sur le balcon de son hôtel à Memphis, dans le Tennessee. James Earl Ray, un Blanc ségrégationniste, est accusé, mais sera ensuite exonéré et le crime reste un mystère. 50 ans après, que reste-t-il du grand opposant à la ségrégation raciale aux États-Unis. Sa réponse non violente à la violence du racisme n’est-elle qu’un vague souvenir ?
« I have a dream »
En 2008, une fois élu président, Barack Obama plaça un buste de Martin Luther King dans le Bureau ovale. « Ce geste du premier président métis à la tête du plus puissant pays au monde n’aurait pas été possible si Martin Luther King ne s’était pas investi dans un long combat non violent pour les droits civiques des Noirs aux États-Unis », estime l’ex-ambassadeur mauricien au Mozambique, Alain Laridon
Il regrette que depuis l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, l’ambassade américaine à Maurice n’organise aucune activité pour l’anniversaire du pasteur. « Pourtant, dit-il, la dimension de l’engagement de Martin Luther King, comme celui du Mahatma Gandhi et de Nelson Mandela, a touché le monde, en raison de la nature de son combat, non pas contre un pays, mais contre une idéologie. »
Fils de pasteur et issu d’un milieu aisé, après des études universitaires, il aurait pu se complaire dans la quiétude et accepter l’ordre établi dans une Amérique ségrégationniste. En 1953, lorsqu’il devient pasteur, le sud des États-Unis est ravagé par les violences commises contre les Noirs, des meurtres racistes sont perpétrés.
En 1955, Rosa Parks, une femme noire est arrêtée pour avoir violé les lois raciales en refusant de céder sa place à un Blanc. Révolté par cette décision, Martin Luther King avec d’autres leaders noirs organise le boycott des autobus. À partir de là, sa vie sera une longue suite de manifestions non-violentes qui tirent leur inspiration des écrits d’Henry David Thoreau, auteur de la philosophie de désobéissance civile non violente, reprise en Inde par le Mahatma Gandhi.
Devenu le porte-drapeau des droits civiques des Noirs, il est alors mis sur écoute par le Federal Bureau of Investigation qui redoute la contagion de son mouvement, la ‘Southern Christian Leadership Conference’, par les communistes. Mais King, en chrétien convaincu, a toujours refusé l’idéologie ‘matérialiste’, de même que le ‘Black Power’ et Malcolm X, lequel l’avait accusé de se se servir d’écoliers et de lycéens, entre autres, lors de manifestation appelée ‘La croisade des enfants’.
La marche vers Washington
La fameuse ‘Marche vers Washington’ intervient après deux attentats à la bombe en 1963 contre un hôtel où avait séjourné Martin Luther King et contre la maison de son frère. Puis un attentat fut perpétré par le Ku Klux Klan contre une église pendant la prière : quatre jeunes filles périrent et 22 enfants furent blessés. John Kennedy, alors président des États-Unis, qui avait à plusieurs reprises fait libérer King, ne s’opposa pas à cette marche, mais demanda aux six organisateurs de renoncer à leur message jugé radical.
Les revendications étaient : 1. la fin de la ségrégation radicale dans les écoles publiques 2. une législation significative sur les droits civiques, dont une loi interdisant la discrimination raciale dans le monde du travail 3. un salaire minimum de 2 $ de l’heure pour tous les travailleurs, sans discrimination 4. un gouvernement indépendant pour Washington D.C. qui dépendait alors d’un comité du congrès. Le 28 août 1963, devant plus de 250 000 personnes réunies face au Lincoln Memorial, Martin Luther King prononça son fameux discours ‘I have a dream’. Ses actions non violentes et sa dimension internationale lui vlent, en octobre 1964, le titre de Prix Nobel de la Paix, devenant ainsi son plus jeune lauréat.
Auparavant, la même année, Martin Luther King et d’autres dirigeants des droits civiques avaient mené une marche autour de l’ancien marché aux esclaves, en Floride, durant laquelle ils avaient été agressés par des ségrégationnistes blancs. Les militants antiségrégationnistes arrêtés étaient tellement nombreux que les places manquaient dans les prisons et des détenus étaient parqués dans les rues en plein soleil. D’autres manifestants sont jetés à la mer et manquent de se noyer en voulant rejoindre les plages réservées aux Blancs.
