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Hôpitaux publics : la Special Monitoring Team suscite le mécontentement

La polémique a éclaté à la suite d’une visite surprise du ministre de la Santé, Anil Bachoo, au SAJ Hospital.

Annoncée le 29 août par le ministère de la Santé, la création d’une Special Monitoring Team chargée d’effectuer des visites inopinées dans les hôpitaux et centres de santé de l’île a provoqué une levée de boucliers au sein du personnel médical. Cette mesure, destinée à améliorer la qualité des services, est perçue par certains syndicats comme une attaque frontale contre des équipes déjà épuisées par des années de sous-effectifs chroniques.

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La polémique a éclaté à la suite d’une visite surprise du ministre de la Santé, Anil Bachoo, au Sir Anerood Jugnauth Hospital (SAJ Hospital) dans la nuit du mercredi 27 au jeudi 28 août. Dans une publication sur Facebook le lendemain, le ministre a relaté avoir trouvé une cinquantaine de patients en attente aux urgences, alors que « tous les docteurs qui devaient être là n’étaient pas là ». Cette sortie a été vécue comme une humiliation par certains, qui dénoncent un manque de dialogue et une démoralisation accrue.

« Tout le monde est démoralisé », affirment le Dr Meetheelesh Abeeluck, président de la Government Medical and Dental Officers Association (GMDOA), et le Dr Vinesh Sewsurn, de la Medical and Health Officers Association (MHOA). Selon eux, le ministre a opté pour la confrontation plutôt que pour une enquête approfondie sur les raisons de cet engorgement nocturne. Le Dr Sewsurn explique que les médecins de garde étaient bien présents à l’hôpital, mais pas nécessairement aux urgences au moment précis de la visite. Il pointe du doigt le nouveau système e-health, en phase d’essai depuis une semaine, qui impose une saisie plus longue des données médicales jusqu’à 22 heures, redirigeant ensuite les patients vers les urgences et créant un « goulot d’étranglement ».

Les syndicalistes soulignent les efforts consentis par les équipes depuis la pandémie de Covid-19, malgré un « manque criant de personnel ». « Ceux qui sont en poste doivent faire le travail de trois à cinq médecins », insiste le Dr Sewsurn, ajoutant que les propos du ministre sont « démoralisants et décourageants ». Le Dr Abeeluck relève que de nombreux médecins refusent désormais les heures supplémentaires (« bank sessions »), aggravant la crise. Les deux représentants syndicaux notent que leurs membres travaillent souvent jusqu’à 60 heures par semaine sans rémunération additionnelle, et regrettent que la publication du ministre ait « diabolisé » le personnel, alimentant les tensions avec le public.

Du côté du ministère, on défend la mesure comme une nécessité pour améliorer le service dans l’intérêt des patients. « Lorsqu’on tente de mettre de l’ordre quelque part, c’est assez normal que certaines personnes se révoltent, mais le public connaît la situation dans les hôpitaux », affirme-t-on. Le ministre « a vu ce qu’il a vu » lors de sa visite et a demandé des explications avant toute action. L’objectif n’est pas d’« attaquer qui que ce soit », mais d’améliorer le service pour le public, tout en reconnaissant un « manque de personnel que nous avons hérité du passé et auquel on tente de remédier ». La grande majorité des soignants « fait bien son travail », insiste-t-on.

Les syndicats appellent à un dialogue constructif : le Dr Sewsurn suggère que les Special Monitoring Teams, qui seront menées par le Dr Vasantrao Gujadhur, Senior Advisor au ministère de la Santé et ancien Director of Health Services, incluent des directeurs de la santé pour une hiérarchie claire, et qu’elles documentent non seulement les dysfonctionnements, mais aussi les réalités du terrain. « Ce genre de pratique politique, gouvernement après gouvernement, décourage les jeunes d’entrer dans le service public et pousse d’autres à le quitter », conclut le Dr Abeeluck.

Ce qu’avait dit le ministre Bachoo

La publication Facebook du ministre de la Santé, Anil Bachoo, a déclenché la polémique. Lors d’une visite inopinée au Sir Anerood Jugnauth Hospital (SAJ Hospital), Flacq, le ministre a dénoncé des manquements graves : « Vers minuit, j’ai été consterné de découvrir que bien moins de médecins étaient présents aux urgences que ceux prévus au planning de garde. Près de cinquante patients attendaient, la plupart souffrant et en détresse. »

Il a promis des « actions disciplinaires immédiates » contre les responsables. « L’attitude de certains membres du personnel envers les patients est inacceptable, et je ne tolérerai pas cela », a-t-il écrit, tout en reconnaissant que « la majorité des soignants sont extrêmement travailleurs et dévoués. De plus, beaucoup d’entre eux vont bien au-delà de leurs moyens et de leurs fonctions pour soigner les patients et ils méritent une pleine reconnaissance et du respect pour leur dévouement ». Il a toutefois déploré qu’une « petite minorité » manque d’« honnêteté et d’empathie », ternissant l’image du secteur.

Le ministre a réaffirmé son engagement à réformer le système de santé, mais a insisté : « Le vrai changement ne peut se produire que si le personnel hospitalier assume ses responsabilités. »

La doctoresse Hosany se montre critique

La doctoresse Sumayyah Hosany, qui avait travaillé en Chine durant l’épidémie de Covid-19, déplore, dans un post Facebook dimanche, que le ministre Anil Bachoo pointe du doigt les médecins sans assumer ses responsabilités. « Anil Bachoo, pointer du doigt dans cette génération de médecins ne passera plus. Vous devriez être tenu responsable de ce que vous dites et de ce que vous faites pour améliorer les soins aux patients », affirme-t-elle. Elle impute l’échec du système e-health au ministère : « L’échec de votre système e-health. Quand comptiez-vous dire au public pourquoi ils attendent ?  Quand allez-vous commencer à dire la vérité sur les rôles de votre ministère dans la définition des politiques de santé ou leur absence ? Quand allez-vous dire aux patients que les médecins ne peuvent pas prescrire les médicaments dont ils ont besoin parce qu’il n’y en a pas ? Quand leur direz-vous qu’il y a un manque de gants et que j’ai connu des médecins qui lavaient des gants jetables pour les réutiliser ? » La liste est interminable, selon elle : aucun hôpital ne mérite de lutter avec les bases, et aucun patient de souffrir. « Les gouvernements qui se sont succédé ont toujours contrôlé les soins de santé, avec des promotions basées sur le degré de servilité. Et si vous osez vous opposer au système, vous perdez.

Nous, les travailleurs de la santé, refusons de porter votre blâme plus longtemps. Nous voulons une responsabilité sur ce que vous avez fait avec tous les rapports que vous avez recueillis. »

 

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