
- Le gouvernement contractera des dettes de Rs 68,87 milliards entre juin 2025 et juin 2028
En six mois, le nouveau gouvernement a contracté Rs 33,74 milliards d’emprunts et prévoit Rs 68,87 milliards supplémentaires d’ici juin 2028. Ces fonds serviront à refinancer des dettes arrivant à échéance et financer des projets stratégiques, selon les documents du Budget. À tour de rôle, le gouvernement du jour et l’ancien régime s’accusent d’avoir provoqué le creusement de la dette publique.
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L’évolution de la dette publique entre décembre 2024 et juin 2025
Décembre 2024
Montant de la dette : Rs 608,25 milliards % du PIB : 87,6 %
La composition de la dette
Dette locale :
Rs 481,94 milliards (69,4 % du PIB)
Dette externe :
Rs 126,31 milliards (18,2 % du PIB)
VS
Juin 2025
Montant de la dette : Rs 641,99 milliards % du PIB : 90 %
La composition de la dette
Dette locale : Rs 517,7 milliards (80,63 % du PIB)
Dette externe : Rs 124,29 milliards (19,37 % du PIB)
Ce qu’il faut retenir de ces données
Entre décembre 2024 et juin 2025,…
… la dette a grimpé de Rs 33,74 milliards.
… la dette locale a augmenté de Rs 35,76 milliards.
… la dette externe a baissé de Rs 2,02 milliards.
Gestion de la dette
Ce que prévoit le gouvernement
- « La part de la dette intérieure à court terme devrait passer de 20 % à moins de 10 % d’ici juin 2028. Pour atteindre cet objectif, le gouvernement prévoit d’échanger les titres de dette à court terme et ceux à moyen et long terme arrivant à échéance dans moins de deux ans contre des obligations à plus longue maturité. »
- « Par ailleurs, une augmentation de l’émission de titres à moyen et long terme est envisagée afin de répondre à la demande croissante du marché. Ces mesures visent à réduire la part de la dette intérieure arrivant à échéance dans un délai d’un an à environ 18 %, contre 31 % actuellement. »
- « Conformément à la Public Debt Management Act 2008, la stratégie gouvernementale sur la gestion de la dette continue de s’articuler autour des objectifs suivants : répondre aux besoins de financement sans perturber le marché, minimiser les coûts du portefeuille de la dette tout en maintenant un niveau de risque acceptable, et soutenir le développement d’un marché secondaire efficace pour les titres publics. Pour ce faire, diverses stratégies ont été planifiées et des objectifs de contrôle des risques ont été fixés. »
- « Cependant, en raison de besoins d’emprunt plus élevés que prévu et d’une hausse du taux directeur au cours de l’année, certains objectifs n’ont pas pu être atteints. La part de la dette intérieure à court terme en juin 2025 devrait atteindre environ 20 %, contre 13 % prévus initialement. Ainsi, le risque de refinancement, mesuré en termes de durée moyenne de l’échéance et de dette à payer dans l’année, serait plus élevé que prévu. Les indicateurs de coûts devraient également dépasser les estimations précédentes. Des mesures correctives seront nécessaires à moyen terme pour réduire le coût et le risque du portefeuille de la dette. »
- « Concernant la gestion de la dette intérieure, le gouvernement poursuivra sa stratégie axée sur un profil de taux d’intérêt majoritairement fixe, tout en réduisant la part des emprunts à court terme. Dans cette optique, la durée moyenne de refixation des taux passera de 4,7 ans actuellement à environ 5,3 ans à moyen terme. »
- « S’agissant de la dette extérieure, la proportion de prêts à taux fixe augmentera de 37 % à 46 %, tandis que celle des prêts à taux variable sera réduite de 62 % à 54 %. De plus, la part de la dette totale devant être refixée dans un délai d’un an passera de 37 % à 25 %, limitant ainsi l’exposition aux fluctuations des taux d’intérêt. »
- « Pour atténuer les risques de change, le gouvernement privilégiera les financements locaux, profitant de l’excès de liquidités dans le système bancaire. La dette extérieure représentera ainsi environ 19 % du portefeuille global de la dette publique d’ici juin 2028. Par ailleurs, la structure monétaire de la dette extérieure sera davantage diversifiée, afin de mieux correspondre à celle des recettes d’exportation. »
- « Enfin, le ratio du service de la dette devrait légèrement augmenter, passant de 3,2 % à 3,4 % à moyen terme, tout en restant nettement inférieur au seuil de prudence fixé à 6 %. »
Extraits des documents du Budget
Les prévisions pour les trois prochaines années
Juin 2026
• Dette totale de Rs 679,67 milliards (88,3 % du PIB)
• Dette domestique : Rs 551,46 milliards
• Dette externe : Rs 128,2 milliards
Juin 2027
• Dette totale de Rs 702,68 milliards (84,8 % du PIB)
• Dette domestique : Rs 560,62 milliards
• Dette externe : Rs 141,98 milliards
Juin 2028
• Dette totale de Rs 710,86 milliards (79,7 % du PIB)
• Dette domestique : Rs 560,97 milliards
• Dette externe : Rs 149,88 milliards
Ce qu’il faut retenir de ces données
Entre juin 2025 et juin 2028,…
… la dette sera haussée de Rs 68,87 milliards.
… la dette locale devrait augmenter de Rs 43,27 milliards.
… la dette extérieure enregistrera une hausse de Rs 25,59 milliards.
