Le gouvernement de l’alliance du Changement a annoncé dans son manifeste électoral son intention de mettre en place une Fiscal Responsibility Act, dans le but de renforcer la discipline budgétaire du pays et d’instaurer un cadre juridique garantissant la responsabilité fiscale. Il revient qu’il y a une intention ferme de traduire cette promesse en réalité.
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Le vœu de venir avec ce texte de loi figurera d’ailleurs dans le discours-programme 2025-2030 qui sera lu par le Président de la République, Dharam Gokhool, à la reprise des travaux parlementaires, le vendredi 24 janvier. Un haut responsable du gouvernement confie que cette loi devrait devenir une réalité dès que possible.
Cette loi vise à définir les limites d’endettement et de déficit budgétaire, tout en exigeant une responsabilité accrue du gouvernement vis-à-vis de la gestion des finances publiques. Au niveau du gouvernement, l’on estime par ailleurs que les « scandales » financiers hérités du précédent régime font qu’une telle loi est plus que jamais nécessaire pour prévenir de tels cas dans le futur.
Paul Bérenger, Premier ministre adjoint, a évoqué l’importance d’une telle législation lors d’une intervention au Parlement mardi dernier, le 17 décembre, soulignant que la Fiscal Responsibility Act est une priorité pour le gouvernement. Il a précisé : « Ce que nous devons adopter, c’est une loi qui fixe le taux d’endettement du pays, le déficit budgétaire, etc, qui exige une responsabilité du gouvernement. » Selon lui, bien que de nombreux pays aient adopté des lois de responsabilité fiscale, beaucoup ne parviennent pas à faire respecter leurs propres règles. La Jamaïque est, à ce titre, un exemple à suivre, ayant instauré un mécanisme robuste pour garantir le respect de ses engagements fiscaux. « Elle est en train de mettre debout une Independent – et vraiment indépendant, pas comme l’ancienne l’ICAC d’ici, heureusement – Fiscal Commission, des gens indépendants, qualifiés, avec un board, un directeur général et un Advisory Board pour faire respecter la Fiscal Responsibility Act que ce pays a adoptée. »
Et d’ajouter que « Nous sommes sérieux, nous regardons loin, nous regardons l’horizon. Le Premier ministre et moi, et les autres, nous ne voulons pas que ce crime économique qui a été commis ces dernières cinq années se répète. Il faut à tout prix éviter cela et le prix, c’est une bonne Fiscal Responsibility Act et un bon mécanisme pour la faire respecter, une Independent Fiscal Commission ».
Une telle loi permet aussi de rééquilibrer le budget national mais aussi d’aider à réduire la dette publique mauricienne qui, comme indiqué dans le document «State of the Economy» rendu public le 10 décembre par le Premier ministre, Navin Ramgoolam, s’élevait à 559,1 milliards de roupies à la fin de juin 2024, et représente 83,4 % du Produit Intérieur Brut (PIB). À la fin de 2014, elle était de 59,5 % du PIB.
Cette inspiration jamaïcaine repose sur la mise en opération d’une Commission fiscale indépendante qui supervisera l’application des lois fiscales et veillera à leur respect. Cette commission, créée dans le cadre de la Fiscal Responsibility Act de la Jamaïque, sera en activité à partir du 1er janvier 2025. Elle aura pour rôle de fournir des évaluations indépendantes des résultats budgétaires et d’influencer le débat public sur la politique fiscale à travers la publication de rapports et d’analyses détaillées. Cette commission jamaïcaine sera dotée d’un comité consultatif composé de personnalités du secteur privé, académique, syndical et civil, et d’un commissaire fiscal ayant pour mission de garantir la transparence et l’efficacité des politiques fiscales.
Ce modèle d’indépendance et de transparence est salué par les autorités mauriciennes, qui souhaitent s’inspirer de cette approche pour renforcer leur propre cadre fiscal.
Mettre les ministres et fonctionnaires devant leurs responsabilités
En plus de la création d’une commission indépendante, la loi jamaïcaine inclut des mécanismes de contrôle visant à encourager le respect des règles fiscales à travers des évaluations objectives de la politique économique du gouvernement. Cette approche pourrait être adaptée aux spécificités de Maurice, comme l’a précisé une source gouvernementale : « La Jamaïque est un phare dans ce domaine. Il nous faudrait un mécanisme similaire à Maurice, mais adapté à nos réalités et nos lois. Nous comptons y travailler aussi rapidement que nous le pourrons. »
En Jamaïque, la commission fournira des analyses fiscales indépendantes et jouera un rôle constructif pour informer le public, contribuant ainsi à l’adhésion aux règles fiscales du pays. La création de cette commission et son rôle actif visent à assurer une discipline budgétaire soutenue et à éviter toute dérive dans la gestion des finances publiques.
La mise en place d’une Fiscal Responsibility Act à Maurice vise donc à assurer une plus grande rigueur dans le suivi des politiques fiscales et établir un cadre clair pour la gestion de la dette et du déficit budgétaire.
L’objectif du gouvernement mauricien est aussi de mettre les ministres, hauts fonctionnaires et autres devant leurs responsabilités et les inciter à gérer au mieux les deniers publics. Une des questions en suspens est cependant si une telle loi peut être mise en application avec un effet rétroactif afin de pouvoir traîner en justice ceux qui ont été légers avec l’argent public. Ce sera probablement une question sur laquelle l’Attorney General, Gavin Glover, devra se pencher lors de la préparation du texte de loi.
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