‘Bloody Sunday’
Ce terme, avant d’être récupéré par le groupe irlandais U2 pour les besoins d’un titre, se réfère à un dimanche de mars 1967, quand 600 militants des droits civiques quittent la localité de Selma, en Alabama, pour rejoindre Montgomery, la capitale de l’État. L’année précédente, Martin Luther King et son association avaient travaillé de concert avec le Student Nonviolent Coordinating Committee, à Selma, pour l’enregistrement des électeurs sur les listes électorales. C’était une action importante, car la grande majorité des habitants de Selma étaient des Afro-Américains, mais seulement 1 % était inscrit sur les listes électorales.
Le 7 mars 1967, des défenseurs des droits civiques – Martin Luther King est absent, car il rencontre le président Lyndon Johnson –, qui marchent pacifiquement pour aller présenter leurs doléances à Montgomery, sont arrêtés sur un pont par la police et une foule de Blancs hostiles. Ils sont violemment repoussés à coups de matraque et de gaz lacrymogène. Face à cette déferlante de violence, les Noirs opposent une résistance pacifique, ce qui leur permet de gagner le soutien de l’opinion publique. Ce jour est désormais connu comme le ‘Bloody Sunday’.
Le 21 mars, Martin Luther King est présent durant une deuxième marche qui commence avec 3 200 marcheurs pour atteindre 25 000 lorsqu’ils arrivent à Montgomery. Ce jour-là, il prononce le discours « How Long, Not Long », et un peu plus tard, à la fin de la marche, le Ku Klux Klan assassine la militante blanche des droits civiques, Viola Liuzzo. Quelques mois plus tard, le président Johnson fait voter le Voting Rights Act, accordant le droit de vote sans restriction.
Le Vietnam et les pauvres
L’action de Martin Luther King et ses pensées ne sont pas restreintes aux seuls droits civiques des Afro-Américains. Il se montre très sensible sur le rôle des États-Unis dans la guerre au Vietnam. En 1967, un an avant son assassinat, il déclare : « que les États-Unis occupent le pays comme une colonie américaine » et n’hésite pas à dire que ce dernier est « le plus grand fournisseur de violence dans le monde ».
Plus tard, son discours prendra une coloration socialiste lorsqu’il dira : « Une vraie révolution des valeurs regarderait bientôt d’une manière honteuse les contrastes frappants entre la pauvreté et la richesse. Avec une indignation justifiée, elle regarderait au-delà des mers et verrait les capitalistes individualistes de l’Ouest investissant d’énormes sommes d’argent en Asie, en Afrique et en Amérique du Sud, juste pour faire des profits et sans aucune préoccupation pour les améliorations sociales dans ces pays, elle dirait : ‘Ce n’est pas juste’ ».
Le discours de King concernant la présence militaire américaine au Vietnam est sans ambiguïté, accusant les États-Unis d’avoir tué un million de Vietnamiens, dont beaucoup d’enfants. Plus tard, à l’examen de la situation dans le monde, il aboutira à ce constat implacable : « Les États-Unis sont du mauvais côté de la révolution mondiale ».
Pour Alain Laridon, le combat de Martin Luther King ressemble à plusieurs égards à ceux du Mahatma Gandhi et de Nelson Mandela. « Ils se sont tous opposés à des adversaires de taille d’une part, et d’autre part, sans recourir à la violence. Mais le pasteur King avait à se battre aussi contre des suprémacistes blancs qui avaient une lecture personnelle de la Bible. S’il n’a jamais été communiste, son discours, à la fin de sa vie, est imprégné de socialisme, lorsqu’il déclare : ‘ Vous ne pouvez pas parler de la fin des bidonvilles sans dire d’abord que les profits ne doivent plus être faits sur les bidonvilles. Il doit y avoir une meilleure distribution des richesses et peut-être que l’Amérique doit se diriger vers un socialisme démocratique.’ »
(Source : Internet)
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