Interview

Gérard Sanspeur, ‘Senior Advisor’ au ministère des Finances: «On entend déjà le vrombissement d’un nouvel appareil économique»

Gérard Sanspeur
Le président du Board of Investment et « Senior Advisor » au ministère des Finances explique que la préparation du Budget 2016-17 diffère des précédents exercices car elle est cette fois ouverte au public. 2016 sera, selon lui, l’année des toutes premières récoltes sur le plan économique. En sus de présider le Board of Investment (BoI), vous êtes ‘Senior Advisor’ au ministère des Finances. Prêt pour le Budget 2016-17 ? En principe, la préparation du Budget commence dès janvier par des échanges entre le ministère des Finances et les autres ministères. Le but étant de déterminer les grandes orientations à la lueur des réalisations des années précédentes et en fonction des objectifs à atteindre par chaque ministère selon les orientations définies par le gouvernement. Puis, il y a des séances de travail et des rencontres techniques auxquelles participent des représentants de diverses institutions, des opérateurs du secteur privé ainsi que d’autres parties prenantes. Cette large concertation de tous les acteurs concernés par le développement économique vise à recueillir les préoccupations, les suggestions et les recommandations, mais aussi à partager les contraintes économiques. Ces échanges permettent ainsi de définir les objectifs prioritaires pour le pays et les stratégies en vue de les atteindre. Pour l’exercice 2016-17, le processus ne sera pas qu’une préparation administrative classique qui relève de la prérogative exclusive de l’exécutif. Pour la première fois, le gouvernement met en place un dispositif permettant de donner la parole à tous les citoyens dans cette phase de consultations pré-budgétaires. L’élargissement du cadre consultatif a pour but de renforcer la participation du grand public dans le processus décisionnel qui arrêtera les choix budgétaires. Enfin, la préparation du Budget se fera en plusieurs étapes suivant un programme de travail bien défini. Quelle est la marge de manœuvre pour ce Budget, sachant que nous avons une dette publique de plus de 60 % du Produit intérieur brut (PIB) et un déficit budgétaire de plus de 3 % ? Ce Budget, ainsi que le précédent, s’articule autour d’une impérative stratégique pour tout mettre en œuvre en vue de booster notre croissance économique. Qui dit croissance, dit création d’emplois et relance de la consommation. L’effet multiplicateur entraînera, sur les moyen et long termes, une hausse des recettes publiques. De facto, sur le court terme, cette dette et ce déficit ne représentent pas nécessairement un problème majeur pour le pays. D’ailleurs, près de 75 % de la dette publique est intérieure, ce qui limite les risques pour l’État. Pour investir dans l’avenir, il faut savoir prendre des risques. Mais des risques réfléchis et calculés, qui auront très certainement des répercussions positives sur l’économie et le développement du pays. La question n’est pas de savoir combien on dépenserait, mais plutôt comment et à quelle fin ces dépenses sont budgétisées. On est dans une période où nous redéfinissons notre modèle économique. Nous voulons déployer tous les moyens nécessaires pour assurer une meilleure qualité de vie et une justice sociale à tous. Vous avez lancé le ‘People Budget Transparency Portal’ via Facebook… Pouvez-vous nous dire quel est l’objectif de cette initiative ? La mise sur pied d’une plateforme numérique de concertation, déjà opérationnelle depuis le lundi 4 avril, ouvre une grande opportunité pour mettre à la disposition du public des informations et des pistes de réflexion pour que l’exercice budgétaire soit une participation avertie et constructive qui implique tous les acteurs économiques et sociaux dans un des événements les plus importants dans la vie de la nation. Le budget annuel est un événement national qui touche les Mauriciens dans leur vie familiale, sociale et professionnelle. Car il y va de la qualité de la vie de tous les concitoyens sans distinction aucune. Cette initiative se