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Hausse des tarifs d’électricité : un électrochoc dans le budget des entreprises

La note à chaque fin de mois risque d’être salée pour les PME. Aymeric Dookun, Managing Director de Deramann Group.

Le tant redouté 1er février 2023 est arrivé. La plupart des entreprises devront débourser davantage pour leur facture d’électricité. En bout de chaîne, ce sont les consommateurs qui risquent encore d’en pâtir.

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La révision du prix de l’électricité est entrée en vigueur à Maurice ce mercredi 1er février. Les entreprises utilisant de l’électricité pour leur production appréhendaient ce moment. Car, à n’en point douter, ce coût à la hausse ne sera pas sans conséquence. 

À vrai dire, les chefs d’entreprise sont presque habitués à de nouvelles révisions de divers prix depuis 2020. Aymeric Dookun, Managing Director de Deramann Group, soutient que la situation ne s’améliore guère. « Il y a toujours de la pression sur les coûts. En 2020, c’était en raison de la pandémie. Puis, il y a eu l’impact du coût du fret, suivi de la crise ukrainienne. Nous avons droit maintenant à la hausse des coûts au niveau local. Je comprends que Maurice importe l’énergie. Toutefois, tous les ans il y a quelque chose de nouveau. J’ai presque envie de dire que les entreprises y sont habituées », déclare-t-il. 

La compétitivité des compagnies prendra un coup.

Pour l’heure, certaines entreprises ne connaissent pas le montant exact du coût supplémentaire auquel il faudra faire face pour l’électricité. Thierry Lagane, Production Manager de Plastinax Austral Ltd, explique que des mesures sont prises pour essayer de réduire la consommation d’électricité. Ce qui est sûr, dit-il, c’est que ce sera compliqué, car les dépenses vont varier en fonction du coût de l’électricité. « Pour nous, la hausse ne sera pas répercutée sur les consommateurs. Nous avons déjà notre catalogue et il faudra poursuivre en fonction des prix qui y sont affichés. Nous devrons ainsi absorber l’augmentation du coût. »  

Toutefois, dans l’éventualité que la hausse du coût de l’électricité ne soit pas soutenable, indique Aymeric Dookun, les consommateurs en feront probablement les frais. Par conséquent, le volume de vente pourrait baisser. 

Les PME du secteur manufacturier sont loin d’accueillir ce 1er février à bras ouverts. Pour cause, la note à chaque fin de mois risque d’être salée pour elles. VR Creation, dont la facture d’électricité avoisinait Rs 25 000 par mois, pourrait la voir atteindre Rs 35 000. Jugdish Bhoonye, directeur de l’entreprise, s’inquiète du montant que cela va représenter sur un an. Le coût de production devrait être supérieur de 2 %, selon lui. La compétitivité de cette PME qui fabrique des pull-overs en prendra un coup.

« Nos prix d’exportation vont grimper. Nous ne sommes pas compétitifs actuellement pour nos exportations en Afrique du Sud, et cela va compliquer la situation. Doit-on s’attendre à ce que le tarif de l’eau ou des télécommunications augmente par la suite ? Définitivement, 2023 sera plus difficile que l’année précédente », déplore le directeur de VR Creation. D’où la suggestion de Jugdish Bhoonye que le gouvernement accorde une subvention aux PME qui subissent déjà la charge de la compensation salariale et la hausse du coût des matières premières. 


Questions à Zayd Soobedar, Managing Director de Strategic Insight Group : «La survie de certaines PME ne tient qu’à un fil»

zaydQuelles seront les conséquences de la révision du tarif de l’électricité sur les entreprises ?
Cela aura une implication directe sur le coût de production des entreprises du secteur manufacturier. Le risque de perte de compétitivité est bien réel. La rentabilité de ces entreprises sera également impactée. Le contexte est difficile et les entreprises continuent d’avoir des charges additionnelles qui s’ajoutent à la hausse des taux d’intérêt, la contribution sociale généralisée (CSG) ou encore le Portable Retirement Gratuity Fund (PRGF). La solvabilité en prendra un coup, ce qui pourrait pousser certaines entreprises vers la fermeture. 

Les entreprises pourront-elles réajuster leurs dépenses ?
Les entreprises essaient effectivement de réajuster leurs dépenses alors que les prix ont pris l’ascenseur depuis plus d’un an. Cependant, l’année 2023 s’annonce difficile avec la hausse du tarif de l’électricité. La situation n’est pas du tout favorable aux entreprises du secteur manufacturier, notamment du textile, pour lesquelles l’électricité représente une grosse charge.  

Certaines compagnies sont fragiles financièrement.

Alors que le pouvoir d’achat des Mauriciens a été affaibli ces dernières années, les entreprises sont-elles en mesure d’absorber les coûts supplémentaires ?
Qu’on le veuille ou non, au final, la hausse du coût de l’électricité sera passée aux consommateurs. Or, ces derniers ne sont sans doute plus en mesure de dépenser davantage. Il faudra donc s’attendre à une baisse de la demande. Et qui dit réduction de la demande, dit baisse de la marge réalisée par les entreprises. Certaines entreprises sont en mode survie, car il y a eu les répercussions de la Covid-19 et de la guerre en Ukraine, les perturbations sur la chaîne d’approvisionnement et la compensation salariale, entre autres. 

Les consommateurs ne seront donc pas épargnés ?
C’est évident ! Plus de 80 % des entreprises ne pourront pas absorber la hausse du coût de l’électricité. La majorité des entreprises à Maurice sont des PME. Elles sont fragiles financièrement et la survie de certaines ne tient qu’à un fil.  

Le gouvernement a-t-il les moyens d’aider les entreprises en difficulté face à l’augmentation du tarif de l’électricité ?
L’État a mis en place plusieurs mesures depuis 2020 pour soutenir les entreprises. Cependant, la situation devient plus compliquée pour les entreprises avec la révision du tarif de l’électricité. Le gouvernement peut, via l’Industrial Finance Corporation of Mauritius (IFCM), accorder plus de facilités aux PME. Le taux d’intérêt proposé par l’IFCM est inférieur à ceux des banques. Cela pourrait permettre aux entreprises de réduire le coût des intérêts pour pouvoir garder la tête hors de l’eau. Peut-être que l’État pourrait aussi introduire une subvention ou un « grant » mensuel par l’intermédiaire de SME Mauritius pour le paiement de l’électricité. Toutefois, reste à savoir si le gouvernement a la capacité de financer cela, car il a beaucoup puisé dans les réserves depuis 2020. 

 

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