
Cinq cas suspects, des signatures falsifiées et des procédures contournées : le rapport du Comité d’enquête sur l’attribution des visas du Hadj 2025 met en lumière de sérieuses défaillances au sein de l’Islamic Cultural Centre Trust Fund (ICCTF). Le Conseil des ministres a d’ores et déjà transmis le dossier à la police et au DPP pour enquête.
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Le rapport du Comité d’enquête sur l’attribution des visas du Hadj 2025 a été rendu public le vendredi 3 octobre. Mis en place le 14 mai dernier par le ministère des Arts et du Patrimoine culturel, le comité d’enquête avait pour mandat de faire toute la lumière sur de graves allégations d’irrégularités impliquant cinq personnes liées à l’Islamic Cultural Centre Trust Fund (ICCTF).
Après examen des dossiers ICCTF, le comité a mis en évidence de graves anomalies administratives, falsifications de documents et manquements dans les procédures de contrôle. Les enquêteurs se sont penchés sur cinq cas suspects impliquant des pèlerins ayant obtenu des visas de manière jugée irrégulière et inéquitable.
L’enquête a révélé que les cinq personnes concernées n’étaient pas officiellement enregistrées pour le Hadj 2025. Pourtant, des numéros d’enregistrement fictifs leur ont été attribués à partir des dossiers de pèlerins ayant déjà accompli le Hadj. Plus troublant encore, les signatures figurant sur les formulaires de confirmation ne correspondaient ni à celles des pèlerins ni à celles apparaissant sur leurs passeports. Le comité note une forte ressemblance entre ces signatures et celle d’un agent du ICCTF, M. Boodhoo, chargé de la remise des formulaires. Ce dernier a nié toute implication, mais les enquêteurs recommandent qu’un expert graphologue soit désigné pour déterminer l’éventuelle falsification.
Documents manipulés
Les cartes de confirmation, dites Purple Cards, ont également attiré l’attention du comité. Certaines ont été imprimées sur la même feuille et non séparées, contrairement à la procédure habituelle.
Les enquêteurs ont aussi mis au jour des anomalies dans le système de paiement du « Tannazul » - un mécanisme de transfert de visa entre pèlerins. Aucun versement n’a été retracé sur le compte officiel du ICCTF à la State Bank of Mauritius. Les lettres de « Tannazul swapping » ont, de plus, été datées après la délivrance des visas, ce qui est contraire aux pratiques établies. Dans un cas, aucune trace de paiement n’a été trouvée malgré l’obtention d’un visa.
Manque de transparence
Le Comité d’enquête déplore un manque de collaboration de la part du ICCTF. Malgré plusieurs demandes officielles, l’institution n’a pas fourni certains documents essentiels, notamment les « special requests » de deux pèlerins. Ce comportement, souligne le rapport, soulève des questions sur la transparence et la gouvernance interne du centre, qui gère un aspect hautement sensible du pèlerinage à La Mecque.
Autre élément relevé par le comité : les cinq pèlerins impliqués étaient tous inscrits sous le même opérateur de voyage, Kaafila Travel & Tours Co Ltd. Ce constat renforce les soupçons d’un réseau organisé ou, à tout le moins, d’une complicité administrative dans la délivrance des visas irréguliers.
Lors de sa réunion le vendredi 3 octobre, le Conseil des ministres a pris note du rapport et a annoncé plusieurs mesures. Le document a été transmis au Commissaire de police, ainsi qu’au Directeur des poursuites publiques (DPP) pour examen des infractions pénales présumées.
Il a également été référé au Conseil d’administration du ICCTF, afin que des mesures disciplinaires appropriées soient prises à l’encontre des agents impliqués dans ces pratiques frauduleuses. Le gouvernement affirme vouloir garantir transparence, équité et intégrité dans la gestion du pèlerinage à venir.
Vers d’éventuelles poursuites
Le rapport du Comité d’enquête laisse entrevoir la possibilité de poursuites pénales et disciplinaires à l’encontre de certains agents du ICCTF. Il met en exergue un système fragilisé, où le manque de contrôle interne et la concentration des responsabilités ont permis des manipulations graves dans un processus censé être juste et sacré.
Les conclusions du comité appellent désormais à une réforme en profondeur du mécanisme d’allocation des visas du Hadj afin d’éviter toute répétition de telles dérives, notamment avec la mise en place d’un système de gestion informatique plus sécurisé.
Shakeel Mohamed : « Le conseil d’administration de l’ICC a décidé de solliciter l’avis de son conseiller légal afin de déterminer la procédure à suivre »
Dans une déclaration à Radio Plus, le lundi 6 octobre, le ministre Shakeel Mohamed a confirmé qu’une réunion d’urgence du conseil d’administration de l’Islamic Cultural Centre (ICC) s’était tenue le samedi 4 octobre. Cette rencontre faisait suite à la publication du rapport d’enquête sur l’attribution des visas du Hadj 2025.
« Je suis au courant que les membres du Board de l’ICC ont tenu une réunion d’urgence le samedi 4 octobre. J’ai pris connaissance des ‘Minutes Proceedings’ de cette réunion. Lors de cette rencontre, le conseil d’administration a décidé de solliciter l’avis de Me Shaukat Oozeer, conseiller légal de l’ICC, afin de déterminer la procédure à suivre en cas de mise en place de comités disciplinaires », a-t-il déclaré.
Shakeel Mohamed a précisé que le ministère ne peut intervenir dans les démarches entreprises par la police ou le Bureau du Directeur des poursuites publiques (DPP), soulignant que ces instances opèrent de manière totalement indépendante.

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