Sanjay Goolab, Managing Director – Securities and Execution Desk chez AXYS : «La soutenabilité de la dette compromise si les fonds sont mal utilisés»
Alors que la dette publique brute des économies émergentes et des pays à faible revenu oscille généralement entre 65 % et 75 % du PIB, Maurice se situe dans la tranche haute avec 90 %, indique Sanjay Goolab. Le Managing Director – Securities and Execution Desk chez AXYS donne plus d’explications sur la dette publique du pays.
À Maurice, est-ce qu’il y a eu un changement dans la définition du taux officiel de la dette publique ? Faut-il prendre en compte la dette nette ou la dette brute ? Quelle est la norme qui est préconisée par les institutions internationales ?
À ce jour, il n’y a pas eu de changement officiel dans la définition du taux de la dette publique à Maurice. Le chiffre généralement cité est celui de la dette brute du secteur public élargi, incluant les engagements des entreprises publiques non-autonomes et garantis par l’État.
Les institutions internationales telles que le FMI et la Banque mondiale recommandent en général l’usage de la dette brute comme indicateur de référence pour permettre la comparaison entre pays. Toutefois, elles considèrent aussi la dette nette (déduite des actifs financiers liquides de l’État) dans l’évaluation de la viabilité à moyen terme. Le Budget 2025–2026 utilise encore la dette brute comme référence principale mentionnée comme Rs 642 milliards ou 90 % du PIB.
On observe aussi dans les données faisant état de la dette publique le terme « Gross prior to consolidation adjustment » et celui de « Gross prior to consolidation adjustment after consolidation ». Pouvez-vous nous en dire plus là-dessus ?
Ces deux termes renvoient à des traitements comptables spécifiques dans la présentation de la dette publique :
- « Gross prior to consolidation adjustment » reflète la somme totale des dettes contractées par les entités publiques, sans éliminer les transactions croisées - par exemple, une dette d’une entité publique envers une autre.
- « Gross after consolidation adjustment » représente la dette publique après élimination de ces éléments intragouvernementaux -par exemple, une dette d’une SOE (state owned enterprise) envers le Trésor public.
L’objectif de cette consolidation est d’éviter le double comptage. La dette consolidée donne une image plus fidèle des obligations financières de l’État envers le reste du monde ou les agents non-gouvernementaux.
Le recours accru au marché domestique dans un environnement de taux élevés signifie un alourdissement du fardeau des intérêts dans le Budget.
Dans ce débat sur la dette publique, il ressort que le gouvernement actuel a emprunté Rs 33,74 milliards entre décembre 2024 et juin 2025. Était-il prudent d’emprunter autant alors qu’il y avait déjà une forte pression sur la dette ?
L’emprunt de Rs 33,74 milliards dans un contexte où la dette publique frôle les 90 % du PIB peut paraître risqué à première vue. Toutefois, selon les documents budgétaires, une partie de ces emprunts est orientée vers le refinancement de dettes arrivant à maturité, et vers le financement de projets productifs dans les infrastructures et l’investissement stratégique.
Cela étant dit, cette décision n’est pas sans risques. Le gouvernement s’est engagé dans une trajectoire de consolidation budgétaire sur trois ans. Si ces ressources ne sont pas utilisées efficacement pour stimuler la croissance ou générer des recettes futures, la soutenabilité de la dette pourrait être compromise.
Durant cette période, le gouvernement a levé un montant additionnel de Rs 35,76 milliards rien que sur le marché local et ce, à travers l’émission de bons du Trésor. Étant donné que depuis le début de février le Key rate a été relevé, quel sera l’impact sur le service de la dette et des finances publiques ?
La hausse du Key Rate depuis février accroît mécaniquement le coût des nouvelles émissions de dette à court et moyen termes, notamment via les bons du Trésor. Cela aura un impact direct sur le service de la dette, qui représente déjà Rs 21,8 milliards par an, selon le discours du Budget.
Le recours accru au marché domestique dans un environnement de taux élevés signifie :
- Un alourdissement du fardeau des intérêts dans le Budget
- Une compression de la marge budgétaire pour les dépenses sociales ou d’investissement
- Et potentiellement une hausse des taux dans le système financier si la demande d’emprunt public éclipse celle du secteur privé
Cela renforce l’urgence de mettre en œuvre des réformes structurelles pour dynamiser la croissance et élargir la base fiscale.
L’ancien Premier ministre a déclaré que, depuis la pandémie, l’augmentation de la dette publique est une problématique rencontrée par pratiquement tous les pays. En moyenne, quel est le montant de la dette publique dans les économies comparables à Maurice ?
Effectivement, l’augmentation de la dette publique est un phénomène global post-COVID, surtout dans les petites économies ouvertes.
Selon le FMI (World Economic Outlook 2024), la moyenne de la dette publique brute pour les économies de marché émergentes et pays à faible revenu se situe autour de 65 % à 75 % du PIB.
Pour les petits États insulaires en développement (SIDS), les niveaux sont plus élevés, souvent au-delà de 80 %, en raison de leur vulnérabilité aux chocs externes -tourisme, climat et commerce. À titre de comparaison :
- Barbade : 118 % (2024, post-restructuration)
- Seychelles : 71 %
- Fidji : 85 %
- Jamaïque : 78 %
Ainsi, Maurice se situe dans la fourchette haute, ce qui renforce la nécessité d’une discipline budgétaire et d’une croissance soutenue pour stabiliser le ratio dette/PIB.

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