démarque de l’approche traditionnelle. Cette plateforme de transparence servira de tribune sociale privilégiée pour faciliter le dialogue entre le citoyen et le gouvernement dans le but de mieux comprendre le vécu du terrain et de répondre, dans la mesure du possible, aux attentes de la population dans son ensemble. C’est un forum qui, nous le souhaitons, donnera lieu à des échanges d’idées et à des débats constructifs qui aideront certainement à reformuler notre stratégie de développement et de trouver des solutions afin d’améliorer les opportunités de réussite de chacun de nos citoyens sans distinction. L’éventualité de maintenir ouverte cette plate-forme n’est pas à écarter. D’une part, en raison de l’accueil réservé à la page Facebook. D’autre part, ses fonctionnalités sont susceptibles d’être élargies à des fins d’un monitoring en temps réel, par le grand public, de la mise en œuvre des mesures budgétaires qui auront été validées. Maurice ne fera ainsi qu’emboîter le pas aux pays développés qui ont déjà mis en place une plateforme de participation citoyenne. [blockquote] « Les retombées positives sont déjà visibles dans le secteur du tourisme, qui a enregistré une croissance de 8,5 % en 2015. » [/blockquote] Beaucoup s’attendaient à une pluie d’investissements étrangers avec la nouvelle administration en place. Pourquoi est-ce que ce n’est pas le cas ? Malgré le ralentissement économique constaté depuis 2012 au niveau mondial et qui, de toute évidence, semble s’accentuer en 2016, l’économie mauricienne conserve ses assises sur des fondamentaux solides. Ce qui laisserait augurer des perspectives de reprise à court terme. Les projets d’investissements qui ont été présentés au BoI, l’an dernier, annoncent un record en termes d’investissement direct étranger (IDE). Ces nouveaux projets s’insèrent dans le cadre des phases de mise en œuvre échelonnées sur les cinq prochaines années. L’amélioration de l’environnement des affaires et la réforme au niveau des procédures constituent un axe stratégique dans le plan d’action du gouvernement pour attirer les investisseurs étrangers. C’est la mission du BoI. Le comité intersectoriel Doing Business a listé un nombre important de mesures pouvant contribuer à améliorer le climat des affaires, allant dans le sens de l’épanouissement de l’entreprise productrice de richesses et d’emplois, en rationnalisant procédures, délais et coûts. J’ai déjà annoncé que l’IDE utile constitue, pour notre économie, un vecteur de partenariat, dont l’attraction et l’admission doivent être encouragées toutes les fois où il apparaît comme susceptible de générer un impact positif pour le pays. Cette démarche se traduira dans la Finance Act 2016 par l’élimination des effets négatifs au moyen du repositionnement de certaines règles relatives à la promotion de l’investissement. Le 1er trimestre 2016 vient de s’achever… Pensez-vous qu’on pourra atteindre au moins 4 % de croissance cette année ? 2016 sera l’année des toutes premières récoltes. 2015 a vu la mise en place de plusieurs programmes incitatifs pour attirer l’investissement, contribuer au développement économique du pays et créer des emplois. Les efforts commencent à porter leurs fruits. On entend déjà le vrombissement d’un nouvel appareil économique. D’ailleurs, le moral des entrepreneurs est au plus haut depuis des années déjà. Certains secteurs-clés ont longtemps souffert de la morosité économique à l’échelle mondiale, notamment la construction, le secteur manufacturier et le tourisme. Le nouvel agenda économique donnera tout le support nécessaire pour revigorer ces secteurs qui, rappelons-le, ont le potentiel d’entraîner bien d’autres activités. Les retombées positives sont déjà visibles dans le secteur du tourisme, qui a enregistré une croissance de 8,5 % en 2015. Plusieurs chantiers sont ouverts et la réalisation rapide de ces nombreux projets devrait nous aider à franchir la barre des 4 % en 2016, si les conditions propices s’y prêtent et que toute la nation travaille dans la même direction.
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